HomeA la uneTENUE PROBABLE D’ELECTIONS EN 2018 EN RDC : Ni les menaces de l’ONU ni les sanctions américaines ne dissuadent Kabila

TENUE PROBABLE D’ELECTIONS EN 2018 EN RDC : Ni les menaces de l’ONU ni les sanctions américaines ne dissuadent Kabila


 

L’élection présidentielle ne pourra pas se tenir avant 2018 en République démocratique du Congo (RDC). C’est du moins, ce que laisse penser la commission électorale de ce pays. En effet, elle vient de confier aux autorités congolaises qui n’en demandaient pas mieux, que le recensement électoral ne pourra s’achever qu’en fin 2017. Et pour peaufiner le tout, elle aura besoin de 500 jours supplémentaires. Autrement dit, l’élection présidentielle ne pourra se tenir qu’en 2018. Or, l’opposition et la société civile ainsi que la Communauté internationale, souhaitent que le scrutin présidentiel ait lieu le plus tôt possible. Et si jusque-là, elles boudent le dialogue national initié par Joseph Kabila et ses partisans, c’est parce qu’elles se veulent intransigeantes sur la question, mais aussi sur la position du président à qui elles demandent d’annoncer publiquement qu’il ne briguera pas un troisième mandat au terme des délais constitutionnels. C’est dire que cette déclaration de la commission électorale risque de braquer d’avantage l’opposition. En tout cas, il faut craindre qu’elle ne tue définitivement l’initiative du dialogue au Congo qui, on le sait, a déjà pris du plomb dans l’aile. Car, on voit mal comment l’opposant emblématique Etienne Tshisekedi pourrait accepter un tel agenda électoral. Même l’opposant modéré Vital Kamerhe et les siens qui ont rejoint la table des pourparlers demandent à ce que le délai donné par la commission électorale, soit réduit. On se demande si ces derniers ne se feront pas rouler dans la farine par le régime de Kabila qui semble depuis le début, avoir tout mis en œuvre pour ne pas tenir l’élection à bonne date. Et cela, dans le seul et unique but de permettre à Kabila de demeurer au pouvoir après les délais constitutionnels, la Cour constitutionnelle l’ayant autorisé à y rester jusqu’à l’élection du nouveau président. Lentement mais sûrement, Kabila, pourrait-on dire, est en train si ce n’est déjà fait, de mettre tout le monde devant le fait accompli. Le glissement du calendrier électoral semble déjà acquis. Ce dont il a besoin, c’est la durée de ce que l’on pourrait appeler une transition. Le processus semble désormais irréversible. Et tout porte à croire que Kabila est plus que jamais déterminé à prolonger son bail à la tête de l’Etat. Et ni les menaces d’enquête internationale brandies par l’ONU sur le massacre des 19 et 20 septembre derniers, ni les sanctions américaines contre deux de ses généraux, ne dissuadent Kabila. A propos de ces sanctions, on pourrait dire que « c’est bon, mais ce n’est pas arrivé !,  phrase que servaient invariablement les marchands burkinabè à leurs clients, quand leur offre d’achat est en deçà du prix de vente. Si l’on peut saluer  la décision du Trésor américain de geler les avoirs  des généraux Gabriel Amissi Kumba dit « Tango fort » et John Numbi Banza Tambo et d’interdire à tout ressortissant américain de réaliser des transactions avec eux, force est de reconnaître que ces sanctions ne peuvent dissuader le camp Kabila.  Toutefois, l’on pourrait dire que  « c’est bien fait pour leur gueule », comme on l’entend souvent dire. En effet, le général Amissi Kumba est l’homme qui avait commandé les forces armées pendant la répression de manifestations politiques,  avec le macabre  bilan de 27 morts en janvier 2015. Quant à son acolyte, lui, il s’est illustré dans de sordides manœuvres assorties de menaces de mort visant à contraindre les candidats des autres partis à se désister au profit de ceux de la coalition au pouvoir.

Au-delà  du symbolisme, les sanctions ne sont que de faible portée

Ces mesures donc, en plus de punir ces brebis noires de l’armée congolaise en les frappant éventuellement au portefeuille, ont l’avantage de dissuader ceux qui seraient tentés par les mêmes comportements,  surtout en ce moment où les nuages s’amoncellent au-dessus du Congo.  Kabila, on le sait, par le massacre des opposants du 19 septembre, a fait la preuve de sa détermination à user de la méthode forte pour endiguer la contestation populaire qui vise à l’empêcher de tordre le cou à la Loi fondamentale pour s’éterniser au pouvoir. Ceux qui disposent donc de la puissance publique, sont bien avertis, ils pourraient, en cas d’abus, subir l’ire de l’Oncle Sam. Mais il faut le dire, au-delà  du symbolisme, ces sanctions ne sont que de faible portée. Car, encore faut-il que les incriminés disposent de biens dans les territoires et institutions sous juridiction américaine. Et puis, ces généraux peuvent paraître du menu fretin, à côté des vrais commanditaires et bénéficiaires de leurs actes que sont Kabila et tous les Raspoutine qui arpentent les arcanes du pouvoir en RD Congo. C’est dire qu’il eut fallu frapper plus haut et plus fort. A défaut, ces sanctions paraissent comme des « mesurettes » destinées à se donner bonne conscience face à l’agonie du peuple congolais, quand elles ne sont tout simplement pas l’expression de l’hypocrisie des Occidentaux qui savent où frapper pour faire démordre la bête.  Mais il faut bien se rendre à l’évidence, la RD Congo est un grand pays où les intérêts économiques sont tels qu’il faut avancer à pas feutrés.  Les Etats, faut-il le rappeler, n’ont pas d’amis, ils n’ont que des intérêts. Il était d’ailleurs d’autant plus cohérent de frapper fort le régime Kabila qu’au moment où les USA ont décidé des sanctions contre les généraux, ils émettent dans le même temps un avis de guerre civile  dans le pays et ont décidé du rapatriement des familles de leur personnel présent sur le territoire congolais.

Le Congo s’enfonce dans une mauvaise saison

Cet avis est d’autant plus sérieux que les USA ne sont pas les seuls à lancer l’alerte.  De la trompette du ministre français des Affaires étrangères,  Jean Marc Ayrault, sort le même son. Il y a donc de fortes raisons de croire à l’imminence du danger. Du reste,  la sagesse africaine enseigne que « quand les fourmis ramassent leurs œufs, c’est qu’il va pleuvoir ». Le Congo s’enfonce donc, pour paraphraser l’écrivain, dans une mauvaise saison.  Même si les Américains ne sont pas responsables de la situation, il faut tout de même déplorer  le fait que cet ordre d’évacuation ressemble à un abandon en pleine détresse du peuple congolais qui a déjà reçu les premières salves de la furie meurtrière du régime Kabila. Cette situation n’est pas sans rappeler l’épisode des Français évacuant leurs ressortissants au Rwanda, laissant orphelines les populations à la barbarie meurtrière des génocidaires. Cela dit, la question que l’on peut se poser, est celle de savoir si ces sanctions et cet avis de guerre civile, suffisent à dissuader Kabila de son rêve monarchique. Cette pression américaine jointe à celle du Vatican lors de sa récente rencontre avec le Saint-père, peut-elle le pousser à un examen de conscience et à faire acte de contrition ? Il faut malheureusement craindre que non, car «  il est difficile de réveiller quelqu’un qui ne dort pas ». La tentation du pouvoir est trop forte et il y a fort longtemps que Kabila dîne avec le Diable qui, sous les apparences des Raspoutine, lui a déjà pris son âme. Même si donc cette pression occidentale fait l’effet de l’eau sur les plumes d’un canard, on peut tout de même s’en féliciter, contrairement au mutisme de l’UA  qui, pourtant, dispose d’un mécanisme de prévention des conflits. En tout cas, elle ne pourra plus se prévaloir de l’excuse de n’avoir pas vu venir le drame et l’on peut se surprendre à  rêver qu’elle puisse avoir un regard plus attentif sur ce feu qui couve sous les cendres en RD Congo.

En attendant l’hypothétique sortie de l’UA de sa léthargie innée, il serait fort souhaitable que la CPI dont la seule évocation suffit à semer l’épouvante dans l’âme des dictateurs et de leurs courtisans, prenne les devants pour ne pas avoir à sévir après-coup.

 

« Le Pays »


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