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TRANSITION POLITIQUE AU MALI


Il s’était retranché dans un mutisme qui ne manquait pas de faire jaser mais depuis le 28 novembre dernier, il est sorti de son silence pour interpeller vigoureusement les autorités de la transition au Mali. Lui, c’est l’imam Mahmoud Dicko qui, se prononçant sur la situation de son pays, a indexé la gestion de la transition  qui est loin de donner satisfaction. S’adressant directement aux autorités de Bamako, le célèbre imam de Badalabougou s’est voulu clair : « Vous êtes nos fils ! Dieu vous a confié la gestion du pays. Mais nous avons constaté que ça ne va pas ». Et l’emblématique leader religieux d’expliquer qu’avec d’autres confrères, ils ont demandé à rencontrer les dirigeants actuels pour échanger sur la situation du pays, sans succès jusque-là. La question que l’on peut alors se poser est de savoir si cette sortie du guide religieux, est une simple boutade ou une mise en garde des autorités de la transition, contre toute dérive. A moins que ce ne soit une manière, pour lui, de se rappeler aux bons souvenirs de la junte au pouvoir à Bamako en vue de se repositionner dans le jeu politique comme une voix qui compte.

 

En plus d’être un avertissement sans frais, cette interpellation du guide religieux est une sortie opportune

 

 

La question est d’autant plus fondée que l’ancien président du Haut conseil islamique (HCIM)  n’est pas n’importe qui au Mali. Et tout porte à croire que celui-là même qui fut, à un moment donné, le visage le plus médiatisé de la contestation anti-IBK (Ibrahim Boubacar Kéita) en devenant de fait le leader le plus en vue d’une opposition hétéroclite, a gardé toute son influence et son aura auprès des populations maliennes.  De ce point de vue, il est tout à fait compréhensible qu’il cherche à garder sinon la main, du moins un œil sur l’évolution de la situation de son pays. D’autant qu’il a joué un rôle important dans les changements intervenus à la tête de l’Etat malien sous la poussée de la rue qui a fini par avoir raison du régime de Kankélétigui.  C’est pourquoi cette façon de mettre les autorités de la transition face à leurs responsabilités en pointant du doigt la conduite des affaires de l’Etat, peut passer, à bien des égards, comme un acte de courage dans ce Mali où les voix critiques contre la junte au pouvoir se font de plus en plus rares sous peine de représailles.  Au-delà, cette interpellation est une bonne chose pour la transition elle-même à qui l’on ne connaît pas de véritable contre-pouvoir au Mali, pour peu que cela permette à la junte au pouvoir de changer son fusil d’épaule. Mais que peut changer le sermon de l’imam Dicko à la situation au Mali ? Les autorités de la transition y prêteront-elles une oreille attentive à l’effet de redresser la barre ? On attend de voir. Mais quoi qu’il en soit, l’on peut, d’ores et déjà, dire qu’en plus d’être un avertissement sans frais, cette interpellation du guide religieux qui jouit par ailleurs d’une autorité morale est une sortie opportune, dictée par le contexte sociopolitique marqué par le report des assises nationales de la refondation au moment où la communauté internationale presse la junte au pouvoir pour avoir un échéancier clair de la transition devant déboucher sur des élections pluralistes censées signer le retour du pays à l’ordre constitutionnel normal.

 

Jusqu’où ira ce dernier dans ses mises en garde ?

 

 Et si, foi des partisans de l’imam, l’on devrait l’entendre de plus en plus souvent, l’on peut croire qu’il a fait le choix d’être quelque part la mauvaise conscience des dirigeants actuels et de ne pas les laisser se permettre toutes les libertés possibles au moment où le pays brille par un isolement qui ne dit pas son nom, sur la scène internationale. A ce propos, et l’occasion faisant le larron, l’influent leader religieux s’est fait l’avocat de son pays en « demandant à la communauté internationale, singulièrement aux pays voisins et frères, ceux surtout de la CEDEAO, leur indulgence, leur compréhension et leur accompagnement ». Sera-t-il entendu par l’instance sous-régionale ? L’histoire le dira.             .  En attendant, cela est à son honneur, en tant que personnalité soucieuse de l’avenir de son pays. Mais l’on peut se convaincre que son plaidoyer aurait pu peser davantage si dans le même temps, il se montrait plus incisif dans son interpellation des autorités de la transition dont les louvoiements dans l’établissement d’un calendrier électoral clair, cristallise le courroux de la CEDEAO impatiente de voir le pays refermer le plus rapidement possible, la parenthèse de la transition. De guerre lasse, l’institution régionale y est même allée de sanctions individuelles contre des personnalités de la transition, pensant pouvoir peser sur Bamako.  En tout état de cause, face à cette première ruade de l’imam Dicko, on attend de voir la réaction de Assimi Goïta et ses camarades qui étaient hier, 29 novembre encore sur la brèche, mais qui n’arrivent toujours pas à convaincre une bonne partie de la classe politique de l’opportunité des assises nationales auxquelles cette dernière refuse toujours de participer.  Prendront-elles le risque de se mettre à dos l’emblématique leader religieux bien connu pour être un leader d’opinion ? Jusqu’où ira ce dernier dans ses mises en garde ? Autant de questions dont les réponses devraient peu ou prou permettre de voir un peu plus clair dans la conduite de la transition.

 

« Le Pays »

 


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