HomeGrand angleVERDICT DE LA COUR DE JUSTICE SUR LE NOUVEAU CODE ELECTORAL : Le grand recul

VERDICT DE LA COUR DE JUSTICE SUR LE NOUVEAU CODE ELECTORAL : Le grand recul


Le nouveau Code électoral voté le 7 avril dernier par le Conseil national de Transition (CNT), avait suscité, on se rappelle, l’ire du CDP (Congrès pour la démocratie et le progrès), le parti de Blaise Compaoré, au motif que certaines de ses dispositions étaient particulièrement dirigées contre ses militants. De ce fait, les partisans de l’ancien président avaient déposé une plainte auprès du Conseil constitutionnel. Celui-ci les avait déboutés. C’est alors qu’ils avaient sollicité l’arbitrage de la Cour de justice de la CEDEAO, dans l’espoir d’obtenir gain de cause. C’est désormais chose faite. En effet, le lundi 13 juillet 2015, cette juridiction a donné raison au CDP, en invalidant purement et simplement le nouveau Code électoral. Ce verdict peut être décrypté de la manière suivante. Il est en déphasage avec non seulement le protocole de la CEDEAO sur la démocratie, mais aussi avec la Charte africaine de la démocratie et de la bonne gouvernance de l’Union africaine (UA). Ces deux textes, il faut le rappeler, avaient été adoptés pour faire barrage à toutes les forces de tripatouillage constitutionnel tendant à empêcher l’alternance politique. De toute évidence, la modification de l’article 37 dont s’était rendu coupable Blaise Compaoré, soutenue en cela par le CDP et alliés, est un cas flagrant de

pratique aux antipodes de la démocratie, celle tendant à empêcher l’alternance. L’on peut donc avoir du mal à comprendre le bien-fondé de la décision de la Cour de justice de la CEDEAO. L’on peut ajouter à cela le fait qu’au plan pédagogique, ce verdict représente un véritable gâchis, en ce sens qu’il véhicule un message qui peut inspirer et conforter les satrapes d’Afrique. Ceux-ci peuvent désormais s’adonner à cœur joie à toutes les pratiques tendant à tirer la démocratie vers le bas dans leurs pays respectifs et ce, avec la certitude qu’ils ne courent aucun risque d’en payer le prix si les choses venaient à déraper. Ce verdict sonne donc comme un encouragement à l’irresponsabilité et à l’impunité en politique. Dans le cas du Burkina Faso, cette prime à l’irresponsabilité et à l’impunité en politique est d’autant plus révoltante que l’acharnement de Blaise Compaoré à s’accrocher au pouvoir avait été à l’origine de la mort d’une trentaine de Burkinabè dont le seul crime est de s’être dressés, les mains nues, pour lui faire barrage. La CEDEAO a vécu en live cette tragédie.

Le verdict de la Cour de justice de la CEDEAO vient en rajouter à un climat politique délétère

Avec ce verdict, l’on peut dire que c’est la mémoire de tous ces martyrs de la démocratie qui vient d’être souillée. Ils ne manqueront pas de se retourner dans leur tombe puisque ceux qui portent la responsabilité morale et politique de leur assassinat viennent d’être blanchis par la Cour de justice de la CEDEAO. Décidément, il y a de quoi écraser une larme pour la démocratie en Afrique et de s’indigner. Car ce verdict représente un coup de massue porté à la démocratie. Dans le même temps, il offre de la matière au CDP pour alimenter sa

campagne pour l’élection de son champion. Il se saisira de ce verdict à coup sûr pour tirer davantage à boulets rouges sur la transition et se dresser sur ses ergots pour crier cocorico. Et c’est de bonne guerre. Ce faisant, il pourra porter le coup de grâce à la Transition qui est déjà très affaiblie, en raison, entre autres, du bras de fer engagé par le Régiment de sécurité présidentielle (RSP) et la hiérarchie militaire avec le Premier ministre Yacouba Isaac Zida. Ce verdict vient en rajouter à ce climat politique délétère. Le plus grand perdant de ce jugement, au delà de la Transition, c’est le peuple burkinabè ! et plus particulièrement tous ceux qui sont épris de justice et de démocratie. Mais ce verdict n’est pas étonnant. Il s’inscrit dans l’ordre normal des choses et cela pour deux raisons essentielles.

D’abord, le CDP a mis les petits plats dans les grands pour qu’il en soit ainsi. Le lobbying qu’il avait notamment mis en branle pour plaider sa cause auprès de certaines capitales africaines a porté fruit. La Côte d’Ivoire dont le président Alassane Ouattara ne s’est jamais gêné pour dénoncer le caractère exclusif à ses yeux du nouveau Code électoral et qui pourrait ne pas être étranger au verdict de la CEDEAO, peut pavoiser.

Ensuite, la CEDEAO vient de confirmer, par ce verdict, la thèse déjà répandue au sein de l’opinion africaine qu’elle n’est pas une institution des peuples mais une institution exclusivement au service des princes qui gouvernent leur pays comme leur jardin potager. Mais tout espoir n’est pas perdu pour le peuple burkinabè, au regard des considérations suivantes. Contrairement à ce que d’aucuns pourraient penser, le verdict de la CEDEAO n’est pas si contraignant pour le Burkina, au point que les autorités de la transition doivent obligatoirement revenir sur le nouveau Code électoral. Le cas de Karim Wade en est une preuve parlante. La Cour de justice de la CEDEAO, on se rappelle, avait exigé sa libération inconditionnelle. Mais jusque-là, le gouvernement de Macky Sall n’a pas accédé à cette injonction. A cela, il faut ajouter que la Cour a tout de même nuancé sa décision en demandant à la Transition de ne viser que les dirigeants de l’ex-régime. C’est dire qu’elle reconnaît quelque part le bien-fondé du nouveau Code électoral querellé. De toute évidence, les autorités de la Transition ont la possibilité de recourir à la Charte africaine de la démocratie et de la bonne gouvernance de l’UA. Et rien ne nous dit que cette instance, dont les décisions sont au-dessus de celles de la CEDEAO, ne réparera pas le tort causé au peuple burkinabè et à la démocratie par le verdict que vient de prendre la Cour de justice de la CEDEAO.

Sidzabda


Comments
  • PEU IMPORTE LE VERDICT DE LA COUR CEDEAO,ON RECADRE LA CHOSE POUR VISER PLUS PRÉCISÉMENT LES DIRIGEANTS ALORS ?JE NE PENSE MÊME PAS QU’ON VISAIT LE CITOYEN LAMDA MAIS BEL ET BIEN CES GOUROUS INFÂMES QUI ONT POUSSE LEURS APPÉTITS VORACES JUSQU’À CE QU’UNE TRENTAINE DE PERSONNES SOIT TUÉE. CES GENS Là NE PEUVENT SE PRÉSENTER .LA LUTTE CONTINUE ET D’AILLEURS LE CAS DE KARIM WADE ET DE HISSEN HABRE FONT JURISPRUDENCE .ON CONTINUE.

    15 juillet 2015
  • C’est dommage et une honte que jusqu’ici nos dirigeants
    soient accrochés comme des sangsues au pouvoir pour
    protéger leurs biens et à occulter la souffrance de leur population.
    C’est qui engendre les révolutions que certaines juridictions semblent oublier.

    15 juillet 2015

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