HomeA la uneVIOLENCES MEURTRIERES PRE ET POST ELECTORALES EN GUINEE

VIOLENCES MEURTRIERES PRE ET POST ELECTORALES EN GUINEE


Le 22 mars dernier, en pleine pandémie du Covid-19, la Guinée tenait, dans un climat de fortes tensions, son scrutin couplé, en l’occurrence les législatives et référendum. Ce, malgré les interpellations de la communauté internationale qui avait émis des réserves sur le fichier électoral et le boycott de l’opposition alors en croisade, avec la société civile, contre le projet de troisième mandat dont elle prête l’intention au président Condé. Un projet qui passait nécessairement par la tenue de ce scrutin référendaire.  Au sortir de ces élections fort agitées du fait des heurts qui ont éclaté entre manifestants et forces de l’ordre, avait éclaté une guerre des chiffres entre l’opposition qui dénonçait de nombreux morts et le pouvoir qui était dans une logique de minimisation des chiffres. Plus de deux mois après la tenue du scrutin querellé, le gouvernement vient de reconnaître trente morts pendant les violences du référendum. Silence donc car après son forfait, Condé compte ses morts ! Et ces chiffres donnés le 26 mai dernier par le parquet général de Kankan, ne concernent que la ville de Nzérékoré, dans le Sud du pays, non loin de la frontière libérienne.

Quel crédit peut-on accorder à cette Justice qui semble lire dans le téléprompteur du président Condé ?
Quand on sait que lors de ce double scrutin querellé, outre cette localité méridionale du pays, des affrontements ont eu lieu aussi bien dans la capitale, Conakry, que dans d’autres villes comme Mamou dans le Centre et Boké à l’Ouest, on peut mesurer l’ampleur des dégâts humains causés par la question du troisième mandat de Condé, que la Guinée traîne comme un boulet au pied depuis la mi-octobre 2019, date du début des manifestations du FNDC (Front national de défense de la Constitution), une coalition d’organisations de la société civile et de partis politiques, depuis lors, devenue le poil à gratter du régime. A preuve, refusant de se regarder dans une glace et d’assumer sa responsabilité dans ces tueries, le pouvoir de Conakry n’a rien trouvé de mieux que d’imputer la responsabilité de ces morts au collectif de l’opposition et de la société civile. Dès lors, quel crédit peut-on accorder à cette Justice qui semble lire dans le téléprompteur du président Condé ? Si ce n’est pas une fuite en avant, cela y ressemble fort. Car, même à aller dans la logique qu’il y a eu mort d’homme parce qu’il y a eu manifestation, ce n’est plus un secret pour personne que c’est la volonté à peine voilée du président Condé de briguer un troisième mandat, qui est à l’origine des manifestations de l’opposition.  Cela dit, cette sortie des autorités intervient quelques jours à peine après l’annonce, par le FNDC, de la reprise imminente de ses manifestations contre le fameux projet de troisième mandat du président Condé. Et ce malgré le fait que le locataire du palais Sekhoutouréya tient, depuis le 27 mars dernier, la clé de son sésame à travers son référendum adopté à plus de 91% de voix selon les résultats de la Commission électorale nationale indépendante. On se demande si les autorités guinéennes ne trouveront pas là un alibi pour justifier une éventuelle répression des manifestations à venir de l’opposition.

Il est temps, pour la Guinée, de rompre avec le cycle des violences politiques

On est d’autant plus fondé à le croire que le Professeur semble chercher à instrumentaliser la Justice pour mieux sévir contre l’opposition. Et rien qu’à regarder le zèle et la brutalité dont fait montre la Grande muette dans la répression des manifestations du FNDC, l’on n’a pas de peine à se convaincre qu’elle est déjà acquise à la cause du Prince régnant. Mais, pour un pays qui se veut démocratique, il est temps, pour la Guinée, de rompre avec le cycle des violences politiques avec leurs lots de morts qui endeuillent continuellement le peuple et contribuent à ternir davantage son image à l’extérieur. Non, la Guinée n’est pas un pays maudit. Il est seulement victime des lubies de ses dirigeants successifs qui semblent avoir jusque-là mis leurs intérêts égoïstes au-dessus de ceux du peuple. Alpha Condé ne fait pas exception. Et c’est peu dire que la propension à la limite de l’obstination, de l’opposant historique devenu président, à ramer à contre- courant de la démocratie en sapant les règles de l’alternance, est en train, si ce n’est déjà fait, de doucher les espoirs de ceux qui croyaient encore en un possible sursaut de ce pays dont le peuple semble abandonné à son triste sort par une communauté internationale bien impuissante. C’est dire si aujourd’hui plus que jamais, il appartient au peuple guinéen de prendre son destin en main, s’il veut changer le cours actuel de son histoire. En tout cas, personne ne viendra faire le combat à sa place.

« Le Pays »


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