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ANNULATION DE LA PRESIDENTIELLE MALAWITE


Déclaré réélu à la majorité simple de 38 %, le président malawite, Peter Mutharika, aura désormais le sommeil trouble. La Cour constitutionnelle vient, en effet, de mettre du sable dans son couscous en annulant le scrutin présidentiel du 21 mai 2019, au motif qu’il n’a été ni libre ni transparent. Pour la plus haute juridiction malawite, de nombreuses et importantes irrégularités ont été constatées lors des élections tant et si bien que le résultat a été compromis. Sauf  donc s’il décide de faire comme l’y autorisent les textes, à savoir faire appel, Peter Mutharika n’est plus le président réélu puisque conformément  à la décision des juges, de nouvelles élections devraient être organisées dans les 150 jours qui suivent . Et ce n’est pas tout. Le plus haut tribunal du Malawi semble remettre en cause toute l’histoire politique du pays en déclarant que ni le président Mutharika ni la plupart de ses prédécesseurs qui n’ont pas obtenu depuis 1994, la majorité absolue des voix, n’ont été  « dûment élus » . La Cour constitutionnelle malawite voudrait se montrer indépendante qu’elle ne s’y prendrait pas autrement ; elle qui, neuf mois après le scrutin, a décidé de remettre les pendules à zéro. C’est tout à son honneur quand on sait que sous nos tropiques, les plus hautes juridictions passent pour être des caisses de résonance des régimes en place, tant et si bien qu’il ne vient à l’esprit d’aucun juge d’aller contre la volonté des princes régnants. Qu’elle décide donc de prendre à contrepied le président Mutharika qui croyait la tempête passée, est une preuve de courage de la part de la Cour constitutionnelle. Car, elle refuse d’être au service d’un homme, fût-il le chef de l’Etat, en disant le droit.

On peut regretter que la Cour constitutionnelle ait mis près d’un an, pour vider le contentieux électoral

 

En tout cas, cette décision de la Cour constitutionnelle rappelle ce qui s’est passé au Kenya et aux Comores où les « grands juges », tout en se mettant au -dessus de la mêlée, avaient créé la surprise en annulant des scrutins présidentiels et en ordonnant leur reprise dans le respect des délais constitutionnels. Cela, on s’en souvient, avait déchaîné les passions et fait des gorges chaudes mais les décisions de Justice sont ainsi faites qu’elles ne peuvent pas satisfaire tout le monde.  On comprend dès lors pourquoi le Malawi Congrès Party, arrivé en deuxième position lors de la présidentielle, s’est empressé de féliciter la Cour pour son «  jugement équitable » pendant que le camp présidentiel, lui, préfère se claquemurer dans un silence éloquent. Pourvu que triomphe la démocratie ! C’est tout le mal que l’on puisse souhaiter aux Malawites. Cela dit, s’il est vrai qu’il faut féliciter la Cour constitutionnelle pour avoir dit le droit, on peut tout de même regretter qu’elle ait mis autant de temps, soit près d’un an, pour vider un contentieux électoral que certains Malawites avaient vite fait d’oublier. N’y a-t-il pas lieu de faire en sorte que les recours soient examinés le plus tôt possible comme c’est le cas dans bien des pays où généralement tous les contentieux sont vidés dans un délai maximal d’un mois après le scrutin ? Ainsi, on évitera de remuer le couteau dans une plaie qui avait déjà commencé à se cicatriser.

 

Boundi OUOBA


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