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ARRESTATION D’OPPOSANTS EN COTE D’IVOIRE


Moins d’une semaine après l’élection présidentielle en Côte d’Ivoire à l’issue de laquelle Alassane Ouattara n’a laissé aucune chance à l’opposition avec un score à la Corée du Nord de 94% des suffrages exprimés, la coalition RHDP au pouvoir a décidé de frapper fort en procédant à l’arrestation, sur demande du parquet d’Abidjan, de plusieurs leaders politiques qui avaient appelé à des manifestations avant, pendant et après ce qu’ils ont qualifié de « parodie de scrutin » du 31 octobre dernier. Au nombre des personnes activement recherchées ou déjà appréhendées, il y a Albert Toikeusse Mabri, Maurice Kacou Guikahué et Pascal Affi Nguessan, le dernier ayant été mis aux arrêts à la hussarde, semble-t-il, alors qu’il tentait de rejoindre en fin de semaine dernière, son fief et épicentre de la contestation  contre la réélection de Alassane Ouattara, situé dans le Sud du pays. Des interpellations qui ont étonnamment épargné le chef des contestataires, Henri Konan Bédié pour ne pas le nommer, mais qui seraient, selon une source digne de confiance, un prélude à des arrestations massives suite aux mots d’ordre de « boycott actif » de  la présidentielle et de désobéissance civile, le tout couronné par la mise en place d’un fantoche Conseil national de la transition (CNT) présidé par Konan Bédié. Tout porte à croire que c’est le début de la fin d’un mouvement de révolte dont les instigateurs risquent de boire le calice jusqu’à la lie, faute de légalité et de légitimité de leur conseil. Pour autant, Alassane Ouattara doit savoir que dans un pays comme le sien, les exactions et les répressions sauvages contre les militants de l’opposition, peuvent contraindre ces derniers à un silence tombal pendant un bout de temps, mais les rancœurs ne tarderont pas à ressurgir et à rendre le climat sociopolitique à nouveau potentiellement explosif.

 

On espère que les trois têtes de gondole de la politique dans ce pays, auront à cœur de quitter dignement la scène dans les mois ou années à venir

 

Il est évident qu’en tant que garant de la sécurité intérieure du pays, le gouvernement ne pouvait  laisser les fauteurs de troubles instaurer la chienlit dans le but de le faire tomber ; mais de là à traquer systématiquement tous ceux qui répandent  leur bile sur les institutions et leurs serviteurs, il y a  comme une sorte de dérive totalitaire et de criminalisation de la contestation politique qui sont inacceptables de la part d’un régime qui se veut démocratique et populaire.   Le président Alassane Ouattara qui semble vouloir se ménager une porte de sortie honorable, devrait avoir l’œil sur ses lieutenants, car la tentation est grande, pour ces derniers, de siffler la fin de la récréation à coups de représailles et de violations des droits fondamentaux, après ces semaines de tensions extrêmes et de doute quant à la survie de leur régime. Rien ne dit d’ailleurs que la page de la controverse et de la contestation de sa réélection, est définitivement tournée, d’autant qu’il se murmure que des miliciens armés seraient toujours prêts à en découdre, notamment à l’Ouest et dans le Sud côtier, si l’ordre leur était donné par ceux pour qui ils disent vouloir se battre. Même du côté de l’opposition politique, on continue de souffler le chaud et le froid en tenant des discours tantôt enflammés tantôt pacifiques, preuve s’il en est que le « gnaga » comme on dit là-bas, est toujours d’actualité. Heureusement que les principaux chefs de l’opposition qui sont toujours en liberté en Côte d’Ivoire, semblent de plus en plus disposés à accepter le principe de négociation avec le pouvoir qu’ils abhorrent, certainement en raison des pressions multiformes, des querelles de personnes ou de leadership à l’intérieur même de ce bloc qui est loin d’être compact,  et surtout de la mobilisation plus que mitigée de leurs ouailles pour obtenir le changement. Si les autorités en place à Abidjan accueillent sans condescendance l’éventualité d’une négociation et évitent de verser dans la répression féroce de toute voix dissonante comme on le craint dans les rangs de l’opposition, alors, la Côte d’Ivoire pourrait éviter la meurtrière crise post-électorale que des oiseaux de mauvais augure avaient vite fait de lui prédire. On espère que les trois têtes de gondole de la politique dans ce pays que sont Henri Konan Bédié, Laurent Gbagbo et Alassane Ouattara lui-même auront à cœur de quitter dignement la scène dans les mois ou années à venir, sans verser encore une seule goutte de sang de leurs compatriotes à cause de leurs pulsions vengeresses ou mégalomaniaques.

 

Hamadou GADIAGA


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