BREXIT


Le  31 janvier 2020, le Royaume-Uni a rendu effective sa sortie de l’Union européenne (UE). Pour un évènement  historique, c’en est  un. Car, le Royaume-Uni  était membre de cette structure depuis le 1er janvier 1973.  Et ce n’était pas un membre qui comptait pour  du beurre puisqu’il est le troisième  plus gros contributeur derrière l’Allemagne et la France, au sein du Fonds européen du développement (FED). Le Brexit représente donc, pour l’UE, un coup dur mais c’est un acte de souveraineté et de courage  qu’il convient de  respecter. Pour autant, l’on peut se poser la question suivante : l’Afrique saura-t-elle en tirer le meilleur profit ? Il  faut d’abord rappeler que la Grande-Bretagne est le deuxième plus gros investisseur européen  sur le continent,  après la France. Il faut ajouter à cela qu’au sein  du Fonds européen de développement, principal instrument de l’aide au développement de l’EU en direction de l’Afrique, le Royaume-Uni est le troisième pays qui délie le plus les cordons de la bourse.

Le Royaume-Uni veut renouer avec tout le prestige qu’il avait sur le continent noir avant 1973

 

Malgré cet effort non négligeable, l’on pouvait avoir le sentiment que la France et l’Allemagne lui faisaient ombrage au point que sa visibilité  politique en Afrique en prenait un coup. En  choisissant donc de  rompre avec l’EU, tout porte à croire que le Royaume-Uni veut renouer avec tout le prestige qu’il avait sur le continent noir avant 1973, date à laquelle il a choisi d’adhérer à la communauté européenne. Et ce qui peut confirmer cette ambition de refondation de sa politique avec le continent noir, est lié à ceci. D’abord, les Britanniques  ont montré leur regain d’intérêt  pour l’Afrique, à la faveur de l’avènement  à la primature de Theresa May. Cette dernière, en effet, en 2018, à la tête  d’une délégation  composée  d’une trentaine de chefs d’entreprises, s’était rendue en Afrique du Sud, au Nigeria et au Kenya ; trois partenaires économiques de taille de la Grande-Bretagne  sur le continent noir. Ce voyage avait été décrypté, on s’en souvient, comme les premiers jalons de la coopération  post-Brexit entre le Royaume et l’Afrique. A cette occasion, la cheffe du gouvernement avait signé, avec six pays de l’Afrique australe, un accord commercial  destiné à  remplacer ceux en vigueur dans le cadre du Marché unique européen. Le deuxième acte majeur traduisant  le souci du gouvernement anglais de refonder ses relations avec l’Afrique, a été le sommet Royaume-Uni Afrique. L’enjeu était clair et le successeur de Theresa May,   Boris Johnson, grand artisan du Brexit,  l’a dit de manière reformulée et résumée comme suit : faire de son pays un investisseur de choix sur le continent à l’instar de la France, des Etats-Unis, de la Russie,  de  la Chine et  l’on en oublie. C’est dire si  le Royaume-Uni a jeté son dévolu sur l’Afrique. Et les énormes richesses du continent en sont la motivation principale. Là-dessus , aucun doute n’est permis. Il reste à l’Afrique de se comporter en adulte responsable,  si elle veut en tirer le meilleur profit.  De ce point de vue, l’on peut lui suggérer de cesser de croire que les autres vont lui offrir le développement sur un plateau d’or.

 

 Des pays comme l’Afrique du Sud, le Nigeria et le Kenya   peuvent tirer le meilleur profit du Brexit

 

En la matière, en effet, tous les grands partenaires qui sont en train de se disputer l’Afrique à coups de sommets ponctués, par moments, de promesses mirobolantes, savent qu’ils ne sont pas parvenus à leur niveau de développement grâce aux actions philanthropiques des autres. Un  pays comme la Chine a pu s’imposer au monde grâce au courage, à la créativité et au sens de la dignité de ses fils et filles. Ces qualités font cruellement défaut à bien des pays africains. Résultat : au lieu d’être source de développement pour ces derniers, les richesses naturelles dont ils disposent, sont plutôt source de misère. Aussi longtemps que l’Afrique basera son économie sur l’importation des produits finis fabriqués ailleurs, elle sera toujours le dernier de la classe en terme de développement. Des pays comme l’Afrique du Sud, le Nigeria et le Kenya qui sont déjà des partenaires majeurs du Royaume-Uni, peuvent tirer le meilleur profit du Brexit s’ils intègrent ces réalités dans leur quête de développement. D’ailleurs, l’on peut se demander si ces nombreux sommets où tout un continent est convié par un seul pays, aussi puissant soit-il, pour parler développement, sont pertinents pour l’Afrique.  L’occasion est belle pour parler de l’aide au développement. L’on peut, en effet, se poser la question de savoir si l’aide au développement ne conduit pas beaucoup plus l’Afrique au sous-développement permanent que vers le développement. En tout cas, elle demande à être repensée sérieusement. C’est à ce prix que le Brexit pourra représenter une chance pour l’Afrique.

 « Le Pays »

 


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