HomeA la uneINHUMATION DE BERNARD LEDEA OUEDRAOGO : Le « Loup blanc » conduit à sa dernière demeure à Gourcy  

INHUMATION DE BERNARD LEDEA OUEDRAOGO : Le « Loup blanc » conduit à sa dernière demeure à Gourcy  


 

Décédé le mercredi 25 octobre 2017 à Ouagadougou, Bernard Lédéa Ouédraogo a été conduit à sa dernière demeure à Gourcy, sa ville natale, le samedi 04 novembre dernier. C’était en présence de membres du gouvernement, d’autorités politiques et administratives venues des quatre coins du pays, de nombreux parents, amis et connaissances du défunt. Ce dernier a reçu les hommages dus à son rang et pour tout ce qu’il a fait de son vivant. Des témoignages riches d’enseignements ont également été au menu des différentes cérémonies ayant précédé son inhumation. 

« Monsieur Bernard Lédéa Ouédraogo, au nom du Président du Faso et en vertu des pouvoirs qui nous sont conférés, nous vous élevons à titre posthume à la dignité de Grand Officier de l’Ordre National ». C’est par cette formule consacrée que le Haut Représentant du Président du Faso, Cheriff Moumina Sy, a décerné au président fondateur de l’association internationale « Se Servir de la Saison Sèche en Savane et au Sahel » (Six S) et des Groupements Naam, l’une des distinctions honorifiques les plus élevées du Burkina Faso. S’en est suivi l’oraison funèbre lue par Stanislas Ado Tevi, l’un des fidèles compagnons du défunt.  Dans une voix pleine d’émotion, celui-ci a livré un témoignage très riche sur Bernard Lédéa Ouédraogo qui a mené une « vie utile pour tous ». C’est après la cérémonie aux morts exécutée par la fanfare de la Garde nationale et un piquet d’honneur du 12e Régiment d’intervention commando (RIC), que « BLO » a été conduit à sa dernière demeure à son domicile au quartier Sintané de Gourcy. Auparavant, le long cortège accompagnant la dépouille de BLO,  en provenance de Ouahigouya, a été accueilli à l’entrée de Gourcy par les autorités de la région du Nord, avec à leur tête le gouverneur Hassane Sawadogo. Puis, direction l’église Saint Joseph de Gourcy qui a refusé du monde. La dépouille de BLO, portée par des éléments de la police municipale, y a fait son entrée au son de la fanfare Sainte Rita de la paroisse Notre Dame des Apôtres de la Patte d’oie de Ouagadougou. En présence de membres du gouvernement dont le ministre d’Etat, ministre de la Sécurité, Simon Compaoré, d’autorités de la région du Nord et de nombreux parents, amis et connaissances, l’on a prié pour le repos de l’âme de l’illustre disparu. Antoine Raogo Sawadogo, au nom de la famille de BLO et Antoine Ouédraogo pour le compte de la communauté chrétienne de la paroisse Saint Joseph de Gourcy, ont traduit leur reconnaissance au Président du Faso, Roch Marc Christian Kaboré, et à tous ceux qui, d’une manière ou d’une autre, n’ont ménagé aucun effort pour tous les hommages à l’endroit de ce « monument du mouvement paysan ». C’est à pied que la dépouille a été conduite au quartier Sintané de Gourcy pour l’inhumation. L’autre fait non moins important a été la présence des parents à plaisanterie aux différentes cérémonies. A l’arrivée de la dépouille à Gourcy, il a fallu de fortes négociations pour lever la barrière érigée par les Gourmantché. Les Samo, eux, ont offert des arachides et des noix de cola au regretté. Dr Bernard Lédéa Ouédraogo laisse derrière lui une veuve, 8 enfants, 24 petits-fils et 18 arrières petits- fils.

P.B. Winninmi ILBOUDO (Correspondant)

ENCADRE : A propos de Bernard Lédéa Ouédraogo

Naaba Baongo, chef de Gourcy

“Par la disparition de Dr Bernard Lédéa Ouédraogo, le Burkina entier perd un de ses dignes et illustres fils. Feu Dr Bernard Lédéa Ouédraogo a mené une vie utile pour la majorité des Burkinabè. Il  fut un modèle, un repère dans tout ce qu’il a entrepris. Les « six S » et les Groupements Naam dont il est le fondateur, sont d’une grande originalité et ont une réputation internationale. Ce sont des organisations qui sont en phase avec le contexte socio-culturel de notre pays. Leur création révèle le génie et le talent de l’homme qui laisse en partage et en héritage, une méthode endogène qui permet aux paysans de lutter contre la pauvreté pour s’assurer une sécurité et une autosuffisance alimentaires. Cet héritage est immense et constitue un patrimoine qui mérite d’être apprécié dans toute sa dimension. « Se Servir de la Saison Sèche en Savane et au Sahel » ( Six S) est toute une philosophie en ce sens que l’on se base sur une contrainte majeure pour en faire une opportunité de développement.  Les œuvres de Feu  Bernard Lédéa Ouédraogo doivent être poursuivies et les générations futures ont le devoir de s’inspirer de l’exemple de cet homme qui a vécu pour les autres. Puisse le Tout-Puissant et les mânes de nos ancêtres l’accueillir dans le Royaume Eternel pour qu’il continue de veiller sur nous pour plus  de paix et de cohésion sociale, gages  d’un développement harmonieux.

Fatimata Ouédraogo, animatrice aux Groupements Naam : « Dr Bernard Lédéa Ouédraogo nous a laissé un lourd héritage. J’ai beaucoup appris avec lui »

« Ses actions en faveur des femmes de la région du Nord sont nombreuses et embrassent plusieurs domaines. Grâce à lui, les femmes arrivent à s’exprimer en public. La  Banque traditionnelle d’épargne et de crédits (BTEC) et la coopérative Viim baoré dont il est le créateur, permettent aux femmes d’avoir accès aux crédits pour développer des activités génératrices de revenus. Avec lui, nous avons lutté contre l’excision dans la partie Nord du Burkina et les résultats sont tangibles sur le terrain. La pomme de terre, jadis considérée comme un aliment de luxe, est bien prisée des Burkinabè maintenant. L’élevage qui était réservé aux hommes, est aujourd’hui une affaire de femmes aussi. Tout cela est dû en grande partie, aux efforts et sacrifices du fondateur des Six S et des groupements Naam qu’il est.  Par l’intermédiaire de Antoine Raogo Sawadogo qui a été secrétaire général et directeur de formation de la Fédération nationale des groupements, nous avons pu recueillir des témoignages de compagnons de  Bernard Lédéa Ouédraogo qui le peignent en six visages. Ce sont : ses sources d’inspiration d’où il a puisé sa philosophie « développer sans abîmer », son charisme et son ingénierie socio-politique, le métissage et le greffage, les Naam et autres (la sélection et la valorisation des bonnes pratiques de chaque communauté), les Six S, visionnaire pour l’efficacité de l’aide qui tue l’aide, le lutteur infatigable. Nous vous proposons quelques-uns de ces témoignages. »

Bernard Lecomte, cofondateur des Six S – France : « Lédéa est pour moi, le champion du combat pour la fameuse souveraineté alimentaire » 

« Fier et heureux d’avoir agi aux côtés de celui-là. Lédéa est pour moi, le champion du combat pour la fameuse souveraineté alimentaire. N’a-t-il pas, nouveau Parmentier, fait des frites, les vedettes des cuisines de Ouahigouya? N’a-t-il pas couvert « son Yatenga » de pieds de pomme de terre, fruits de l’effort et des savoirs des paysans et des paysannes et des coups de pouce salutaires offerts à leurs groupements »?

Loic Barbedette – France : « Bernard avait une étonnante capacité d’enthousiasme »

« Le départ de Bernard nous touche tous. J’ai connu Bernard Lédéa en 1974 au Cameroun, pour présenter l’expérience naissante des Naam. Il m’avait fortement impressionné par l’intelligence de ses intuitions. Je l’ai retrouvé quatre ans plus tard à Paris, dans un colloque sur la jeunesse où nous étions tous les deux intervenus. Je ne l’ai revu par la suite qu’en 1989, quand il m’a invité à Ouahigouya où il m’a demandé de devenir compagnon des Naam, ce que j’ai été pendant une douzaine d’années. Inutile de dire tout ce que j’ai appris à travers ce compagnonnage et la proximité de Bernard qui savait que j’avais pour lui un très grand respect et il acceptait de ce fait que je lui tienne un langage de vérité. J’ai eu des conversations extrêmement profondes avec lui, jusqu’à parler de sa propre mort. Bernard avait une étonnante capacité d’enthousiasme, ce qui en faisait un meneur d’hommes, un véritable leader »

Pierre Petitat

 « Aujourd’hui comme hier et comme demain, je garderai toujours de lui l’image et le souvenir d’un généreux visionnaire et d’un entrepreneur social qui incarnait des valeurs que nous avons partagées. Je ne pourrai jamais oublier les moments parfois épiques que nous avons vécus en accompagnement et en appui aux initiatives des groupements et unions Naam. Je lui en rends hommage. Je fais vœu pour que se poursuive et se développe la philosophie de Bernard du « développer sans abîmer »’’.

Bernard Niouga – Cameroun : « Ce départ n’est rien d’autre que le repos d’un bon guerrier »

«  La perte d’un ami, d’un tuteur, d’une référence, d’un homme avec grand H. Ce départ n’est rien d’autre que le repos d’un bon guerrier. Le corps-à-corps avec un lion égale la lutte contre la faim, la désertification, le développement ».

Propos recueillis par P.B. Winninmi ILBOUDO (Correspondant)


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