PRATIQUE DE L’EXCISION AU BURKINA : Siffler la fin de la récréation !
La semaine dernière, je suis tombé des nues lorsqu’en parcourant les colonnes d’un journal de la place, j’appris que trois fillettes ont été excisées au quartier Wayalghin de Ouagadougou. J’étais encore plus scandalisé de savoir que pendant que la gendarmerie échangeait avec les hommes de médias, sept autres filles en partance pour Zorgho pour être aussi excisées, ont été interceptées. Elles étaient accompagnées d’une exciseuse prête à couper ce que vous savez. C’est à croire que certains Burkinabè ont l’oreille dure. Car, j’ai du mal à comprendre qu’en dépit des sensibilisations menées ça et là, il y ait toujours des gens qui continuent d’exciser leurs enfants, au nom de je ne sais quelles valeurs. Ce qui m’a le plus marqué, c’est que cette fois-ci, les faits se sont même déroulés à Ouagadougou, la capitale que l’on estime souvent, à tort ou à raison, être le lieu où les gens ont un certain niveau de compréhension des choses. Hélas, tel n’est pas le cas. Et ce qui vient de se passer en est une preuve pour ceux qui en doutaient encore. Tant que c’était dans les villages les plus reculés du pays, on avait beau jeu de dire que c’est parce que ces populations rurales n’ont pas accès à l’information comme les citadins. Ce qui n’est pas faux. Car, je connais des villages de ce pays-là, où il est difficile d’avoir accès à la radio et à la télévision nationales ; si fait que les habitants finissent par prendre souvent leurs ombres pour des réalités. C’est bien triste de le dire, mais c’est le constat qui se dégage lorsque l’on arrive dans certaines zones où l’autorité brille par son absence. Convenez avec moi que souvent, c’est ceci qui finit par expliquer cela. Nul n’est censé ignorer la loi, dit-on, mais encore faut-il que le citoyen ait conscience de l’existence d’une loi pour finalement l’adapter à ses habitudes, mœurs ou usages. Sur ce plan, je pense qu’avant d’arriver à la tolérance zéro que la Première dame appelle de tous ses vœux, il va falloir que l’autorité s’assume pleinement, en faisant en sorte qu’il n’y ait plus de Burkinabè de première classe et d’autres de seconde zone ; je veux parler de ceux-là qui, abandonnés à eux-mêmes, vivent à l’état de nature dans leurs bleds respectifs.
Je suis fou, mais je respecte les lois de la République
Cela dit, je ne suis pas contre la répression, mais je veux qu’elle soit aussi dirigée contre ces fonctionnaires qui, pendant les vacances, envoient clandestinement leurs enfants au village pour les faire exciser. D’aucuns pensent que je suis en train de radoter. Or, je suis non seulement conscient, mais je sais aussi de quoi je parle. Peut-être beaucoup se reconnaîtront-ils à travers mes propos. C’est tant mieux ! Qu’ils profitent de l’occasion pour se moucher jusqu’à ce que j’entende. En tout cas, en attendant les résultats de l’enquête ouverte sur les sept fillettes interceptées en partance pour Zorgho, je me laisse convaincre que les parents de certaines d’entre elles pourraient être des cadres de ce pays qui, c’est une banalité de le dire, savent bien que la pratique de l’excision est interdite au Burkina Faso. Oh, bonnes gens, où allons-nous, si ceux-là qui sont censés donner le bon exemple, s’érigent en fossoyeurs de la loi ? Il faut que l’on change nos habitudes, si l’on veut rester en phase avec les lois que nous nous sommes fixées. Nous avons dit que l’excision est proscrite dans notre pays. Il n’y a donc plus de raison que l’on passe encore par des moyens détournés pour la pratiquer, au risque de tomber sous le coup de la loi. C’est le lieu d’en appeler à la responsabilité aussi des leaders religieux qui doivent jouer un rôle important dans la lutte contre le phénomène. C’est à ce prix que l’on pourra gagner ce combat de longue haleine. Même moi fou, j’ai réuni mes collègues le week-end dernier pour qu’ensemble, l’on dégage un plan d’actions devant nous permettre de nous impliquer pleinement dans la lutte contre l’excision. Que croyez-vous ? Je suis fou, mais je respecte les lois de la République. Et tout le monde doit en faire autant.
« Le Fou »