HomeA la unePUBLICATION D’UN OUVRAGE EXPLOSIF SUR TRUMP : Acte suicidaire, vu d’Afrique

PUBLICATION D’UN OUVRAGE EXPLOSIF SUR TRUMP : Acte suicidaire, vu d’Afrique


L’Amérique a eu tort d’avoir permis à « un crétin » qui ne peut pas se concentrer plus de quelques minutes sur un sujet et qui accorde une confiance démesurée à son instinct, d’accéder à la présidence. Voici brièvement la substance du livre du journaliste américain, Michaël Wolff, sur Donald Trump. Ce brûlot, et c’est le moins que l’on puisse dire, est intitulé « Le feu et la fureur ». Sa parution, annoncée pour ce 9 janvier, est attendue par toute l’Amérique et au delà du pays de l’Oncle Sam, par la planète entière. Et pour cause. Le personnage qui est y mis  en cause est la personne qui dirige actuellement la Nation la plus puissante et la plus riche du monde. Déjà, de larges extraits de l’ouvrage, tous aussi croustillants les uns que les autres, ont été publiés dans la presse. Et les Américains se les arrachent comme de petits pains. Dès lors, l’on comprend pourquoi le successeur de Barak Obama, c’est-à-dire Donald Trump, fait des pieds et des mains pour empêcher la parution du livre où il est décrit comme un « crétin » par ses proches, et où son ancien conseiller, Steve Bannon, accuse son fils de trahison au sujet de sa rencontre avec des Russes en juin 2016.

Dans bien des pays d’Afrique, les présidents en exercice ne sont pas considérés comme de simples mortels

Ce brûlot à l’égard du premier des Américains, est la preuve que le premier amendement de la Constitution de l’Oncle Sam, qui consacre le caractère sacré de la liberté d’expression, n’est pas un vain mot. Et tout président qu’il soit, le milliardaire Donald Trump vient de l’apprendre à ses dépens. Et le fait même que ce dernier soit en train de se démener comme un beau diable pour censurer l’ouvrage, sonne comme une publicité à moindre frais pour son auteur. La preuve, c’est que les commandes de l’ouvrage ont déjà explosé avant même sa parution officielle. Sacrée Amérique, peut-on s’exclamer ! Car elle est coutumière du fait qu’elle n’hésite pas à mettre les affaires louches du prince régnant sur la place publique. Et c’est là où se trouve une des grandes différences de ce pays avec l’Afrique. En effet, dans bien des pays de ce continent, les présidents en exercice ne sont pas considérés comme de simples mortels. Ils sont déifiés au point que la moindre critique à leur égard est perçue comme une  offense à Zeus, du nom du Dieu du ciel et maître des dieux dans la mythologie grecque. Et une telle offense, sous nos cieux, est punie comme telle. Les auteurs de ce genre d’offenses en savent quelque chose. Ceux qui sont les plus chanceux, risquent la prison pour une durée qui varie selon l’humeur des sécurocrates du palais. Quant aux moins chanceux, c’est tout simplement la mort qui les attend. Sous nos tropiques donc, il est suicidaire de critiquer un président en exercice, comme vient de le faire le journaliste américain, Michaël Wolff. Certes, des pays africains existent où l’on peut se prêter à l’exercice sans laisser des plumes, mais ils sont tellement rares que l’on peut les compter sur les  doigts d’une main. Pour ne pas créer la polémique, l’on se gardera ici de les citer. Toujours est-il que l’arbre ne doit pas cacher la forêt. Dans l’écrasante majorité des pays d’Afrique, en effet, critiquer un président alors qu’il est aux affaires est synonyme de prendre rendez-vous avec les déboires, voire avec la mort. Avant même que le président mis en cause ne se mette dans tous ses états, ce sont ses sécurocrates, ses Raspoutine et autres partisans zélés qui vont se charger de la sale besogne.

La bataille pour la liberté d’expression se présente comme un prérequis

A ce propos, l’on se souvient encore de ces simples graffitis gravés sur les murs d’un établissement scolaire, et brocardant les abus de Pierre Nkrurunziza,  qui avaient produit l’effet d’une bombe. Car le dieu vivant du Burundi les avait perçus comme un péché de lèse-majesté. Et des exemples de ce genre où la liberté d’expression a été mise à rude épreuve, sont légion en Afrique. En la matière, le pays qui pourrait mériter le bonnet d’âne est le Cameroun. Dans ce pays, en effet, le simple fait d’écrire que le président a des ennuis de santé, se paie cher. Le fait d’écrire aussi que le Cameroun a besoin de souffler démocratiquement par alternance, se paie encore plus cher. Le Cameroun et le Burundi ne sont pas les seuls à malmener la liberté d’expression sous nos tropiques. Pourtant, cette liberté-là est la mère, peut-on dire, de toutes les libertés. Et les femmes et les hommes qui en sont les chantres, loin d’être des « jardiniers du terrorisme » pour emprunter l’expression du président turc, sont en réalité les jardiniers de la démocratie. Et si aujourd’hui, l’Afrique enregistre dans bien des pays  des démocraties rabougries et simulées, c’est parce que quelque part, dans ces pays-là, l’effectivité de la liberté d’expression est la chose la moins partagée. Pour arrimer véritablement l’Afrique à la démocratie et cela dans la durée, la bataille pour la liberté d’expression se présente comme un prérequis. C’est pour cette raison d’ailleurs qu’en Occident, l’on ne peut marchander la liberté d’expression. Hier encore, soit trois ans jour pour jour après le massacre terroriste dont Charlie Hebdo a été l’objet, un hommage solennel a été rendu à ce Journal, symbole justement de la liberté d’expression. Et les Occidentaux qui ont tellement souffert pour se l’arracher, savent mieux que quiconque qu’elle est à l’origine de tous les espaces de liberté qu’ils ont conquis. Vivement donc que les Africains se départissent de toutes les peurs et de tous les dangers qui y sont liés dans leurs pays respectifs, pour se battre pour sa promotion. Si aujourd’hui, aux Etats-Unis, le journaliste Michaël Wolff se permet de mettre les pieds dans le plat  sans craindre pour autant pour sa vie, il le doit au caractère sacré de la liberté d’expression. Et cette valeur cardinale de la démocratie n’a pas été gracieusement offerte aux Américains. Elle a été conquise de haute lutte.

« Le Pays »


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