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RECONQUETE DE SYRTE : On ne vend pas la peau d’un djihadiste avant de l’avoir abattu


 

Trente-quatre morts et 100 blessés. C’est le triste bilan enregistré par les forces pro-gouvernementales libyennes qui combattent les djihadistes du groupe Etat islamique (EI) dans leur base à Syrte. La progression fulgurante de ces forces fidèles au Gouvernement libyen d’union nationale (GNA) et la prise d’une bonne partie du patelin de Mouammar Kadhafi, avaient laissé croire à une victoire éclair sur les troupes de l’organisation terroriste. Mais, avec ce massacre dont ont été victimes les pro-GNA, il faut désormais croire que ceux qui sont rentrés à Syrte, la fleur au bout des kalachnikovs et des chars de combat, doivent revoir leur stratégie de combat. Car, de Kaboul à Bagdad en passant par Damas et Falloudja, la seule leçon qui vaille la peine d’être tirée, est qu’il ne faut jamais vendre la peau d’un djihadiste avant de l’avoir abattu. Du moins, il ne faut jamais sous-estimer l’ennemi, surtout quand il est terroriste. Les groupes terroristes ont toujours utilisé comme dernier recours la guérilla urbaine faite d’embuscades, d’attentats ciblés ou de tirs de snipers. Résultats : ceux de Syrte arrivent à transformer les centres urbains en cimetières pour ceux qui les combattent, et ce d’autant plus que les forces loyalistes se doivent de protéger une population civile infiltrée par des combattants djihadistes qui l’utilisent comme bouclier humain. Autrement dit, si les forces pro-GNA n’y prennent garde, la zone résidentielle de 5 km2 dans laquelle les terroristes ont été pris au piège, pourrait être une nécropole à ciel ouvert. Effectivement, les conditions objectives d’une telle perspective sont presque réunies. Faut-il encore le répéter, l’Etat-major de l’EI  est en grande partie constitué d’officiers de l’armée de Saddam Hussein défaite par l’armée américaine et ses alliés. En Libye, ils s’appuient sur des hommes et des soldats sortis de la curie de l’ancien Guide libyen. Cette jonction des capacités en termes de savoir-faire militaire fait forcément trembler toute l’armée libyenne.

Lorsque la patrie est attaquée, les antagonismes de l’intérieur doivent être mis entre parenthèses

Parce qu’en fait, ces gens-là sont rompus à l’art de la guerre et n’ont rien à envier à l’armée « éclatée » de la Libye. Sous cet angle, la déculottée du gouvernement qui n’a pas su fédérer les Libyens en vue de bouter les terroristes hors du pays, était inévitable. L’histoire des guerres est formelle. Lorsque la patrie est attaquée par un ennemi extérieur, les antagonismes les plus irréductibles de l’intérieur doivent être mis entre parenthèses aux fins de défendre le bien commun. Dans le cas libyen, on note plutôt un certain cafouillage. Les forces impliquées dans l’offensive contre l’EI ne sont pas unies sous une structure de commandement unifié et ne partagent pas la même vision pour la Libye de l’après-EI. Le camp du général controversé Khalifa Haftar considère, par exemple, illégitimes les forces du GNA et le GNA lui-même. Ces forces hétéroclites aux intérêts aussi épars, ajoutées à la légitimité partielle du gouvernement d’union nationale, sont autant de facteurs qui pourraient profiter aux terroristes de Daech qui sont parfaitement renseignés sur la situation. L’un dans l’autre, les soldats de l’EI, nourris à la sève du fanatisme et de l’idée de mourir en martyr, vont vendre chèrement leur peau dans cette partie de Syrte qui leur reste de territoire. Pour pouvoir les vaincre, il faut certes le concours de plusieurs paramètres, mais surtout un engagement mental supérieur à celui des djihadistes.

Michel NANA


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