HomeA la uneRENCONTRE DE BERLIN SUR LA LIBYE:Une conférence qui en rappelle une autre

RENCONTRE DE BERLIN SUR LA LIBYE:Une conférence qui en rappelle une autre


Le 19 janvier, s’est ouverte à Berlin, capitale de l’Allemagne, la conférence sur la paix en Libye. Organisée à l’initiative du pays d’Angela Merkel et placée sous l’égide de l’ONU, la rencontre poursuit les objectifs suivants : premièrement, il s’agit de consolider le cessez-le-feu en vigueur depuis le 12 janvier dernier en Libye. Deuxièmement, l’ONU ambitionne de mettre fin aux ingérences étrangères. Le dernier objectif, dont la réalisation dépend d’ailleurs fortement des  deux premiers, est d’envisager in fine une solution politique à la crise. L’on peut d’abord rendre hommage à l’Allemagne pour s’être beaucoup investie pour la tenue effective de ce sommet sur son sol. Pour une victoire diplomatique, c’en est vraiment une. Car, au départ, ils étaient nombreux, ceux qui doutaient des chances réelles d’Angela Merkel de tenir la conférence. L’on peut aussi se réjouir que l’ONU ait pris à bras-le-corps la résolution de la crise libyenne au point de lui consacrer une conférence.

On peut  se féliciter que l’Afrique soit associée à cette rencontre

 

Et cette caution était nécessaire pour faire triompher l’approche multilatéraliste du règlement de la crise. En tout cas, l’ONU peut déjà se frotter les mains parce que tous les grands acteurs internationaux de la crise, étaient présents à Berlin, même si l’on peut relever  et regretter l’absence de pays comme le Maroc et la Tunisie.

L’on peut, enfin, se féliciter que l’Afrique, via le président congolais, Denis Sassou NGuesso, et le président de la Commission de l’Union africaine (UA), Moussa Faki Mahamat, soit associée à cette rencontre, car la Libye est avant tout un pays du continent noir.   Cela dit, l’on peut se poser la question de savoir si le chemin de la paix en Libye, passera par Berlin. A cette question, l’on peut être tenté de répondre par la négative. Et pour cause. D’abord,  au plan domestique, tous les acteurs de la crise sont, peut-on dire, des va-t-en-guerre. De ce fait, ils croient beaucoup plus à la solution militaire qu’à la solution politique. C’est cette posture qui a conduit les deux camps rivaux, à quelques heures de la rencontre de Berlin, à se livrer à une course contre la montre pour modifier les rapports de forces en leur avantage. Ainsi, 3 660 mercenaires syriens sont déjà dans le pays pour soutenir Fayez el-Sarraj, le chef du gouvernement basé à Tripoli.

A cela, il faut ajouter que des munitions et des véhicules blindés turcs ont été livrés   le week-end dernier. Dans cette dynamique de démonstration de forces, les Turcs ont également procédé, peu avant la tenue de la conférence, à l’installation d’armements impressionnants de défense anti-aérienne à l’aéroport de Matiga à Tripoli. De son côté, le camp de l’homme fort de l’Est, c’est-à-dire celui de Khalifa Haftar, refuse de faire reculer ses troupes installées aux portes de Tripoli. Et ce n’est pas tout. En effet, les forces fidèles au Maréchal viennent d’occuper des terminaux pétroliers dans l’Est du pays. De part et d’autre donc, l’heure n’est pas à l’apaisement. Loin s’en faut. Elle est plutôt aux bruits de bottes. La deuxième raison qui invite à ne pas croire en la conférence de Berlin, est que la Turquie et la Russie jouent un double jeu   en Libye.

La conférence de Berlin sur la Libye, rappelle la conférence de Berlin sur le partage de l’Afrique en 1885

Ces pays, en effet, soutiennent militairement respectivement Fayez-el-Sarraj et Khalifa Haftar. Dans le même temps, ils affichent des dehors de pacifistes lors des rencontres internationales sur la crise dans ce pays. En réalité, il s’agit de deux larrons qui se sont entendus en aparté pour tirer le plus grand profit de la crise libyenne. Et plus cette dernière durera, plus ces deux larrons beurreront leurs épinards. La dernière raison qui conduit à ne pas trop compter sur la conférence de Berlin pour résoudre la crise libyenne, est que tous les grands acteurs internationaux de la crise libyenne sont de grands comédiens. En réalité, le bal des hypocrites se poursuit à Berlin. Prétextant œuvrer pour la paix en Libye, ces grands acteurs internationaux se sont retrouvés à Berlin autour de la dépouille de la riche Libye. C’est pourquoi l’on peut oser la comparaison suivante : la conférence de Berlin sur la Libye, rappelle la conférence de Berlin sur le partage de l’Afrique en 1885.

En effet, pour le petit cours d’histoire, l’on peut rappeler que c’est à cette tribune que les pays occidentaux s’étaient entendus pour se partager la dépouille de l’Afrique. L’on se rappelle également que c’est l’Allemagne de Bismarck, qui avait suscité la conférence de Berlin de 1885. Aujourd’hui, c’est l’Allemagne d’Angela Merkel qui a eu l’initiative de la conférence de Berlin sur la Libye. Autant de similitudes qui peuvent justifier la comparaison entre les deux conférences de Berlin. Pour tout dire, les énormes richesses de la Libye valent bien une conférence non pas pour véritablement pacifier le pays, mais pour y entretenir pendant longtemps encore le chaos pour mieux sucer le pays. D’ailleurs, c’est beaucoup plus cette motivation qui avait poussé les pays occidentaux à s’offrir le scalp de Kadhafi que leur volonté d’arrimer la Libye à la démocratie. Et ceux qui récoltent les conséquences de cet acte sont non seulement le peuple libyen, mais aussi les populations du Sahel africain. En tout cas, du côté de Ouagadougou, de Bamako et de Niamey, on est convaincu qu’une grande partie de la solution à leur problème est tributaire de la résolution de la crise libyenne. Dans ces capitales également, l’on sait que la présence de l’Afrique à cette rencontre va compter pour du beurre dans la résolution de la crise libyenne.

 

« Le Pays »


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