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SOMMET CONJOINT G5 SAHEL-CEDEAO


Les 13 et 14 septembre 2019, la capitale du Burkina abrite un sommet extraordinaire de la conférence des chefs d’Etat et de gouvernement de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), conjointement avec un sommet de concertation des chefs d’Etat du G5 Sahel dont le président burkinabè, Roch Marc Christian Kaboré, assure en ce moment la présidence tournante. Le thème central de cette rencontre au sommet de la quinzaine de chefs d’Etat de la sous-région, reste la question de la lutte contre le terrorisme qui ne pouvait pas mieux tomber. Surtout pour le pays hôte qui sort d’une quinzaine noire qui a vu successivement plus d’une vingtaine de soldats tomber au front dans l’attaque, par les forces du mal,  d’un camp militaire dans le Nord du pays et une trentaine de civils perdre la vie dans une double attaque de ces mêmes individus sans foi ni loi avant qu’une demi-douzaine de gendarmes ne périssent dans une embuscade meurtrière 24 heures plus tard.

Cette façon, pour les terroristes, de marquer le Burkina au fer rouge est un signal suffisamment fort pour les conférenciers de Ouagadougou

 

De quoi donner le tournis aux Forces de défense et de sécurité (FDS) qui sont déjà sur la brèche, et semer davantage la psychose au sein des populations qui vivent avec la peur au ventre et qui ne savent plus à quel saint se vouer. C’est dire toute l’importance de ce sommet conjoint qui traduit non seulement la préoccupation des dirigeants de la sous-région, mais qui se veut aussi un signal fort de cohésion dans la lutte contre le terrorisme. En effet, non seulement cette réunion apparaît comme la matérialisation d’une prise de conscience élevée de la part des dirigeants de la sous-région, mais aussi et surtout elle traduit la nécessité, au-delà des simples discours, de mutualiser les forces pour agir en synergie   contre la pieuvre qui profite de la porosité des frontières mais aussi du manque de concertation et de la faiblesse du renseignement entre nos Etats, pour étendre ses tentacules et répandre son venin. En tout cas, cette façon, pour les terroristes, de marquer le Burkina au fer rouge par l’intensité des attaques sanglantes à l’approche de ce sommet annoncé de longue date, est un signal suffisamment fort pour les conférenciers de Ouagadougou qui, en venant dans la capitale du pays des Hommes intègres,  ont certainement conscience de la gravité de  l’heure et de la nécessité d’aller impérativement à une action commune d’urgence. Ce, d’autant plus que non seulement le péril est très pesant sur des pays comme le Burkina Faso, le Mali et le Niger qui sont depuis plusieurs années maintenant dans l’œil du cyclone des djihadistes, mais aussi la menace se précise pour les pays du littoral jusque-là épargnés par les frappes de la nébuleuse. C’est pourquoi il est de bon ton que la CEDEAO s’investisse dans ce combat contre le terrorisme qui est en passe d’anéantir les efforts de développement de bien des pays de la sous-région. D’autant plus que de par le passé, l’institution sous-régionale a su faire la preuve de son sérieux, de sa crédibilité et de son efficacité sur bien des théâtres d’opérations comme au Liberia ou même plus récemment en Gambie, même si, pour le cas présent, ce n’est pas sur ce terrain-là qu’elle est attendue, c’est-à-dire la guerre asymétrique.  Néanmoins, il faut espérer qu’elle saura s’adapter au défi du terrorisme pour trouver une stratégie innovante de lutte contre ce phénomène.

On espère qu’au sortir de ce sommet, les lignes bougeront véritablement dans le sens de redonner le sommeil paisible aux populations meurtries du Sahel

 

 

Cela dit, si l’élargissement de la lutte aux pays de l’espace communautaire dans le but d’apporter une réponse conséquente à la question du terrorisme au Sahel, s’annonce comme une avancée, c’est surtout son efficacité sur le terrain qui est attendue par les populations. Seuls donc compteront les résultats. Surtout après l’expérience mitigée de la force du G5 Sahel qui avait fait naître l’espoir, mais qui s’est finalement révélée comme un albatros incapable de prendre son envol. C’est pourquoi au-delà des discours, ce sommet conjoint CEDEAO-G5 Sahel  doit prouver qu’il n’est pas un sommet de plus. Autrement, on se sera livré à un préjudiciable effet d’annonce qui pourrait davantage exposer les populations à la furie meurtrière des terroristes qui pourraient multiplier les actes de bravade.  En tout état de cause, en prenant les conférenciers aux mots, on se réjouit déjà d’apprendre que ce sommet « marquera un tournant décisif » dans la lutte contre le terrorisme. On se réjouit aussi de savoir qu’avant la rencontre au sommet des chefs d’Etat, les ministres de la Sécurité des pays du G5 Sahel se sont aussi réunis pour évoquer la question. Ce qui est une première dont on espère que les fruits tiendront la promesse des fleurs. L’un dans l’autre, on espère qu’au sortir de ce sommet, les lignes bougeront véritablement dans le sens de redonner le sommeil paisible aux populations meurtries du Sahel.  On espère seulement que cette rencontre annoncée à grands renforts de tapage médiatique, n’accouchera pas d’une souris, encore moins de belles résolutions qui iront dormir dans le fond des tiroirs. Car, c’est le sort de toute la sous-région ouest-africaine qui est en jeu. Et il est temps de faire mentir le dicton selon lequel les actions les plus efficaces se passent dans la discrétion, et qui nourrit dans le présent cas le scepticisme de bien des citoyens. C’est pourquoi la CEDEAO doit travailler à lever les doutes des populations. Car, l’initiative est non seulement louable, mais elle est aussi à encourager parce qu’il est temps que les Africains pensent à prendre véritablement leur destin en main, plutôt que de toujours fonder leurs espoirs sur les autres. Comparaison n’est pas raison, mais au regard des moyens logistiques et humains  déployés au Mali pour les résultats que l’on sait, il y a lieu de se demander si c’est la stratégie qui n’est pas adaptée ou s’il n’y a pas quelque part un manque de sincérité dans la lutte contre le terrorisme. La CEDEAO doit donc éviter de tomber dans les mêmes erreurs. Car, on n’est jamais mieux défendu que par soi-même.

 

« Le Pays »

 


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