HomeA la une60ème ANNIVERSAIRE DE L’INDEPENDANCE DU GABON

60ème ANNIVERSAIRE DE L’INDEPENDANCE DU GABON


Le 17 août 2020, le Gabon célébrait le 60ème  anniversaire de son indépendance. Pandémie du Covid-19 oblige, la commémoration de ce soixantenaire de l’accession à la souveraineté nationale et internationale du pays des Bongo, s’est résumée en une symbolique prise d’armes au sein du palais présidentiel, en plus du discours à la Nation, du chef de l’Etat. Mais un demi-siècle et dix ans plus tard, que retenir comme bilan de cette indépendance acquise dans le sillage des seize autres nations d’Afrique francophone qui y ont accédé en 1960 ? Bien peu de mesures et de réalisations en faveur du bien-être des populations dont la majorité continue de tirer le diable par la queue et de croupir dans la misère, au regard de l’immensité des richesses du pays, qui vont largement au-delà de la manne pétrolière et des ressources forestières dont il regorge abondamment. Dans le même temps, l’on observe que depuis la mort du premier président, Léon Mba, en 1967 en plein exercice du pouvoir, l’alternance a d’abord été piégée puis ensuite ligotée par une seule famille, la famille Bongo qui totalise, à elle seule, plus de 50 ans de règne, et dont le nom se confond avec celui du pays et sonne aujourd’hui plus que jamais comme l’incarnation du pouvoir au Gabon.

 

Libreville donne l’impression de peiner à couper le cordon ombilical avec Paris

Alternance piégée d’abord par l’instauration du parti unique par Bongo père, ligotée ensuite par la perpétuation de la dynastie Bongo au pouvoir, malgré l’ouverture au multipartisme dans les années 90. Tout cela, sous l’œil bienveillant voire protecteur de la France dont le Gabon reste l’un des piliers dans une Afrique à la recherche de ses repères et où les réminiscences de la colonisation restent encore un bien lourd fardeau. Aujourd’hui encore, Libreville donne l’impression de peiner à couper le cordon ombilical avec Paris. Cela n’est guère étonnant, quand on sait l’implication de la France aux côtés du pouvoir de Libreville au point de faire du Gabon,  l’un des symboles forts et un élève modèle de la « Françafrique » à travers laquelle la France a su garder la mainmise sur nos Etats. Au Gabon, ce système résiste au temps depuis plus de cinquante ans, depuis Bongo père jusqu’à Bongo fils qui, même frappé, en 2018, d’un méchant AVC (accident vasculaire cérébral) qui a failli l’emporter et fortement affaibli par la maladie, continue de tenir fermement les rênes du pays.  Principalement pour les intérêts de la famille, du clan et de l’ancienne métropole dont le soutien ne lui a jamais fait défaut. Une France qui a toujours fermé les yeux sur les entraves démocratiques des dirigeants. Pendant ce temps, le peuple gabonais continue de manquer de tout ou presque et parfois du minimum vital, en termes d’infrastructures éducatives et sanitaires.  L’élite dirigeante, quant à elle, semble n’avoir pour seule alternative que l’appartenance au parti présidentiel, pour espérer se faire ou se refaire une place au soleil.  Les rares opposants étant bien souvent des transfuges de ce parti, poussés à la sortie par des frustrations diverses. Dans ces conditions, difficile de trouver des hommes nouveaux ; tant la plupart des acteurs majeurs de la classe politique, apparaissent comme les caïmans d’un même marigot.

 

Il n’y a pas de quoi se réjouir du sort du peuple gabonais

 

C’est dire si aussi nécessaire que puisse paraître aujourd’hui l’émergence d’une nouvelle classe politique au Gabon, cela paraît difficile. En effet, où trouver l’oiseau rare qui ne se soit abreuvé à la source des Bongo et qui ait assez de coffre et de charisme pour prétendre disputer à la famille présidentielle, la légitimité populaire ? Question à un sou.  Pourtant, contrairement  à certains pays africains moins gâtés par la nature, le Gabon avait tout pour réussir. Mais soixante ans après l’indépendance, force est de constater que le pays peine toujours à trouver ses marques si fait que l’on se demande parfois s’il n’a pas bradé ses richesses. Sur le plan social, la misère est devenue le lot quotidien d’une masse importante de la populations qui subit la dure loi du chômage, sans véritables perspectives d’avenir. Sur le plan politique, l’opposition est réduite à sa plus simple expression quand elle ne donne pas le sentiment de n’exister que de nom, sans véritable chance de réaliser l’alternance par les urnes. Quant à la démocratie, c’est peu de dire qu’elle est purement et simplement confisquée. On en veut pour preuve le « hold-up électoral »  dont se dit victime l’opposant Jean Ping qui continue de revendiquer la victoire à la présidentielle d’août 2016. Pendant ce temps, le décollage économique qui reste toujours un objectif, n’est pas loin de se transformer en un vœu pieux. C’est dire si 60 ans après son indépendance, il n’y a pas de quoi se réjouir du sort du peuple gabonais, tant le tableau du développement du pays est loin d’être idyllique. En somme, c’est un bilan plus figue que raisin qui se présente aujourd’hui au peuple gabonais. C’est pourquoi, à l’instar d’autres pays africains, l’on peut comprendre la déception et l’amertume des populations, après la désillusion qui a suivi les indépendances censées sonner le glas de leurs souffrances. Et dans le cas du Gabon, tout porte à croire que, moins que la rareté ou la floraison des ressources du pays, c’est le système politique en place qui est le plus grand frein à l’épanouissement des populations. Malheureusement, demain ne semble pas la veille de la fin de la dynastie Bongo.

 

« Le Pays »

 

 

 

 

 


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