HomeA la une61ème ANNIVERSAIRE DE L’INDEPENDANCE DE LA GUINEE-CONAKRY

61ème ANNIVERSAIRE DE L’INDEPENDANCE DE LA GUINEE-CONAKRY


Hier 2 octobre, la Guinée Conakry a commémoré son accession à la souveraineté internationale. Annexée par la France et intégrée à l’Afrique Occidentale Française (AOF) depuis 1904, la Guinée, sous la houlette du Parti Démocratique de Guinée (PDG) et de son emblématique et charismatique leader Sékou Ahmed Touré, rejette, lors du référendum du 28 septembre 1958, par son « non » historique, le projet de Constitution du Général Charles De Gaulle pour l’établissement d’une Communauté franco-africaine et proclame dès le 2 octobre 1958, son indépendance. Les prémices de cet acte de défiance de la métropole qui n’a plus fait mystère, depuis lors, de son hostilité vis-à-vis de la Guinée, étaient déjà bien visibles dans le discours prononcé le 25 octobre 1958 par Ahmed Sékou Touré devant le Chef de l’Etat français en visite à Conakry dans le cadre d’une tournée dans les Territoires d’Outre-mer et dont l’esprit est résumé dans la phrase désormais historique « il n’y a pas de dignité sans liberté : nous préférons la liberté dans la pauvreté à la richesse dans l’esclavage ».

La flamme n’aura eu que la durée d’un feu de paille

En refusant d’adhérer à la Communauté franco-africaine pour prendre immédiatement son indépendance, la Guinée entrait dans l’histoire en ouvrant, le premier, le bal des indépendances en Afrique noire française. Ce pas historique avait suscité beaucoup d’espoirs pour les élites intellectuelles et politiques africaines progressistes dont certains illustres membres, comme l’historien burkinabè Joseph Ki-Zerbo et son épouse Françoise, avaient décidé de voler au secours de la Guinée pour pallier le vide laissé par le départ précipité de l’Administration coloniale. Mais qu’est devenue la flamme de l’espoir allumée par la Guinée, le 2 octobre 1958 ? Il faut le dire, la flamme n’aura eu que la durée d’un feu de paille, comme si la réplique de Charles De Gaulle au discours de Sékou Touré avait eu valeur de malédiction. « Vous voulez l’indépendance ? Eh bien, prenez-la avec toutes ses conséquences », avait-il lancé. En effet, au plan politique, la dignité des Guinéens, qui avait servi de prétexte à l’indépendance immédiate du pays, n’a cessé d’être foulée au pied par leurs dirigeants successifs qui se sont illustrés par leur excentricité et leur tyrannie, faisant parfois basculer la Guinée dans l’horreur avec des lieux de sinistre mémoire comme le camp Boiro où périrent de nombreux opposants politiques à Sékou Touré comme Diallo Telli, Koumandian Kéita et Fodéba Kéita et plus près de nous, le Stade du 28 septembre où furent massacrés près de 157 militants de l’opposition par la junte militaire de Moussa Dadis Camara. A la dictature qui a caractérisé les chefs d’Etat guinéens dont deux, en l’occurrence Sékou Ahmed Touré et Lassana Conté ont réussi le triste pari d’un règne à vie, il faut aussi ajouter l’instabilité politique causée par les coups d’Etat avec leur corollaire d’interruptions des programmes de développement. Cette gouvernance politique chaotique qui a fait de la scène politique guinéenne, l’une des plus meurtrières en Afrique de l’Ouest, s’est soldée bien logiquement au plan économique et social, par des conséquences désastreuses.

La Guinée danse sur un volcan

Les leaders successifs ne sont pas parvenus à transformer «  le scandale géologique » de la Guinée dotée d’une extraordinaire richesse minière et naturelle, en un «  miracle du développement ». De fait, la Guinée demeure l’un des Etats les plus pauvres au monde, avec des populations qui, à titre illustratif, souffrent le martyre avec un ravitaillement insuffisant en électricité. Sur ce tableau noir, les seuls traits de craie blanche sont le rayonnement culturel et sportif de la Guinée. Mise en orbite par le Bembaya Jazz international, la musique guinéenne s’est imposée sur la scène internationale et continue d’afficher des grands noms comme Mory Kanté, Sékouba Bambino, Fodé Kouyaté, etc. Dans le domaine de la littérature, il n’existe pas sur le continent, un seul petit écolier de langue française qui ne se soit pas exercé à l’orthographe par des dictées tirées de « L’enfant noir » de Camara Laye. Au plan sportif, l’on garde aussi en mémoire les exploits du Syli National dans le domaine du football. Cela dit, la question que l’on peut se poser après ce bilan très peu reluisant après un peu plus de six décennies d’indépendance, est la suivante : « de quoi sera fait demain pour la Guinée ? ». Sans jouer les Cassandre, tout laisse croire qu’au plan politique, ce n’est sans nul doute pas demain la veille, le jour où la Guinée vaincra le signe indien de ses mauvais dirigeants avec notamment les velléités de tripatouillage constitutionnel affichées par le président Alpha Condé pour s’ouvrir le boulevard d’un règne à vie. Avec ce projet, la Guinée danse sans nul doute sur un volcan dont l’éruption peut se révéler des plus catastrophiques en raison des clivages ethniques entre Malinkés et Peulhs qui définissent, pour l’essentiel, la configuration de la scène politique dans ce pays. Ce risque d’instabilité annoncé par la météo politique, aura nécessairement des impacts sur le développement socioéconomique, surtout que l’on sait que les richesses minières d’hier peuvent se révéler sans valeur dans une économie mondialisée qui a amorcé son virage numérique. Il reste à espérer cependant que dans un sursaut patriotique, le peuple guinéen décide de dévier la trajectoire maléfique de leur destinée collective dessinée par Alpha Condé et les Raspoutine qui arpentent les arcanes de son palais. Il l’avait déjà réussi en 1958 face aux colons blancs, il le peut aussi aujourd’hui face aux dirigeants actuels qui se sont confortablement installés dans leurs canapés et qui ne veulent pas en partir.

«  Le Pays »


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