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ATTENTATS A N’DJAMENA :  Deby saura-t-il laver l’affront ?


 

Jusque-là épargnée par les attentats terroristes, N’djamena, la capitale tchadienne, a fait l’objet, le lundi 15 juin dernier, d’un double attentat-suicide sanglant qui a fait au bas mot une trentaine de morts et une centaine de blessés.

Sans attendre une quelconque revendication, les autorités tchadiennes ont immédiatement indexé la secte islamiste Boko Haram qui sévit au Nigeria et contre laquelle elles ont engagé des troupes au-delà des frontières du pays. Elle expliquent ces attentats lâches comme une réponse des terroristes à leur engagement et aux coups durs portés par leurs combattants aux islamistes, comme ce fut le cas au Mali, mais aussi et surtout au Nigeria où ils ont fait subir de lourdes pertes à Boko Haram. Le Tchad a même repris certaines localités qu’elle avait conquises.

C’est pourquoi l’on peut comprendre l’amertume et le ressentiment du chef de l’Etat tchadien qui a certainement été blessé dans son orgueil et son amour-propre par ces attaques sur son sol.

Malgré tout, les autorités tchadiennes ont fait comprendre que « ces attaques n’émousseront pas la détermination du Tchad à combattre le terrorisme ».

Au contraire, si la piste Boko Haram se confirmait, l’on pourrait même s’aventurer à dire qu’entre Shekau et Deby, c’est désormais un combat à mort, le premier étant devenu le Ben Laden du second.

Et il y a lieu de croire que Deby ne lésinera pas sur les moyens pour en finir avec « le chacal », surtout qu’il a récemment déclaré que ses troupes étaient  à deux doigts de lui mettre le grappin dessus dans le Nord du Nigeria.

Toutefois, la tâche ne s’annonce pas facile pour Deby, dans cette guerre contre un ennemi imprévisible, instable, ondoyant, insaisissable voire invisible, pour tout dire nébuleux et lâche. Jusqu’aux plus grandes puissances de ce monde, nul n’est suffisamment armé contre les forces du mal et de l’obscurantisme. C’est pourquoi, en ces moments difficiles, le Tchad doit sentir la solidarité internationale dans toutes ses dimensions, surtout en raison de son engagement total et de son apport exceptionnel dans la lutte contre le terrorisme, au-delà même de ses frontières, pour la liberté d’autres peuples africains. Ces attentats à N’djamena doivent donc être vivement ressentis par tous ceux qui sont engagés dans la lutte contre le terrorisme. Car, comme l’ont du reste souligné les autorités tchadiennes elles-mêmes, il ne fait aucun doute que le pays paye pour son engagement et ses exploits contre les djihadistes, après avoir volé au secours d’autres pays en donnant le meilleur de lui-même.  Aussi doit-il, à son tour, faire l’objet de sollicitudes et d’attention pour l’aider à trouver la réponse appropriée à la situation.

Tant que le Nigeria ne sera pas débarrassé de la pieuvre islamiste, ses voisins risquent de souffrir le martyre

Au demeurant, la colère de Deby est légitime. Elle l’est d’autant plus que c’est la première fois que le Tchad est  si durement frappé sur son sol au moment où l’on s’y attendait le moins, et, qui plus est, à travers un symbole fort de l’Etat comme la police. Aussi, plus qu’un avertissement, les adversaires de Deby auraient voulu lui faire un affront  qu’ils ne s’y seraient pas pris autrement. Le mettant du même coup dans un dilemme profond face à la stratégie à adopter désormais, entre l’envoi de troupes supplémentaires à l’extérieur et la volonté de sécuriser prioritairement son propre territoire.

En tout état de cause, avec ces attentats de N’djamena, l’on peut dire qu’une nouvelle page de l’histoire est en train de s’écrire. En effet, il est presque certain que tant que l’Etat islamique, Boko Haram et autres groupes djihadistes ne seront pas vaincus, le Tchad gardera l’arme au pied. D’autant plus que, tant que le Nigeria ne sera pas débarrassé de la pieuvre islamiste, ses pays voisins risquent de souffrir le martyre pour longtemps. Aussi attend-on de voir si Deby saura laver l’affront, et de quelle manière. D’ores et déjà, le président tchadien a interdit le port de la burqa dans son pays, jusqu’à nouvel ordre. Pour une mesure forte, c’en est une. Dans tous les cas, s’il y parvenait, cela ne pourrait lui valoir que des dividendes politiques. Et ce serait du pain bénit pour repousser aux calendes grecques l’alternance dans son pays. Quoi qu’il en soit, il est aussi temps de penser à rendre opérationnelle la fameuse force d’intervention sous-régionale, car il est de plus en plus évident que petit à petit, les terroristes gagnent du terrain.

Outélé KEITA


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