GREVE DANS DES FILIERES SCIENTIFIQUES DE L’UNIVERSITE DE COCODY :Etouffer vite le brûlot avant que le campus ne s’embrase
Les étudiants de l’Université Félix Houphouët Boigny d’Abidjan, notamment ceux des Sciences physiques et de chimie, sont en grève depuis le 29 septembre dernier. Ils réclament l’équipement de leurs salles de travaux pratiques.
Les étudiants sont dans leur bon droit
Et au lieu de prêter une oreille attentive aux revendications de ces étudiants, les autorités ivoiriennes ont plutôt choisi de les réprimer. De quoi susciter la colère de ces derniers qui disent attendre depuis deux ans le matériel promis par les autorités. A dire vrai, les étudiants sont dans leur bon droit car le matériel ainsi que les laboratoires sont aussi importants que les amphithéâtres, sinon plus. Sans outils didactiques, l’enseignement ne peut-être de qualité. Et le gouvernement ivoirien ne saurait ignorer cela. D’ailleurs, s’il a injecté 111 milliards de F CFA dans les travaux de rénovation des universités du pays, après la crise post-électorale de 2010 à 2011, ce n’est certainement pas pour les beaux yeux des étudiants, mais plutôt par souci de faire de ces universités, de véritables temples du savoir. Faut-il le souligner, sous l’ère Gbagbo, les universités ivoiriennes étaient devenues des lieux où régnait la loi des coupe-coupe, des gourdins et les malversations en tous genres. Si fait que les étudiants étaient plus enclins à semer la violence et la pagaille qu’à se préoccuper des questions relatives à leur éducation. Cette grève s’inscrit dans l’ordre normal des choses car la Côte d’Ivoire est devenue un Etat de droit. Et dans un Etat de droit, on ne saurait empêcher des étudiants de faire grève, étant donné surtout la pertinence et la justesse de leurs revendications. L’équipement des salles des travaux pratiques a-t-il été pris en compte pendant la rénovation de l’Université de Cocody? Si oui, la somme destinée à ce volet a-t-elle été détournée à d’autres fins ? Cela n’est pas à exclure car on se rappelle que des soupçons de détournements avaient conduit au limogeage de certains responsables. L’Etat ivoirien attend-il que les fautifs remboursent avant de donner suite aux revendications des étudiants ? En tout cas, il a intérêt à étouffer vite ce brûlot avant que le campus ne s’embrase.
L’émergence ne pourra être réalisée sans des hommes bien formés
On le sait, sous nos tropiques, la solidarité estudiantine est très forte et si ce problème de matériel perdure, les étudiants d’autres filières pourraient bien prêter main forte à leurs camarades en difficultés. C’est dire que la voie de la répression que le pouvoir a adoptée pourrait aggraver la situation car comme le dit l’adage, ce n’est pas à un vieux singe qu’on apprend à faire la grimace. On ne le sait que trop, les étudiants ivoiriens n’ont pas peur de la répression. Bien au contraire, plus on les brutalise, plus ils donnent de la voix. Et le contexte sociopolitique s’y prête. Certains hommes politiques, pour peu que le pouvoir prête le flanc, n’hésiteront pas à récupérer cette grogne estudiantine. Et le pouvoir ivoirien est bien placé pour savoir les conséquences que peut entraîner la colère d’étudiants instrumentalisés.
Il y a donc urgence que le régime de Alassane Ouattara revoie sa copie car s’il n’y prend garde, l’embellie économique dont il est fier aujourd’hui pourrait être mise à mal. Et puis, il est évident que l’émergence tant prônée par certains dirigeants africains, ne pourra être réalisée sans des hommes bien formés. Tous les pays développés ont fait de l’éducation une priorité. La voie du développement et du progrès passe absolument par là. Et la Côte d’Ivoire ne saurait feindre de l’ignorer.
Dabadi ZOUMBARA