ADOPTION DE LA CHARTE DES VALEURS : Le plus dur reste à faire
Les assises nationales qui se sont tenues hier, ont validé le contenu de la Charte des valeurs proposée par le groupe de travail qui avait été mis en place par le Mouvement patriotique pour la sauvegarde et la restauration (MPSR). C’est là une première au Burkina et l’initiative est saluée. Le contenu de la Charte n’est rien de plus que ce que les prophètes d’Israël ont clamé pendant des siècles et qui est exprimé dans l’Evangile des chrétiens, le Coran des musulmans, le livre des bouddhistes et la sagesse de nos ancêtres. C’est dire donc qu’il n’y a rien de nouveau qui ne soit déjà connu. Si ces valeurs sont répétées de façon insistante depuis des siècles voire des millénaires, c’est qu’elles sont cardinales autant pour l’individu que pour la vie en société. C’est qu’aussi, malgré leur simplicité, elles sont difficiles à intégrer et à vivre. Le Burkina Faso a connu des périodes de promotion des valeurs éthiques, notamment sous le président Sangoulé Lamizana et plus particulièrement pendant la Révolution sous le président Thomas Sankara. Cette période est maintenant révolue. La référence des valeurs a évolué. De l’éthique, on est passé à l’affairisme. Du vivre- ensemble, on est passé au chacun pour soi. Dans la mesure où, matériellement, l’éthique n’enrichit pas immédiatement, on préfère l’affairisme. Dans la mesure où la construction de soi est exigeante, on préfère le relâchement, le laisser-aller, le désordre, l’indiscipline et l’incivisme. C’est sur un chantier aussi délabré qu’il faut essayer de mettre en œuvre la Charte des valeurs. La priorité des priorités du régime de la Transition, c’est de trouver une solution à l’insécurité qui a gangréné le pays. Pourra-t-il s’occuper encore d’un chantier aussi complexe que la mise en œuvre de la Charte des valeurs, et si oui, comment ?
C’est sur les valeurs d’éthique que les nations se sont construites et ont perduré dans le temps
La lutte contre l’insécurité, si difficile soit-elle, n’empêche pas l’ouverture d’autres chantiers et d’autres fronts. Tout dépend de la vision, du charisme et de la qualité du leadership de ceux qui sont aux commandes. On se rappelle que sous la Révolution, beaucoup de combats étaient menés simultanément. Ce qui a permis, en quatre ans seulement, d’engranger des acquis substantiels, tant sur le plan matériel que sur celui de la transformation des mentalités. Car, c’est de cela qu’il s’agit, en fait, et la meilleure école en la matière est l’exemple. Les dirigeants devraient donc apprendre à éduquer par l’exemple. Ne dit-on pas que l’exemple vient d’en haut et l’imitation de la base ? Mais est-ce suffisant ? Bien sûr que non. Il faudra recourir à d’autres moyens comme l’intégration de la Charte des valeurs dans les documents scolaires, l’énoncé et l’explication de son contenu dans les médias et par la voie des ondes, la sollicitation de la participation des citoyens dans la promotion et la mise en pratique de la Charte. Pendant la Révolution, les Comités de défense de la Révolution (CDR) servaient de relais du pouvoir et de moyens d’encadrement de la population. A cet effet, le régime de la Transition devra innover pour se doter de personnels d’encadrement. Il ne serait pas non plus superflu de prévoir un organe de contrôle de la promotion et de la mise en œuvre de la Charte. C’est sur les valeurs d’éthique que les nations se sont construites et ont perduré dans le temps. Malgré les difficultés rencontrées à travers les âges, le peuple d’Israël survit grâce à son attachement à la Torah, à l’histoire et aux valeurs de ses ancêtres. La Charte des valeurs devrait être le ciment qui va ressouder les Burkinabè entre eux et la boussole qui devrait les guider à travers les âges. Pour cela, son contenu devrait être renforcé, et au lieu qu’elle soit simplement adoptée par des assises, elle devrait être directement soumise au peuple pour adoption au référendum. Il devrait aussi lui être conféré une valeur supraconstitutionnelle, de sorte qu’au-delà des Constitutions qui changent, elle reste la boussole éternelle du peuple burkinabè.
Apolem