SITUATION NATIONALE : Des OSC mettent en garde les militaires « complotistes »
Suite au mouvement d’humeur de certains éléments du Régiment de sécurité présidentielle (RSP) constaté le mercredi 4 février 2015, empêchant la tenue du Conseil des ministres ordinaire, des Organisations de la société civile (OSC) ont animé un point de presse le jeudi 5 février 2015 à Ouagadougou, au Centre national de presse Norbert Zongo (CNP/NZ), afin de se prononcer sur la situation.
Depuis l’insurrection populaire des 30 et 31 octobre 2014, les Organisations de la société civile (OSC) jouent un rôle de vigie de la transition. C’est en ce sens qu’une coalition de 19 OSC a élevé la voix contre le mouvement d’humeur à Kosyam (lire déclaration en encadré). Les OSC trouvent qu’il ne faut pas banaliser la sortie des éléments. « Le comportement des militaires « complotistes » est intolérable, parce que le RSP s’ingère dans la transition », faisant penser à une « tentative de prise en otage de celle-ci », clament-elles. Et de relever que « le RSP peut faire des revendications corporatistes, mais qu’il n’empêche pas la tenue du Conseil des ministres ». Les conférenciers trouvent que « l’heure est grave parce qu’à travers sa sortie, le RSP a lancé un défi au peuple ». Alors que cela ne devait pas être le cas, parce que « les militaires sont au service du peuple et non le contraire ». Certes, « le Burkina Faso a besoin des éléments du RSP mais pas dans sa composante actuelle ». Alors, « ce régiment doit être dissous », ont-elles lancé. « Que ce soit pendant ou après la transition, peu importe, pourvu que cela se fasse dans les règles de l’art » et « que des mesures soient prises pour assurer la stabilité du pays », ont-elles précisé.
Les conférenciers ont aussi saisi l’occasion pour se prononcer sur le récent « activisme » du Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP). Pour les OSC, cela est une menace pour la transition. C’est en cela qu’elles pensent que « même si le parti ne peut pas être dissous, l’impunité ne doit plus être la règle ». Les OSC estiment que le pouvoir est au peuple et elles invitent les citoyens « à sortir nombreux le samedi 7 février 2015, pour défendre la transition ».
Françoise DEMBELE
DECLARATION DES 19 OSC
Compatriotes burkinabè de l’intérieur et de l’extérieur,
Trois mois après l’insurrection populaire qui a mis fin, sous l’admiration des peuples d’Afrique et d’ailleurs, à la dérive monarchique du régime de Blaise Compaoré et de son
CDP, la transition politique mise en place par un consensus inédit entre les forces vives de la
nation, est menacée. En effet, ce jour mercredi 4 février 2015, des évènements très graves ont marqué la situation nationale. Des mouvements d’humeur, des revendications et des
remous d’éléments du Régiment de sécurité présidentielle (RSP) ont empêché la tenue de
l’hebdomadaire Conseil des ministres. Le Premier ministre aurait également passé de
longues heures au Palais du Mogho Naaba à Ouagadougou. Des négociations seraient en
cours autour des revendications corporatistes et relatives à l’abrogation de décisions de
nominations et de remise en cause de réformes en vue dans le RSP. Des informations concordantes rapportées par la presse nationale et internationale indiquent un précédent en
décembre, avec une interruption du dernier Conseil des ministres de l’année 2014 et des
revendications et ultimatum lancés aux autorités exécutives de la Transition.
Ces évènements coïncident curieusement avec un activisme important de l’ancien parti au
pouvoir qui annonce un agenda politique chargé dans les semaines à venir, et la publication d’informations, ce jour même, annonçant l’éventualité de la candidature du général Gilbert Diendéré, aperçu ce matin au Palais de Kosyam et chez le Mogho Naaba, à l’élection
présidentielle de 2015 pour le compte du CDP.
A l’analyse, ces évènements constituent, de façon très claire, des tentatives de remise en cause du consensus national cimenté dans la Charte de la transition, de sabordage de la transition démocratique en cours, de liquidation des espoirs et attentes politiques et sociales
de la formidable insurrection populaire d’Octobre 2014, et de retour à un passé révolu et à une direction militaire, militariste et anti-démocratique du pays.
Ces manœuvres constituent des intimidations et des chantages faits au peuple, des tentatives de prise en otage de la transition de la part des forces du passé, ces forces-là même qui ont conduit le pays au bord
du gouffre. Assurément, la contre-révolution est en œuvre. La clémence sans doute trop
rapide mais surtout l’impunité qui règne encore, nourrissent les illusions de retour aux
ténèbres.
Au regard de cette situation, nous, organisations signataires de la présente déclaration :
Dénonçons les forces réactionnaires, les entreprises mafieuses et malfaisantes ainsi que les rêveries du passé ;
Condamnons avec la plus haute énergie patriotique, les manœuvres réactionnaires
et anti-démocratiques, les intimidations militaires, les atteintes à la transition politique et démocratique ainsi que le viol du sacrifice des martyrs de l’insurrection ;
Condamnons le chantage, la tentative de coup de force, d’intimidation et de prise en
otage du processus démocratique ;
Appelons l’ensemble des forces sociales et politiques, la jeunesse militante et
patriote en particulier, à se mobiliser pour faire barrage au retour au passé, dépassé
et balayé par le peuple insurgé ;
Exigeons des institutions et autorités de la transition d’ancrer fermement leur action aux exigences de la Charte de la Transition et de la Constitution, au service de la réalisation des attentes et aspirations de l’insurrection populaire pour un renouveau
démocratique du Burkina Faso ;
Demandons à tous les acteurs civils et militaires de se démarquer des magouilles et autres manipulations visant la liquidation de la transition politique et démocratique ;
Lançons un appel à la vigilance à l’ensemble des forces vives de la nation ;
Mettons en garde les éléments militaires complotistes, leurs parrains militaires et
civils, qu’ils soient à l’intérieur ou à l’extérieur du pays ;
Réclamons la mise en chantier urgent des réformes politiques et sociales attendues du peuple,
Exigeons, conformément à la recommandation du Collège de sages dès 1999, la
dissolution du RSP, condition indispensable d’un renouveau démocratique du pays ;
Appelons les autorités de la transition à prendre des sanctions fermes et exemplaires contre les auteurs de ces actes antidémocratiques et attentatoires à la sûreté
nationale et à la sécurité des institutions ;
Appelons la Communauté internationale, en particulier le Groupe de contact pour le
suivi de la Transition, à prendre toutes leurs responsabilités ;
Demandons au peuple de se tenir prêt pour les actions imminentes requises en vue de la défense de la démocratie, de la liberté et des attentes et aspirations de
l’insurrection d’Octobre 2014.
Les manipulations, les intimidations et la contre-révolution ne passeront pas !
La patrie ou la mort nous vaincrons !
Fait à Ouagadougou, le 04 février 2015.
Ont signé les organisations de la société civile ci-après :
Le Balai citoyen
CAR
CEDEV
CGD
CNDPPH
FAR
FEPDHA
FOCAL
FRC
Institut FREE Afrik
Le Repère
Le Tocsin
MBDC
MBEJUS
Mouvement Afrikamba
Mouvement Brassard noir
SYMEB
Réseau Barké
Terre à vie