PROCES D’UN CHEF DJIHADISTE MALIEN A LA CPI : Les groupes armés terroristes en prendront-ils de la graine ?
Il s’appelle Abdoul Aziz al-Hassan. Il était le patron de la police islamique de Tombouctou au Mali. Détenu à La Haye où son procès s’est ouvert en juillet 2020, il répondait de crimes contre l’humanité et crimes de guerre devant la Cour pénale internationale (CPI) qui a rendu son verdict le 26 juin dernier. Elle a reconnu l’accusé coupable des faits à lui reprochés, notamment de tortures et d’atteintes à la dignité de la personne pour des actes commis à Tombouctou au Mali lors de l’occupation djihadiste de ladite ville en 2012. Pour le juge, al-Hassan a joué un « rôle clé » en supervisant les amputations et les flagellations en tant que chef de la police islamiste. Au-delà de la sentence qui sera prononcée à une date ultérieure après une nouvelle série d’audiences, ce procès se veut un avertissement pour toutes ces personnes sans foi ni loi, engagées dans des actions criminelles contre de paisibles populations, au nom d’une idéologie obscurantiste. Cela est d’autant vrai que les faits reprochés à l’accusé, vont de la torture à l’esclavage sexuel, en passant, entre autres, par les traitements cruels, le viol, l’atteinte à la dignité de la personne, les mariages forcés, la condamnation sans jugement, les persécutions, autres actes inhumains et attaques contre des biens protégés.
Le procès de ce chef islamiste pourrait en appeler d’autres
Une panoplie de crimes, à côté des tueries de masse, exécutions sommaires et autres violences parfois humiliantes commises au quotidien contre des populations innocentes, qui exposent leurs auteurs à des risques de poursuites judiciaires. La question qui se pose est de savoir si les groupes armés terroristes qui sèment la mort et la désolation à tout va dans le Sahel, en prendront de la graine. La question est d’autant plus fondée que ce verdict intervient au lendemain de la publication du mandat d’arrêt international émis depuis 2017 et gardé sous scellé par la Cour pénale internationale, contre Iyad Ag Ghaly, le chef du groupe terroriste Ansar Dine, pour des crimes de guerre et crimes contre l’humanité commis dans le Nord Mali, entre janvier 2012 et janvier 2013. Comme quoi, chacun est responsable de ses actes et à ce titre, peut être appelé à en répondre tôt ou tard, devant la Justice. Comme c’est le cas aujourd’hui de Abdoul Aziz al-Hassan dont le procès se veut aussi pédagogique qu’il pourrait servir d’exemple à tous ces criminels et autres bandits armés aux desseins obscurs, qui rivalisent souvent de cruauté dans les exactions contre de paisibles populations. C’est dire si le procès de ce chef islamiste pourrait en appeler d’autres. Cela s’entend d’autant plus bien qu’il n’est pas le premier terroriste à se retrouver dans cette situation, puisqu’un autre chef islamiste en la personne de Ahmed al-Faki al-Mahdi, avait déjà été reconnu coupable, en 2016, de crimes de guerre pour la destruction de monuments historiques et religieux pendant l’occupation de la même ville malienne de Tombouctou, par les djihadistes en 2012, et condamné à neuf ans de prison par la CPI.
En jugeant de tels criminels, la CPI rend service à l’humanité
C’est le lieu de rendre un hommage appuyé à la Cour pénale internationale pour sa contribution à la lutte contre le terrorisme. Car, au-delà de la recherche de la vérité et de la justice, c’est le genre de procès qui tend, par sa portée, à rehausser l’image de cette institution qui a mal à sa réputation en Afrique. Et son impact est d’autant plus grand qu’il traduit l’importance de la Justice internationale dans la lutte contre l’impunité des crimes les plus graves commis à travers le monde. Autant dire que dans ce contexte de crise sécuritaire généralisée où le terrorisme a gagné considérablement du terrain en Afrique de l’Ouest, ce procès ne pouvait pas mieux tomber. Non seulement pour montrer aux chefs terroristes et leurs affidés qu’ils ne sont pas intouchables, mais aussi et surtout, qu’ils peuvent être, à tout moment, rattrapés par leurs actes. C’est pourquoi il convient d’encourager la Justice internationale dans son action. Car, en jugeant de tels criminels, elle rend service à l’humanité. Cependant, il ne faut pas se faire d’illusions en croyant qu’à elle seule, la Justice internationale est capable de réfréner les ardeurs des forces du mal. Et ce n’est pas demain la veille qu’elle se présentera comme l’épouvantail susceptible de mettre fin au terrorisme. Mais elle a le mérite d’exister et de s’employer à jouer activement son rôle en restant cette épée de Damoclès suspendue en permanence sur la tête de ces malfrats qui se croient tout permis.
« Le Pays »