DETOURNEMENT DE BIENS PUBLICS PAR SASSOU FILS : Qui arrêtera le pillage des richesses ?
Le 2 mars dernier, une enquête menée par l’ONG suisse, “La Déclaration de Berne “, a épinglé Denis-Christel Sassou N’Guesso, fils du président congolais Denis Sassou N’Guesso. Elle l’accuse d’avoir détourné des millions de dollars du pétrole congolais, autrement dit, l’argent du contribuable congolais. Selon l’ONG en question, spécialisée dans les recherches sur la corruption des dirigeants africains, qui a été alertée par une source anonyme, un contrat signé du fils de Sassou N’Guesso confère à une petite société établie à Genève en Suisse, le droit exclusif d’exportation du pétrole raffiné congolais. Pas besoin d’ajouter que “Kiki le pétrolier” comme on le surnomme, y a sa part du gâteau. Au CV de ce fils à papa, il faudra ajouter quelques lignes, celles-ci plus officielles : il est le PDG de la Société nationale des pétroles du Congo (SNPC) et administrateur général de la Congolaise de raffinage (Coraf). De quoi faire rappeler l’ascension fulgurante d’un certain… Karim Wade qui s’est montré si gourmand en ambitions, qu’il a fini par se faire très mal. “Kiki le pétrolier” sur les traces de Karim Wade ? En tout cas, si les accusations de l’ONG sont fondées, il urge que N’Guesso fils se ressaisisse au plus vite. Car, papa ne sera pas toujours là pour jouer les protecteurs. Cela dit, cette affaire relance encore le débat sur la place que devraient occuper les fils, proches parents des chefs d’Etat africains dans la gestion des affaires publiques. Même si on reconnaît qu’ils sont citoyens comme les autres, donc en droit, eux aussi, de faire de la politique ou de se faire de l’argent, il reste que les tristes fins de quelques rejetons de dirigeants africains devraient inciter à faire attention, et mieux, à se montrer irréprochable. “Kiki le pétrolier” est-il irréprochable ? A voir… Car, si le nom du père est plusieurs fois revenu dans la fameuse affaire dite “des biens mal acquis“, on peut difficilement croire que le fils ait juré la main sur le cœur, de s’éviter, en la matière, tout écart de conduite qui le mette sur la sellette. En attendant, il faut tirer son chapeau à l’ONG “La Déclaration de Berne “. Ainsi qu’à toutes celles qui, comme elles, oeuvrent inlassablement à traquer tous les dirigeants fossoyeurs des économies de leur nation. C’est tout à leur honneur. Peut-être que le rapport de l’enquête des juges sur “les biens mal acquis” ne constitue, en réalité, que la partie visible de l’iceberg.
Le remède viendra de l’alternance démocratique
Bon vivant, comme d’ailleurs c’est le cas pour bon nombre de rejetons de dirigeants africains, Denis-Christel mène certainement grand train. Les moyens dont il dispose sont-ils gagnés honnêtement ? On peut en douter, d’autant que nous sommes, comme on le sait, en république “gondwanaise” où les princes régnants confondent généralement les caisses de l’Etat avec leur tirelire et crient aussitôt à l’ingérence dès lors que l’on s’intéresse de près à leur gestion.
C’est pourquoi on peut avoir toutes les raisons de croire qu’au Congo-Brazzaville, des pétrodollars qui, normalement, devraient revenir au peuple, ont emprunté d’autres voies : les paradis fiscaux. Des scandales financiers comme celui de Sassou fils sont légion sur le continent noir où le népotisme et le favoritisme ont la peau dure. C’est le cas des affaires Karim Wade du Sénégal et Téodorin Obiang Nguema, fils du président équato-guinéen. Si ces enfants nés avec une cuiller en or dans la bouche, sont dans une logique de détournement et de dilapidation des deniers publics, la méthode de gestion du père y est forcément pour quelque chose. Comme quoi, tel père, tel fils.
D’importants fonds appartenant au contribuable en Afrique, sont gardés dans des banques du Nord alors que les populations croupissent dans la misère. Pendant ce temps, puissances occidentales et dirigeants africains malhonnêtes en profitent. Et ces fonds sont parfois utilisés par des élites politiques occidentales pour financer leurs campagnes électorales. Ils sont aussi octroyés sous forme de prêts aux pays africains qui se voient obligés de les rembourser, plus tard, avec des intérêts. Pauvre Afrique ! A quand une gestion saine du bien public ? En tout cas, la solution ne viendra pas de l’Occident qui a toujours travaillé à protéger ses intérêts. Sans aucun doute, le remède viendra de l’alternance démocratique. Un chef d’Etat qui sait qu’il est appelé à partir au terme de deux mandats, accumulera naturellement moins de fautes. Il travaillera à traîner le moins possible de casseroles, conscient qu’il devra rendre par la suite compte de sa gestion de l’Etat. La société civile et les populations ont aussi un important rôle à jouer dans cette lutte, pour une gouvernance plus saine des têtes couronnées africaines.
Adama SIGUE