ABLASSE KIENDREOBEOGO DE L’ASSOCIATION DES COMMERÇANTS DE BOBO : « Il est temps de dissoudre les membres consulaires de la CCI-BF »
Le pays des Hommes intègres est, depuis la chute du régime Compaoré, dans la dynamique de réforme de son système de gouvernance. Ablassé Kiendrebeogo, un des responsables de l’Association des commerçants de Bobo-Dioulasso, donne, à notre micro, son point de vue sur la gestion de la Chambre de commerce et d’industrie du Burkina Faso (CCI-BF). Pour lui, il faut simplement dissoudre les anciens membres consulaires ainsi que leurs acolytes car étant tous du Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP).
« Le Pays » : Comment appréciez-vous les différentes démarches entreprises par le chef de l’Etat par intérim pour remettre l’appareil étatique en marche ?
Ablassé Kiendrebéogo: Je pense que de très belles initiatives sont prises par le chef de l’Etat avant même la mise en place des organes de transition. Ces initiatives ont permis à la société de reprendre son cours normal. Pourvu que les différents domaines de notre pays connaissent un réel nettoyage de ses virus en vue d’asseoir une base réelle de démocratie. Il en est de même pour notre institution, la Chambre de commerce et d’industrie du Burkina (CCI-BF) où des tares existent encore.
Pensez-vous qu’il existe vraiment des manquements au niveau de la CCI-BF et qu’il faille revoir ?
Ce sont en fait les éléments de l’ancien régime, les proches surtout, qui sont au-devant des choses au niveau de la CCI-BF. Le régime ayant été changé, il n’y a vraiment pas de raison que les proches soient là encore. Je dirais même que c’est à cause de la patrimonialisation du pouvoir, l’accaparation des richesses du pays par une minorité proche du régime, que le peuple burkinabè est sorti pour dire non. Sous l’ancien régime, le CDP et sa suite avaient fabriqué des opérateurs économiques et commerçants pour avoir le contrôle de toutes les institutions et ce, à tous les niveaux. C’est pourquoi il y a eu Djanguinaba Barro, président de la CCI-BF/section Bobo, qui s’était permis de dire qu’il était prêt à mourir pour Blaise Compaoré. C’est même pour tout cela qu’il n’a pas échappé à la furie des manifestants le 30 octobre où sa maison et autres biens ont été incendiés. Alors, c’est vous dire que le régime faisait du blanchissement d’argent à travers ses opérateurs économiques et commerçants fabriqués de toutes pièces. En plus de cela, on leur donnait le monopole de tous les marchés, brimant ainsi les autres commerçants. C’était en quelque sorte un rouage et tant que tu n’étais pas avec eux, tu n’étais pas dans le système. Tu ne pouvais bénéficier d’aucun avantage parce que tu n’étais pas du clan du CDP.
L’ancien régime avait quand même adopté des mesures de lutte contre la fraude en vue de permettre aux petits commerçants de survivre !
On parle de lutte contre la fraude mais qui encourageait ou pratiquait la fraude ? C’étaient eux qui, avec leurs opérateurs montés de toutes pièces, faisaient en sorte que leurs marchandises échappent aux contrôles douaniers, et ils ne payaient pas d’impôts. Ils organisaient une concurrence déloyale pour asphyxier les petits commerçants qui ne sont pas avec eux. Je dis que cette insurrection n’avait pas seulement pour but de chasser Blaise Compaoré du pouvoir ; c’était aussi pour tuer ce régime constitué en clan pour s’accaparer les richesses du pays. C’est pourquoi je pense d’ailleurs qu’il est temps de dissoudre les membres consulaires de la CCI-BF et que la gestion soit confiée au ministère en charge du Commerce, ou mettre carrément en place un comité de transition en attendant les prochaines élections consulaires. Vous n’êtes pas sans savoir que la CCI-BF est aussi une richesse de ce pays et si on ne fait pas du toilettage, ce sont nos biens qui vont se volatiliser à cause de l’ancien régime qui continue d’avoir la mainmise sur les institutions économiques. Pour tout dire, si on ne dissout pas les membres consulaires de la CCI-BF, ce sont les commerçants honnêtes, les opérateurs économiques et entrepreneurs qui continueront de souffrir dans les mains de leurs anciens bourreaux.
A vous entendre, tout le problème de la CCI-BF réside à Bobo-Dioulasso ?
Non, c’est valable pour toutes les 13 régions et les CCI-BF provinciales du Burkina. Voyez par exemple au niveau national, le président de la CCI-BF de Ouagadougou est sorti demander qu’on dédommage les opérateurs économiques victimes de pillages, de saccages et d’incendie lors de l’insurrection populaire. Mais en vertu de quoi ? Remarquez bien, ceux qui ont été victimes, à quelques exceptions près, sont des proches de l’ancien régime. Pourquoi le président de la CCI-BF s’intéresse-t-il à ces dégâts matériels au détriment des vaillants fils et filles qui sont tombés sur le champ de bataille, sans oublier les nombreux blessés? La grande perte ici, ce sont toutes ces personnes qui ont perdu la vie et les blessés dont certains sont marqués à jamais. Mais lui, ne voit que leurs intérêts et il va jusqu’à demander leurs propres dédommagements. Pourquoi utiliser l’argent du pauvre contribuable pour dédommager ceux qui s’étaient enrichis sur le dos de ces mêmes pauvres ? Les gens ne sont pas allés piller ou incendier au hasard, sauf quelques cas exceptionnels. Ils avaient déjà identifié leurs bourreaux et savent comment chacun a eu ses richesses. S’il y a de l’argent dans la caisse de la CCI-BF, je pense qu’il y a urgence à agir au lieu de laisser les mêmes richards fabriqués sur le dos du contribuable, s’enrichir à nouveau. Pour me résumer, il faut retirer la CCI-BF du clan du CDP et confier la gestion aux directeurs de la CCI-BF et concomitamment à un organe transitoire de gestion.
Certains sont montés au créneau pour exprimer leur ras-le-bol quant à la gestion du grand marché. Etes-vous de leur avis ?
Bien sûr ! Je dirais même qu’il faut revoir la structure de gestion du grand marché et des yaars, et pourquoi pas les différentes associations de commerçants. C’est le même clan qui s’est accaparé toutes ces structures. En principe, le grand marché de Bobo devait faire entrer au minimum 1 milliard de F CFA par an. Mais depuis sa construction jusqu’aujourd’hui, il n’y a jamais eu un bilan pour dire ce que le grand marché génère comme ressources pour le budget de l’Etat ou de la commune. La gestion de ce grand marché est resté dans le flou-obscur. Il faut vraiment un toilettage à ce niveau aussi. Vous avez entendu entre-temps le président des commerçants du grand marché organiser un meeting pour, dit-il, soutenir l’ex- président dans son projet de référendum et de modification de l’article 37. Il passait son temps à flatter les commerçants en leur disant que Blaise Compaoré leur accorderait des prêts, faisant d’eux des gens acquis à la cause du CDP. La frustration était devenue grande dans les rangs des commerçants par rapport à la gestion des marchés et yaars de Bobo. Il va falloir que les institutions de transition aient l’œil ouvert à ce niveau aussi.
Interview réalisée par Josias Zounzaola DABIRE
jean de Dieu
/
Les gens de Bobo veulent que toues les institutions soient démontées: ils ont brûlé mairie, tribunal, poste de péage et veulent dissoudre maires et chambres de commerce…..
18 novembre 2014ILs sont combien? ils sont qui?