HomeA la uneADRESSE DE BUHARI A LA NATION NIGERIANE : Un discours qui ne rassure pas

ADRESSE DE BUHARI A LA NATION NIGERIANE : Un discours qui ne rassure pas


De retour au pays après plus de trois mois d’absence pour raison de soins à l’étranger, précisément à Londres la capitale britannique, le président nigérian, Muhammadu Buhari, s’est adressé le 21 août dernier à ses compatriotes, dans un discours à la Nation retransmis à la Télévision nationale. Ce, dans le but non seulement de prendre langue avec son peuple, mais aussi et surtout pour mettre fin à la polémique et aux supputations qui enflaient sur son état de santé, au point que certains de ses compatriotes sont allés jusqu’à demander sa démission pour cause de maladie et d’absence prolongée.
Si le retour du président Buhari au pays est en soi déjà une bonne chose et une preuve de vie face aux rumeurs persistantes dont certaines le donnaient pour mort, le moins que l’on puisse dire, c’est que son discours à la Nation n’aura pas été rassurant.
Le président Buhari a raté le coache lors de son adresse à la Nation

D’abord en raison de sa brièveté, 3 minutes 30 secondes, qui, dit-on, aura été « dans la mesure de ses capacités physiques actuelles ». Ensuite, dans son contenu où le chef de l’Etat n’a fait aucune allusion à son état de santé, se contentant de remercier ses compatriotes pour leurs « prières », tout en appelant à l’unité et en réaffirmant sa volonté de lutter contre le terrorisme. Ceux donc de ses compatriotes qui s’attendaient à des éclairages sur l’état de santé de leur président en vue de se rassurer sur sa capacité à continuer à diriger le pays, en auront pris pour leur grade. Encore plus le seront ceux qui s’attendaient à ce qu’il rende simplement le tablier pour aller mieux se soigner. Mais ce qui est encore plus inquiétant, c’est l’état physique du président qui apparaît visiblement diminué et pour qui cet exercice de trois minutes et demie à la Télévision nationale, aura été quelque peu laborieux. C’est pourquoi l’on est porté à croire que le Nigeria continuera encore pour quelque temps, d’être dirigé par un valétudinaire. Et ce, tant que les Nigérians ne seront pas définitivement fixés sur l’état de santé réel de leur président. En la matière, l’on peut dire que le président Buhari a raté le coache lors de son adresse à la Nation. Parce qu’au lieu de rassurer ses compatriotes, son apparition télévisuelle furtive a plutôt contribué à semer le doute dans les esprits, et les interrogations demeurent. Buhari est-il véritablement rétabli ? A-t-il encore les capacités physiques pour continuer à diriger le pays ? Autant de questions et bien d’autres non posées, qui auraient certainement eu réponse s’il avait eu l’élégance et le réflexe d’un Patrice Talon, le président béninois qui, quelques mois plus tôt, avait joué la carte de la transparence dès son retour au pays, en communiquant avec force détails sur son état de santé qui avait fait jaser ses compatriotes et affolé la toile au pays du Vaudou. En tout cas, Buhari a manqué une occasion en or d’éclairer et de fixer définitivement ses compatriotes sur son état de santé. Cela n’est pas bon signe et peut laisser penser que la situation est sans doute beaucoup plus grave qu’il ne veut le laisser paraître. C’est pourquoi les Nigérians n’ont pas totalement tort de se demander s’il terminera son mandat, le cas de l’un de ses prédécesseurs, Umaru Yar’Adua pour ne pas le nommer, qui est passé de vie à trépas en plein mandat, étant encore frais dans les mémoires.
Le Nigeria a mal à son président
Aussi peut-on voir derrière cette adresse télévisée à la Nation, une opération de communication destinée à donner le change aux Nigérians. Mais l’on peut douter qu’elle produise l’effet escompté. Car, il y a fort à parier que nombre de Nigérians sont sortis beaucoup plus confortés dans leur conviction que le chef de l’Etat n’est pas au mieux de sa forme et n’est pas en mesure de diriger convenablement le pays. Cela, alors que le pays fait face à de nombreuses difficultés, entre autres, économiques, sécuritaires, sans oublier les velléités émancipatrices de certaines communautés comme celles du Biafra. Mais en adoptant une telle attitude d’omerta autour de sa santé, Muhammadu Buhari a tendance à oublier que le Nigeria n’est pas un royaume où la santé du chef est généralement tenue au plus grand secret, mais bien un Etat moderne où la fonction de chef de l’Etat est transitoire. A ce titre, il doit la vérité à ses compatriotes et devrait avoir le courage, si ses capacités physiques ne lui permettent pas de continuer, de rendre le tablier pour libérer son peuple. Mais s’il se sent encore capable de mener à bien sa mission, il devrait le signifier tout aussi clairement à ses compatriotes et non pas se réfugier derrière un silence à la limite méprisant, qui a le don de semer davantage la confusion dans les esprits, au point que l’on pourrait se poser la question suivante : de qui Buhari se moque-t-il ?
En tout état de cause, maintenant qu’il est rentré et a pris la parole, l’on attend de voir comment Buhari va reprendre les choses en main. Une chose est sûre, s’il devait de sitôt reprendre l’avion pour un autre séjour médical, cela contribuerait à renforcer davantage la méfiance entre lui et son peuple. Et qui sait si le nombre de ses compatriotes l’appelant à la démission ne s’en trouverait pas considérablement multiplié ? En tout cas, il faut le dire, le Nigeria a mal à son président.
« Le Pays »

 


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