HomeA la uneBAKARY KONE, COORDONNATEUR DE LA CAMPAGNE NTD DES CASCADES : « Au niveau du MPP, il y a une attitude un peu hautaine au cours des négociations »

BAKARY KONE, COORDONNATEUR DE LA CAMPAGNE NTD DES CASCADES : « Au niveau du MPP, il y a une attitude un peu hautaine au cours des négociations »


Malgré le protocole qui le liait au MPP dans le cadre des dernières élections communales, le NTD a ravi le fauteuil de maire à son allié dans la commune de Banfora. Même l’insistance du premier responsable du parti dans la région, le ministre Souleymane Soulama, n’a pas suffi à dissuader les militants. Comment est-on arrivé à un tel cas de figure ? Pour nous permettre de comprendre ce qui s’est passé, Bakary Koné, le coordonnateur régional adjoint de la campagne du NTD dans les Cascades, qui est également élu pour siéger au Conseil régional au titre de la commune de Banfora, a bien voulu repondre à nos questions.

 

« Le Pays » : Etes-vous satisfaits des résultats auxquels votre parti politique, le NTD, est parvenu lors de l’élection du maire ?

 

Bakary Koné : En tout cas nous sommes satisfaits des résultats du vote. Comme vous le savez, on a pu obtenir la présidence du Conseil municipal, notamment la mairie de Banfora et cela dans un esprit où on l’a fait avec des alliés.

 

Justement, vous parlez d’allié. Dites-nous pourquoi vous avez présenté un candidat au poste de maire alors que la convention qui vous lie au MPP demandait de soutenir ce parti ?

 

Nous avons effectivement signé un protocole d’accord et nous avons mené un certain nombre de négociations  avec le MPP. Malheureusement ces négociations n’ont pas totalement abouti et elles se sont bloquées au niveau du poste de premier adjoint au maire. La veille même du vote, nous nous sommes quittés autour de  1h du matin et cela, sans consensus. Le lendemain matin, la situation s’est davantage figée parce qu’il y a eu d’autres considérations. Mais dans tous les cas, les deux partis politiques étaient dans l’esprit du protocole. A notre niveau, nous n’avions pas envisagé de présenter de candidature. Mais il se trouve que nos militants nous avaient dit que si d’aventure il y avait deux candidats du MPP, nous ne devrions plus nous sentir obligés par  la convention de soutenir le parti. Si le MPP sortais un seul candidat, il n’y aurait pas eu de problème. Dans la mesure où ils ne sont pas arrivés dans leur camp à imposer un seul candidat, ils ne pouvaient pas obliger nos militants à s’allier derrière eux. De plus, le candidat du MPP qui semblait avoir le plus de conseillers avec lui ne faisait pas l’unanimité au sein du parti et pour beaucoup, on ne peut pas confier la mairie à quelqu’un qui ne sait ni lire ni écrire en français. Voilà pourquoi lorsque celui-ci a présenté sa candidature, nous avons également présenté la nôtre.

 

Pourtant, le ministre Soulama, lors de la dernière rencontre à laquelle il a pris part avant l’élection du maire, vous a formellement défendu de présenter un candidat avant de s’absenter du pays ?

 

Lorsque le ministre était là, il était question de respecter le protocole. Il disait que l’urgence n’était pas à la présentation de candidature et qu’il fallait rester dans l’esprit du protocole. Il avait eu vent que plusieurs tractations se passaient en interne pour désigner le candidat et qu’il y avait une opposition. Il y avait plusieurs camps au sein du parti et selon les informations que le ministre avait, l’ambiance n’était pas bonne. Lorsqu’il est venu, il a souhaité que l’on puisse surseoir à tout cela et que l’on puisse travailler dans le cadre du protocole. Mais plus le temps avançait, plus les gens avaient besoin de savoir ce qu’il fallait faire. On se demandait comment les choses allaient se passer avec la situation qui prévalait au MPP. Dans un tel contexte, si vous ne vous préparez pas, les dernières peuvent être très difficiles. Alors à un moment donné, les militants étaient obligés de s’organiser pour arriver à une situation qui puisse permettre de préserver la cohésion. En tout, jusqu’à ce qu’il parte en mission, il ne nous a pas signifié une position claire. Donc les conseillers et les militants à la base ont pris leur responsabilité pour qu’on ait les résultats que vous savez.

 

Quelque chose vous a-t-il dit dans la salle qu’en présentant votre candidat il allait passer ?

 

Effectivement lorsque nous sommes arrivés dans la salle, nous avons constaté qu’il y avait des blocs. Chacun des potentiels candidats était aux côtés de ses conseillers. Nous avons vu à travers cette configuration du MPP que le rapport de force n’était pas en  leur faveur. Au lieu de 18 que le MPP officiel avait, ils se sont retrouvés avec 14 conseillers, donc plus diminué qu’avant le jour du vote. Les concertations se sont donc poursuivies dans la salle et les conseillers du MPP se sont ravisés que le rapport de force était en leur défaveur et qu’il était mieux pour eux de nous soutenir afin d’éviter que le poste de maire n’échoie entre les mains des dissidents. C’est donc ainsi que se sont passées les choses avec l’accord du MPP et dans l’esprit du protocole parce que nous avons laissé le poste de premier adjoint au MPP.

 

Il semble que ce qui s’est passé à Niangoloko où les conseillers du MPP se sont réparti les postes sans vous consulter, a guidé votre choix.

 

Il faut dire que la situation de Niangoloko et celle de Banfora se présentaient différemment. A Niangoloko le MPP était largement majoritaire et il est vrai qu’il aurait pu nous faire un clin d’œil. Mais le problème est qu’au niveau du MPP il y a une attitude un peu hautaine dans les négociations. Quand on est en position de faiblesse, on doit être humble, modeste. Sur le terrain, nous savions que la situation était défavorable. Leur concurrent interne voyait ses rangs grossir de jour en jour. La preuve est qu’il a été élu lors des primaires avec 20 conseillers et que le jour du vote du maire, il a totalisé 25 conseillers du MPP avec lui. Donc au fil du temps, le rapport de force devenait défavorable pour le MPP et quand c’est comme ça, on doit être humble et modeste. Mais au lieu de cela si on est exigent, ça pose un certain nombre de problèmes, sans oublier que nous aussi avions des difficultés. C’est donc dire que ce n’est pas la situation de Niangoloko qui a joué mais c’est plutôt des questions internes, un rapport de force et un contexte de négociation.

 

Etes-vous confiant quant à la bonne marche du Conseil municipal dans la mesure où votre parti n’est pas majoritaire ?

 

Nous sommes confiant parce que nous pensons que nous avons quand même sauvé l’esprit du protocole en donnant le poste de premier adjoint et de président de la commission chargée du foncier au MPP et en donnant le poste de la commission financière à la NAFA. Donc, dans le bureau du Conseil municipal, il n’y a pas que le NTD. Il y a ses alliés de la mouvance présidentielle et  même de l’opposition. En tenant compte de cela, on se dit que compte tenu des intérêts que nous avons à défendre pour repositionner la ville de Banfora, je pense que ça ne devrait pas poser de problème.

 

Comment votre bureau national a-t-il réagi lorsqu’’il a appris que vous avez remporté la mairie de Banfora ?

 

J’avoue qu’il y avait un membre du bureau exécutif national qui était là pour veiller avec nous au respect de l’esprit du protocole qu’il y a entre le MPP et nous. En tout cas nous avons reçu les félicitations du BEN en attendant bien sûr que les rapports lui parviennent sur la situation.

 

Quelles lecture faites-vous des incidents qui ont émaillé l’élection des maires dans certaines localités du Burkina ?

 

Je pense que c’est déplorable parce que les gens ne comprennent souvent pas. Quand on parle de démocratie, certaines populations ne comprennent pas toujours l’esprit qui doit prévaloir. Lorsqu’on bloque des voies pour que des conseillers ne puissent pas se rendre dans une salle, c’est anti-démocratique. Lorsqu’on sort des machettes et des couteaux pour frapper des gens, c’est anti-démocratique, tout comme lorsqu’on sort de l’argent parfois même des millions comme c’était le cas dans le contexte de Banfora pour acheter des voix, c’est anti-démocratique. Ce sont tous ces travers qui ont eu pour corolaire les violences qui ont pu survenir. Je pense que c’est déplorable et que nous sommes toujours dans un processus d’apprentissage et que c’est sûr que cette fois, les conseils municipaux seront encore plus riches et que dans 5 ans, les difficultés que nous avons vécu vont s’estomper pour qu’on ait un meilleur ancrage démocratique au Burkina.

 

Interview réalisée par Mamoudou TRAORE

 

 


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