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BEDIE DANS LA COURSE POUR LA PRESIDENTIELLE


Le 20 juin dernier, les cadres du PDCI (Parti démocratique de Côte-d’Ivoire), par l’entremise du plus jeune des délégués départementaux du parti, Christian Lahori Tchel Bi pour ne pas le nommer, ont demandé avec insistance, à Henri Konan Bédié, de faire acte de candidature à la convention de désignation du candidat du parti à l’élection du 31 octobre 2020. En réponse, l’ancien président a accepté cette demande en ces termes : «  Je reçois cette demande de candidature comme une mission de salut public découlant d’une attente forte de la base, m’imposant ainsi l’obligation d’être candidat ». Les choses sont désormais claires. Sauf tremblement de terre ou retournement de dernière minute, on comptera Henri Konan Bédié parmi les partants pour la présidentielle de 2020 et cela, sous la bannière du plus vieux parti politique de Côte-d’Ivoire. Le faux suspense est donc désormais terminé. Dès lors, on peut commencer à produire les tee-shirts et autres gadgets de campagne à l’effigie du Sphinx puisque les jeunes loups du parti qui étaient censés faire barrage au retour du vieillard, se sont au finish dégonflés comme un ballon de baudruche.

On peut avoir l’impression que l’homme a agi beaucoup plus par revanchisme

Mieux, ils ont juré devant Dieu et les hommes d’assurer la victoire de leur mentor à la présidentielle de 2020. Bref, le PDCI ou du moins ce qui qu’il en reste puisque bien de ses cadres et pas des moindres, ont déposé armes et bagages au RHDP (Rassemblement des Houphouëtistes pour la démocratie et la paix), a supplié le Sphinx de Daoukro de défendre ses couleurs. Et ce dernier a accepté la mission. Cela, a priori, ne pose pas problème. Le problème se pose quand Bédié s’évertue à présenter son acceptation comme « un don de sa personne » au parti et  in fine  à la Côte-d’Ivoire. En effet, à l’analyse, on peut avoir l’impression que l’homme a agi beaucoup plus par revanchisme que par le souci d’apporter une plus-value à la gouvernance de Ouattara. En effet, depuis 1999, année au cours de laquelle il a été délogé du palais de Cocody, Bédié n’a jamais dissimulé tout le mal qu’il pense de ce coup de force. Et il est convaincu que le temps travaille à lui donner raison. L’heure est donc venue, pour lui, peut-on dire, de reprendre le pouvoir pour signifier à ces putschistes que le peuple ivoirien a encore besoin de lui et que le coup d’Etat qui l’a emporté en 1999, n’avait aucune légitimité. Revenir donc aux affaires en 2020 serait, pour lui, une façon de « se rendre justice ». Ce bout de phrase est un extrait d’un entretien qu’il a eu avec notre confrère « Jeune-Afrique ». Le deuxième argument allant dans le sens de sa posture de revanchard, est lié à la présidentielle de 2020. En effet, à tort ou à raison, l’homme a toujours martelé à qui veut l’entendre, qu’il aurait dû être au second tour de ce scrutin. Pour lui donc, c’est injustement qu’il a été éliminé en faveur de l’actuel président. Depuis lors, il n’a jamais digéré cela. Le troisième et dernier argument qui soutient la thèse de la revanche est lié au fait que Bédié considère que son ancien allié, Alassane Ouattara, n’a pas respecté les engagements qu’il avait pris envers lui dans le cadre de l’appel de Daoukro.

Bédié n’a jamais envisagé une vie hors du palais de Cocody

Ce sont ces trois raisons essentiellement qui tendent les ressorts de revanche du Sphinx de Daoukro. Certes, le principal concerné dit que cela ne s’apparente pas à de la vengeance mais l’on peut dire que c’est tout comme. En effet, les pages les plus sombres de l’histoire politique de la Côte d’Ivoire, ont été écrites respectivement par Henri Konan Bédié, Laurent Gbagbo et dans une certaine mesure Alassane Ouattara. Depuis le décès du vieux Houphouët, ce sont ces trois personnalités qui se disputent dangereusement la scène politique ivoirienne. Et pour eux, tout est bon soit pour conquérir ou reconquérir, soit pour conserver le pouvoir. Pour le Sphinx de Daoukro, en particulier, on peut avoir l’impression qu’il n’a jamais envisagé une vie hors du palais de Cocody. Sinon, comment expliquer qu’à l’âge de 86 ans bien sonnés, il soit encore habité par le désir ardent de reconquérir le Palais de Cocody ? Rien que le caractère énergivore du pouvoir devrait l’en dissuader. Et puis, les défis qui étaient ceux de la Côte-d’Ivoire en 1999, ne sont pas forcément d’actualité aujourd’hui. La Constitution lui donne certes le droit de se présenter à la présidentielle mais, moralement, on peut lui faire le reproche de n’avoir pas travaillé à assurer la relève politique dans son parti. Et ce défaut a un nom : l’égoïsme. Houphouët avait travaillé à faire de lui son dauphin. Et c’est ce statut qui lui avait servi de marchepied pour accéder au palais de Cocody. A son tour, Bédié a travaillé à faire le vide autour de lui de façon à se rendre indispensable au sein du PDCI. En tout cas, on peut se demander ce qu’il peut encore apporter à la Côte-d’Ivoire qu’il n’a pas pu faire pendant son premier séjour au Palais de Cocody. En réalité, la Côte d’Ivoire a tout donné à Henri Konan Bédié. Et de toutes les personnalités politiques encore en vie, il est la personne la plus gâtée. De ce point de vue, il devrait faire valoir ses droits à la retraite pour jouer le rôle de sage au bénéfice de toute la Côte d’Ivoire. Le moins que l’on puisse dire, c’est que sa candidature à la présidentielle de 2020 est un baroud d’honneur qui risque de coûter cher à la Côte d’Ivoire. Et cela, qu’il réussisse à reconquérir le pouvoir ou pas. S’il réussit, on peut s’attendre à un retour de  l’ivoirité  et de la guéguerre Bédié-Ouattara. S’il échoue, il pourrait être tenté de dresser un bûcher pour brûler la Côte-d’Ivoire.

« Le pays »


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