HomeA la uneCHRISTOPHE DABIRE 1 : Neuf départs, huit arrivées

CHRISTOPHE DABIRE 1 : Neuf départs, huit arrivées


Ça y est ! Le gouvernement Christophe Dabiré 1 est tombé dans l’après-midi d’hier 24 janvier 2019. Plus d’une heure après leur nomination rendue publique, les ministres étaient conviés au palais de Kosyam pour une prise de contact. Composé  de 32 membres dont 7 femmes, le gouvernement Christophe Dabiré 1 a enregistré 9 départs et 8 nouvelles arrivées.  Contrairement au gouvernement précédent  qui n’a connu qu’un seul ministère d’Etat, celui entrant compte deux ministères d’Etat.  Il s’agit du ministère d’Etat chargé de la Défense nationale et des anciens combattants  et du ministère d’Etat chargé de l’Administration du territoire, de la décentralisation et de la cohésion sociale. Une heure après la prise de contact, le gouvernement était au complet avec le président du Faso, Roch Marc Kaboré, pour la photo de  famille. A l’issue de cet exercice, le chef du gouvernement a fait une déclaration à l’issue de laquelle la presse a été autorisée à lui poser trois questions. Voici en intégralité la déclaration du chef du gouvernement et les trois questions auxquelles il a répondu.

 

Déclaration du Premier ministre, Christophe Joseph Marie Dabiré,

 

« Je voudrais saisir l’opportunité qui m’est offerte pour adresser à Son Excellence Monsieur le président du Faso les remerciements de l’ensemble du gouvernement qui vient d’être constitué. Il nous a fait confiance, dans un contexte extrêmement difficile traversé par notre pays. Mais les hommes et les femmes que vous voyez ont accepté la responsabilité qu’il leur a été confiée.  Nous nous sommes engagés tout à l’heure avec lui à travailler pour obtenir des résultats et faire en sorte que les difficultés dans lesquelles notre pays se trouve,  puissent reculer le plus possible et que très rapidement,  nous retrouvions la sérénité, la stabilité et que nous puissions relancer notre économie. Le gouvernement que Son Excellence Monsieur le président du Faso  a formé est constitué de 32 membres.  Il y a, par rapport à l’ancien gouvernement, 9 départs et 8 nouvelles arrivées. Au niveau de la constitution genre, il y a 7 femmes dans  le gouvernement. Il est vrai que  lors de son discours de fin d’année, le président du Faso avait décidé de travailler pour qu’on ait au moins 30% de femmes dans le nouveau gouvernement qu’il allait former à l’issue des festivités de fin d’année. Nous n’avons sans doute pas atteint ce nombre mais nous sommes en train de travailler à faire en sorte que dans un délai très rapproché,  cet engagement puisse être respecté, parce que le chef de l’Etat estime que les femmes ont une très grande contribution à apporter à la prise de décisions au niveau de notre pays.  En ce qui concerne les innovations, nous avons créé deux ministères d’Etat. Un ministère d’Etat chargé de la Défense nationale et des anciens combattants  et un ministère d’Etat chargé de l’Administration du territoire, de la décentralisation et de la cohésion sociale. Ces deux ministères ont été érigés au rang de ministères d’Etat  du fait que le contexte sécuritaire est extrêmement difficile. Au niveau du ministère de la Défense nationale et des anciens combattants, le premier responsable  doit être mis en avant pour pouvoir assurer  la sérénité au sein des Forces de défense et de sécurité de notre pays. Au niveau du ministère de l’Administration du territoire, de la décentralisation et de la cohésion sociale,  le chef de l’Etat a estimé que la cohésion sociale fait partie désormais des grandes priorités qu’il faut assumer au niveau du pays. La cohésion sociale est le socle sur lequel devraient se bâtir toutes les actions de développement que nous devrons entreprendre. C’est pourquoi il a estimé que le ministre chargé de l’administration du territoire et de la décentralisation qui assure la couverture de l’ensemble du pays à travers les gouverneurs, les préfets, les hauts-commissaires  et les maires, est le département le plus décentralisé qui peut permettre de faire un travail de sensibilisation des populations pour éviter les difficultés que nous avons rencontrées  ces derniers temps  au niveau de la cohésion sociale.  Une des nouvelles innovations  apportées dans ce nouveau gouvernement est la valorisation,  la promotion des langues nationales. Parce que, si nous faisons de l’alphabétisation, il  faut que les langues nationales soient effectivement valorisées et promues au niveau de nos différentes écoles.  C’est pourquoi le chef de l’Etat a estimé que le ministère chargé de  l’éducation nationale et de l’alphabétisation devait porter ce challenge qui doit contribuer effectivement  à renforcer la cohésion sociale  au niveau  du pays. Une des innovations également apportées  à la constitution de ce gouvernement est de travailler à faire en sorte que le ministère chargé de l’économie, des finances  et du développement soit  un ministère porteur de développement, de manière à ce que toutes les actions qui seront prises pour mobiliser les ressources financières, puissent contribuer à développer le pays  et faire en sorte que nous puissions mettre en œuvre les grands projets en cours devant contribuer  à la réalisation du référentiel de développement du pays,  à savoir le Plan national de développement économique et social (PNDES),  et à la réalisation des engagements que lui-même a pris avec le peuple burkinabè.  Je crois que nous nous sommes tous engagés à faire en sorte que  notre peuple prenne conscience de la volonté du président du Faso  d’aller vers la satisfaction de ces grandes préoccupations  et, qu’ensemble,  nous puissions connaître un avenir radieux  et combattre les maux que nous connaissons,   à savoir l’effritement de la cohésion sociale, l’insécurité que nous rencontrons aujourd’hui. Le chef de l’Etat a aussi instruit le gouvernement de travailler très fortement  à mettre en place les éléments  qui pourraient nous permettre  d’aller très rapidement à la réconciliation nationale parce qu’il tient à ce qu’à la fin de son premier mandat, cette question soit résolue, car tout ce qui se passe aujourd’hui  au niveau de la justice doit être accéléré dans le sens de rétablir la vérité sur un certain nombre de questions, de rétablir la mise en œuvre des actions  qui devraient permettre d’apaiser les cœurs et de faire en sorte que nous puissions, au niveau politique, nous retrouver autour d’une même table pour réaliser cette réconciliation nationale qui est un facteur de développement pour l’ensemble de notre pays.  Avant on avait un ministère de la Justice, des droits humains, de la promotion civique Garde des Sceaux. La promotion des droits humains et la promotion civique sont des aspects importants. J’ai suggéré au chef de l’Etat qui a accepté que l’on sépare la Justice des questions des droits humains et de la promotion civique. Le ministre Garde des Sceaux va mettre le focus sur les grands dossiers parce que le solutionnement de ces questions permettra à apaiser les cœurs, donc à renforcer davantage notre volonté d’aller vers le dialogue social et le dialogue politique. Ce qui va nous permettre d’engager de façon efficace la réconciliation. De l’autre côté, la promotion des Droits humains et la promotion civique contribueront à sensibiliser les gens et à montrer notre volonté de rester dans le sillage de toutes les questions internationales liées aux droits humains et à la justice. Dans le précédent gouvernement, nous avions des secrétaires d’Etat. Nous avons estimé que pour consolider l’action gouvernementale, il était mieux que les secrétaires d’Etat soient érigés au niveau des ministres délégués parce que les ministres délégués participent aux conseils et entendent les orientations définies, les instructions données par le chef de l’Etat. Cela renforce la cohésion au niveau de l’action gouvernementale. Je prends l’engagement avec mon gouvernement de donner le meilleur de moi pour que les préoccupations puissent trouver non pas des solutions, mais des débuts de solutions qui satisfassent tout le monde. Je vous remercie. »

Propos recueillis et retranscrits par Françoise DEMBELE et Colette DRABO

 

 

 

Trois questions au Premier ministre Christophe  Joseph Marie Dabiré

 

Quelles mesures à prendre dans les premières heures pour trouver des solutions aux difficultés ?

 

Le premier conseil que nous venons d’avoir a jeté les bases de l’organisation du travail. Nous allons très rapidement rentrer dans les dossiers et voir quelles sont les dispositions qu’il faut prendre aux différentes préoccupations. En ce qui concerne le dialogue social, il est clair qu’aujourd’hui, nous devons rapidement convier les partenaires sociaux à s’asseoir autour d’une table pour que l’on puisse discuter de leurs préoccupations. Il y a un certain nombre de ministères qui sont concernés par le dialogue social et nous pensons que le travail qui a été fait par le gouvernement de Paul Kaba Thiéba et qui devrait se poursuivre par le gouvernement dont j’ai la responsabilité, devrait permettre d’apporter des réponses précises aux préoccupations des travailleurs et apaiser le front social qui est en ébullition. Il est évident que si nous voulons aller loin, il faudra qu’au niveau du gouvernement, nous prenions des dispositions pour réduire le train de vie de l’Etat. C’est un engagement que le président a pris à la fin de l’année lorsqu’il a prononcé son discours. Nous y travaillons et très rapidement un séminaire gouvernemental va se pencher sur un certain nombre de mesures à prendre pour réduire le train de vie de l’Etat et engager le dialogue social avec les partenaires sociaux dans les différents départements ministériels. Et pour tout ce qui est relatif à la mise en oeuvre des différents programmes, le  Chef de l’Etat a donné des instructions aux ministres pour que toutes les actions qui ont été programmées puissent connaître un début de mise en œuvre. La mobilisation des ressources devrait aller prioritairement à l’exécution des différents programmes. Un dernier point qui a été évoqué par le chef de l’Etat, c’est la restauration de l’autorité de l’Etat. On a l’habitude de dire, restauration de l’autorité de l’Etat, développement de l’incivisme, nous allons prendre des mesures fortes pour que cette question ne continue pas de traumatiser notre peuple. Les lois et les règlements que nous avons même édictés ne connaissent pas d’application parce que les populations ne les connaissent pas. Et quand les populations les connaissent, elles les négligent et les mettent de côté pour faire ce qu’elles veulent. C’est pourquoi, le Chef de l’Etat a dit qu’il faut qu’on travaille à faire en sorte que les mesures soient prises pour faire reculer l’incivisme au Burkina Faso, et faire reculer tout ce qui est relatif à la remise en cause de l’autorité de l’Etat au Burkina Faso.

Vous vous retrouvez à gérer un pays où ça bouillonne de toute part. Avez-vous cette baguette magique qu’il faut parce que les attentes sont énormes ? Et pour la réduction du train de vie de l’Etat, côté salaire, est-ce qu’il y aura certains ministres qui vont continuer à toucher  lourd ?

 

Attendez le séminaire gouvernemental qui va se pencher sur  la réduction du train de vie de l’Etat et vous verrez les mesures que nous allons préconiser parce que chaque ministre est conscient de cette réalité et vous verrez que nous prendrons des décisions qui permettront au peuple d’être apaisé. Pour ce qui concerne ma retraite paisible, j’aimerais bien rester tranquille et jouer avec mes petit-enfants, mais aujourd’hui il n’y a pas d’homme providentiel dans un pays comme le Burkina Faso. Personne ne peut dire qu’il a une baguette magique pour résoudre les problèmes que nous connaissons. Seul le peuple burkinabè lui-même prenant conscience des réalités, décidant de faire en sorte que les textes qui sont adoptés par l’Etat puissent être appliqués, seul ce peuple peut faire face aux différentes réalités que nous vivons aujourd’hui. La lutte contre le terrorisme n’est pas une affaire de gouvernement, ce n’est pas une armée, ce n’est pas une affaire des Forces de défense et de sécurité. C’est une affaire de chacun des Burkinabè. Le terrorisme est inféodé à la criminalité transfrontalière avec tous les trafics qui y sont liés ; les trafics d’organes, d’armes, de cigarettes, de drogues, etc. Ce n’est pas l’Etat qui peut résoudre ces questions parce que tout le monde sait que la drogue passe, mais tant que chacun ne décide pas de mettre fin à cela, ça va être difficile malgré tous les moyens financiers que le gouvernement mettra à la disposition des départements ministériels. Le peuple doit prendre conscience que nous sommes tous embarqués dans un même bateau. Si ce bateau coule, tout le monde coule. Et nous allons travailler à faire de telle sorte que chacun prenne conscience de cette réalité. Dans ce pays, personne ne sanctionne personne. Et quand il y a des effets négatifs quelque part, chacun dit «je ne mange pas chez lui, il n’a qu’à me laisser tranquille », en oubliant que sa liberté s’arrête là où commence celle des autres. C’est pourquoi, nous avons plein d’accidents dans la ville. Lorsque vous brûlez un feu, vous vous dites que vous n’avez rien à cirer pourvu que vous passez même si le feu est rouge, mais vous oubliez qu’il y a quelqu’un qui vient de l’autre côté qui use de son droit de circuler parce que le feu est vert et vous lui rentrer dedans et les effets sont négatifs. Au niveau de la jeunesse, de l’ensemble de la population, des femmes et des hommes, nous allons travailler à créer les conditions de cette prise de conscience par un certain nombre de mesures que nous allons prendre au niveau des séminaires gouvernementaux. Si nous travaillons tous à faire en sorte que le programme du Chef de l’Etat soit effectivement réalisé, on aura réalisé un grand progrès.

Avez-vous une santé d’aplomb pour entamer cette lourde tâche ?

 

C’est une non-question. Votre pays est constitué de jeunes, de femmes, d’enfants et des seniors. Et dans tous les pays du monde les seniors apportent leur contribution au développement quel que soit leur âge. Il suffit de s’organiser,  de faire en sorte que l’expérience des seniors puisse être bénéfique pour les générations futures.  Nous sommes conscients que le glissement générationnel est amorcé. Nous savons que dans un proche avenir, le prochain président du Faso ne sera pas quelqu’un qui aura 70 ou 75 ans comme dans un certains pays. Notre pays a pris conscience que les jeunes constituent la force de frappe, mais il faut donner les moyens à cette jeunesse pour pouvoir faire son travail, de pouvoir participer à la décision, pour que les seniors puissent leur laisser la place en étant satisfaits d’avoir accompli leur devoir et fait leur travail. Quand j’ai fait les consultations, je n’ai demandé à aucun ministre pressenti quel était son âge. J’ai regardé la constitution de ses capacités. Ce qu’il a déjà apporté au niveau du pays, ce qu’il est prêt à apporter. Le jour venu lorsqu’on sentira qu’il est nécessaire de faire des aménagements, nous le ferons. Il y a 7 femmes dans le nouveau gouvernement. Le Chef de l’Etat, dans sa déclaration de décembre, a dit qu’il s’engage à ce qu’il y ait 30% de femmes dans le prochain gouvernement à constituer. Nous n’avons pas atteint les 30%, nous sommes à 22-24%  mais j’ai pris la responsabilité de lui expliquer que nous devons travailler à faire en sorte que son engagement soit réalisé, mais s’il vous plaît, monsieur le Président, donnez-moi le temps de voir venir parce que nous allons travailler avec des hommes et des femmes qui ont la responsabilité de mettre en œuvre votre programme. Nous allons travailler avec des hommes et des femmes qui ont déjà la main dans la patte. Vous constatez que la configuration du gouvernement n’a pas fondamentalement changé parce que si vous changez fondamentalement la configuration du gouvernement, comme beaucoup l’avaient souhaité, vous allez mettre en place un gouvernement considéré comme étant jeune, mais il prendra un an pour vous mettre en place les structures administratives pour pouvoir travailler. J’ai dit au chef de l’Etat que si nous voulons avoir des résultats concrets par rapport aux référentiels qu’il a définis dans sa campagne et dans le PNDES, il faut dans un premier temps maintenir ma configuration du gouvernement et continuer à demander aux hommes qui sont là de faire le travail avec des moyens qui sont mis à leurs dispositions. Si les Burkinabè veulent qu’on se développe et qu’on aille vite, il faut qu’ils acceptent qu’on fasse de la continuité pour réussir.

Propos recueillis par Françoise DEMBELE et Colette DRABO

 

 


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