HomeA la uneCOMMEMORATION DE L’ABOLITION DE LA TRAITE ET DE L’ESCLAVAGE EN FRANCE : Aller au-delà du devoir de mémoire !

COMMEMORATION DE L’ABOLITION DE LA TRAITE ET DE L’ESCLAVAGE EN FRANCE : Aller au-delà du devoir de mémoire !


La France a commémoré, le dimanche 10 mai dernier, la journée nationale de l’abolition de la traite et de l’esclavage. Il faut dire que la commémoration de cette année a revêtu un cachet particulier, en ce sens que les autorités françaises ont voulu lui donner une dimension internationale, en invitant trois chefs d’Etat africains (Ibrahim Boubacar Keïta du Mali, Macky Sall du Sénégal, et Yayi Boni du Bénin) aux côtés de leurs pairs caribéens. L’occasion a été belle pour le président français, de démontrer aux yeux de ses homologues du continent noir et des Caraïbes, combien il portait bien son surnom « Hollande l’Africain ». Même si beaucoup estiment qu’il aurait dû quitter les sentiers battus des discours pompeux à fortes doses émotionnelles, pour enfin aborder la question de l’esclavage avec plus d’engagement au profit des victimes de cette injustice que l’humanité portera jusqu’à la fin des temps. Pour l’occasion, Hollande l’Africain a inauguré un mémorial considéré jusque- là comme le plus grand monument au monde, sur la traite et l’esclavage. C’est un geste important, pour deux raisons fondamentales. Premièrement, ce mémorial va contribuer à resserrer les liens entre les descendants d’esclaves et leur continent-mère, l’Afrique. Ce mémorial va permettre aux Caribéens d’assumer désormais sans honte leur statut de descendants d’esclaves d’Afrique, parce que ce centre va permettre de rétablir une vérité historique et surtout de situer les responsabilités de chacun des acteurs sur cette tragédie humaine. La deuxième raison qui fonde l’intérêt de ce geste du gouvernement français, tient au fait que ce mémorial doit permettre à l’humanité de garder en mémoire les horreurs de cet épisode honteux de notre histoire, afin que plus jamais, de telles bêtises ne se reproduisent.

Le devoir de mémoire n’est pas incompatible avec la justice

Cela dit, beaucoup d’actes restent encore à poser, autant pour consoler les victimes que pour soulager la conscience des bourreaux d’hier. Et le principal geste à accomplir dans ce sens est la réparation du préjudice moral, économique et social que le continent noir a subi. C’est un préjudice sans commune mesure. Un préjudice que rien au monde, pas même les « mea-culpa » de la France répétés à longueur de discours par François Hollande, ne pourront en réalité dédommager. Eh oui, il faut bien parler de réparation malgré tout. Car, tout commence par là. C’est aussi par là que passera la justice. Maintenant que les coupables ont reconnu que la traite et l’esclavage constituent un crime contre l’humanité, maintenant qu’ils ont reconnu leur responsabilité dans ce crime contre l’humanité, l’étape suivante devrait être, en toute logique, la réparation. Et que l’on ne se méprenne pas. Il n’y a dans cette exigence des Africains, ni haine, ni esprit revanchard. Il s’agit tout simplement de justice. Et même s’il est vrai que sur la question de l’esclavage, l’attitude de la France a beaucoup évolué, notamment à travers la loi Taubira qui reconnaît que l’esclavage est un crime contre l’humanité, cela ne devrait pas occulter, pour la France, le devoir de rendre justice. Du reste, le devoir de mémoire n’est pas incompatible avec la justice. Bien au contraire, après la loi Christiane Taubira, le pays de la liberté et des droits de l’Homme devrait avoir le courage de défendre auprès des autres pays occidentaux, la thèse de la réparation. Oui, l’Afrique et ses fils, où qu’ils soient dans le monde, ont droit à cette réparation. Cela est d’autant juste que sa situation économique et même sociale est en grande partie, directement liée à la traite et à la déportation de ses fils valides. En attendant cette réparation, la France et tous les pays ex-négriers devraient commencer à arrêter de se servir de certains dictateurs sur le continent pour perpétuer leur domination sur les peuples d’Afrique. Car, c’est là aussi une traite qui ne dit pas son nom.

Dieudonné MAKIENI


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