CONSEIL SUPERIUR DE LA COMMUNICATION : La loi organique modifiée, le SG désormais nommé en Conseil des ministres
Hier 22 mars 2018, l’Assemblée nationale a examiné le rapport n°2018-04 de la CAGIDH du 19 mars 2018 relatif au projet de loi organique portant modification de la loi organique n°015-2013 du 14 mai 2013 portant attributions, composition, organisation et fonctionnement du Conseil supérieur de la communication (CSC). Les principales innovations du projet de loi sont relatives à l’irrévocabilité du mandat des conseillers et à l’organisation de l’institution. Le président de l’Assemblée nationale, Alassane Bala Sakandé, a dirigé la plénière au cours de laquelle le projet de loi a été adopté par 79 voix sur 115 votants.
D’après le député Joseph Sama, rapporteur de la Commission des affaires générales, institutionnelles et des droits humains (CAGIDH) présidée par le député Maxime Koné, le CSC traverse une grave crise de gouvernance qui ébranle ses fondements et érode sa crédibilité. Une crise qui s’est accentuée, à l’entendre, par la mise sous mandat de dépôt de sa présidente. Pour renforcer l’indépendance et la crédibilité de l’institution, « une des institutions les plus importantes de notre système démocratique », en la mettant à l’abri des « turpitudes humaines », explique le rapporteur de la CAGIDH, le gouvernement a jugé nécessaire de procéder à la modification de la loi et de revoir la composition du CSC, précisant que la loi n°015-2013/AN du 14 mai 2013 portant attributions, composition, organisation et fonctionnement du CSC contient très peu de dispositions sur son organisation administrative ; ce qui accroît, selon lui, de façon disproportionnée les prérogatives de son président. Il apparaît, de son point de vue, une confusion entre le cabinet du président et le secrétariat général de l’institution, quand on analyse l’article 40 de la loi. Pour faire la distinction entre ce cabinet et le secrétariat général, le projet de loi prévoit la création d’un secrétariat général placé sous l’autorité du président et sous la responsabilité d’un secrétaire général nommé en Conseil des ministres. Un secrétariat qui disposera d’attributions spécifiques afin d’assumer les missions classiques d’un secrétariat d’institution. Il sera donné au président du CSC, la possibilité de déléguer son pouvoir d’ordonnateur au Secrétaire général. Une disposition transitoire est introduite à l’effet de mettre fin au mandat en cours des conseillers et garantir le fonctionnement du CSC jusqu’à la prestation de serment des nouveaux conseillers, selon le rapport. Pour les parlementaires qui suspectent une « chasse aux sorcières », le ministre de la Communication et des relations avec le Parlement, Rémis Fulgance Dandjinou, présent à la plénière, a fait comprendre qu’il n’en est rien et que le gouvernement recherche la régularité, vu que le CSC fonctionne dans l’illégalité ou du moins ne fonctionne pas, dans la mesure où il n’assure pas, à son avis, son rôle de contrôle des informations, des émissions interactives dont certaines seraient le lieu d’injures, selon lui. Face aux députés abstentionnistes qui n’ont pas approuvé le projet de loi à cause des failles qu’il comporte, le président de l’Assemblée nationale, Alassane Bala Sakandé, a estimé qu’il faut avancer et c’est dans l’exécution qu’on découvre les failles. « Il faut avancer et revoir au mieux ce qui ne va pas », a-t-il confié. Selon le président Maxime Koné, le projet de loi adopté par 79 voix sur les 115 votants, ne résout pas à lui seul tous les problèmes, mais l’essentiel, c’est d’avoir une base juridique sur laquelle l’on peut se fonder pour prendre, à l’avenir, un certain nombre de mesures pour résoudre les problèmes de dysfonctionnement du CSC.
L’irrévocabilité du mandat des conseillers, une garantie indispensable à l’exercice de leur mission
La disposition sur l’irrévocabilité du mandat des membres du CSC, énoncée dans l’article 31 alinéa 1 de la loi organique n°015 du 14 mai 2013, à savoir que « le mandat des membres du CSC est de cinq ans non renouvelable », apparaît beaucoup plus clairement dans l’article 37, selon le rapporteur de la CAGIDH. Cet article mentionne que « le mandat des membres du CSC est irrévocable sauf cas d’empêchement constaté par le Conseil constitutionnel. Toutefois, en cas d’atteinte ou de manquement grave dans l’exercice de leur fonction, constaté par le Conseil constitutionnel, les membres du CSC peuvent faire l’objet de suspension ou de révocation ». Une disposition de nul effet, pour avoir été déclarée non conforme à la Constitution par le Conseil constitutionnel, d’après le rapport de la CAGIDH qui a estimé qu’en l’état actuel du droit positif, on peut affirmer, par interprétation a contrario, que le mandat des membres du CSC est révocable « ad nutum », à tout moment. L’irrévocabilité du mandat est pourtant aux yeux de la Commission (la CAGIDH) un principe juridique qui fait partie des garanties fondamentales accordées aux membres de certaines institutions qualifiées d’Autorités administratives indépendantes (AAI). Une garantie indispensable pour assurer une certaine indépendance des membres dans l’exercice de leurs missions dans les AAI, selon la commission qui a estimé qu’il est nécessaire, dans le cas du CSC, de réaffirmer le principe essentiel de garantie de l’indépendance des AAI en l’assortissant d’exceptions et en établissant une distinction entre les causes d’exclusion et les causes de suspension. Avec 48 absents excusés, 37 procurations, le projet de loi a été adopté par 79 voix sur les 115 votants à l’Assemblée nationale, avec 36 abstentions.
Lonsani SANOGO