HomeA la uneCONTESTATIONS AU MAROC : Attention au syndrome tunisien  

CONTESTATIONS AU MAROC : Attention au syndrome tunisien  


 

Toc, toc ! La vague de la contestation partie des rues d’Al-Hoceïma, il y a sept mois, est aux portes du palais royal. En effet, le 11 juin, c’est une marée humaine qui a envahi la principale rue de la capitale Rabat, l’avenue Mohamed VI, du nom de l’actuel souverain marocain, pour exprimer sa solidarité avec le Rif. Le cortège qui s’étendait sur près d’un kilomètre aurait mobilisé un million de manifestants selon les organisateurs du rassemblement, et entre 12 000 et 15 000 personnes selon les forces de l’ordre, est plutôt du genre exceptionnel dans la capitale marocaine. Ce qui a fait dire à certains analystes qu’il s’agit d’une ‘’marche historique’’. Alors, pas besoin de dire que cette manifestation monstre doit amener le roi à sortir de son palais pour prendre ce problème rifain à bras-le-corps. De fait, si la révolte perdure depuis sept mois pour protester contre la marginalisation et la négligence de la région du Rif, révolte qui s’est exaspérée avec l’arrestation et la détention du principal leader de la contestation, Nasser  Zefzafi, aujourd’hui, elle est en train de prendre des proportions inquiétantes non seulement en touchant le cœur du Royaume, mais aussi avec l’implication des politiques, des activistes de la société civile et surtout des islamistes.

Pour l’heure, la contestation populaire porte sur l’emprisonnement de Zefzafi, la détention préventive d’une trentaine de personnes pour atteinte à la sécurité intérieure, et les mauvaises conditions de vie des populations rifaines, en majorité berbères. Mais, à l’allure où vont les choses, il faut craindre que le mouvement ne se durcisse en revendications indépendantistes et en une floraison de revendications tous azimuts. Il est vrai que le Rif est peu enthousiaste à tisser des couronnes de fleurs à la monarchie chérifienne. Tout compte fait, le roi Mohamed VI doit se rendre à l’évidence que la crise a atteint un degré qui doit l’amener à s’investir personnellement. A partir du moment où les rues d’Al-Hoceïma, capitale de la région du Rif, ne cessent de gronder depuis plus de deux semaines, et que la classe politique conteste la posture de la fermeté adoptée par le gouvernement.

Le crachin peut se transformer en orage

Certes, le Maroc n’a pas été sérieusement touché par le printemps arabe qui a fait chuter de nombreux régimes, mais pour avoir de peu connu quelques effets domino, il doit être suffisamment averti pour savoir que c’est souvent de ce type de contestations qui ont débuté au Rif que naissent les révolutions. Quand on sait qu’un crachin peut se transformer en orage, le roi Mohamed VI doit agir avec doigté afin d’éviter que le syndrome tunisien qui a emporté le régime de Ben Ali ne gagne véritablement le Royaume. Les difficultés socioéconomiques de la région posées par les populations étant réelles, il n’y a pas d’autres alternatives à cette escalade que de chercher à les résoudre. Déclarant lui-même que son règne est axé sur la lutte contre la pauvreté, il devrait prendre les devants pour sortir cette région du Nord de son état de précarité. Il y va de la grandeur de ce pays qui sait être généreux envers les autres Etats africains. Il n’est donc pas acceptable que le Maroc dont l’économie est plutôt florissante, ait comme talon d’Achille, les inégalités sociales. En tous les cas, le roi n’a pas d’autre choix que d’écouter ses sujets, pardon son peuple.

Drissa TRAORE


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