HomeA la uneCOP 15 BIODIVERSITE  : Que peut en attendre l’Afrique ?  

COP 15 BIODIVERSITE  : Que peut en attendre l’Afrique ?  


Il s’est ouvert le 7 décembre dernier et ce, après un report de près de 2 ans en raison de la pandémie de la COVID 19,  à Montréal, au Canada, la conférence des Nations unies sur la biodiversité, la COP 15. L’objectif des 200 délégations nationales pendant les deux semaines que dureront les échanges, est d’aboutir à un accord international avec des engagements concrets d’ici à 2030 pour protéger la nature. En attendant de voir si la conférence tiendra ses promesses, l’on ne peut que saluer la tenue de cette rencontre qui traduit la prise de conscience de l’humanité quant à la dégradation accélérée des ressources de la planète du fait des modes de production et de consommation de l’homme  et des conséquences néfastes qui en résultent. Les chiffres, en effet, montrent toute l’urgence qu’il y a à agir. 69% des populations vertébrées ont disparu en 50 ans et trois quarts des écosystèmes de la surface terrestre, ont déjà été dégradés par les activités humaines, alors qu’ils sont à la base de nos économies, de notre alimentation, de l’eau que l’on boit ou encore de notre santé.

 

L’Afrique semble assister impuissante à la dégradation accélérée de son écosystème

 

 

Et c’est bien cette guerre de l’Homme contre la nature, qu’a dénoncée le Secrétaire général de l’ONU, Antonio Gutteres, lors de la cérémonie d’ouverture de la conférence: « Avec notre appétit sans limite, pour une croissance économique incontrôlée et inégale, l’humanité est devenue une arme d’extinction massive. Nous traitons la nature comme s’il s’agissait de toilettes. Et nous nous suicidons par procuration. Car, la perte de la biodiversité s’accompagne d’un coût humain extrêmement fort. Un coût que nous mesurons en voyant les emplois perdus, la faim et les morts. » L’Afrique, en particulier, n’est pas en marge de cette « guerre d’extinction massive » des espèces naturelles. Certes, le continent reste l’une des principales réserves vitales de la biodiversité avec  les poumons verts que constituent  les forêts primaires dans le bassin du Congo ou les parcs floraux et faunistiques  de Madagascar.  Mais, malgré ce riche potentiel qui en fait un trésor de biodiversité, l’Afrique semble assister impuissante à la dégradation accélérée de son écosystème du fait de la croissance démographique, des pratiques agricoles extensives, de  l’utilisation des herbicides et pesticides prohibés, de  la boulimie en terres des grandes firmes internationales, des activités d’extraction et d’exportation des ressources minières, de l’urbanisation rapide, du développement des infrastructures et du  trafic illicite d’espèces sauvages.   Face donc à cette dégradation de la biodiversité qui n’épargne aucune partie de la terre avec tous les bouleversements qu’elle entraîne, la COP 15, de l’avis même de ses organisateurs, est une chance à ne rater sous aucun prétexte pour arrêter la folie destructrice de l’homme et pour signer la paix avec la nature. Mais le sommet de Montréal fera-t-il mieux que tous les autres fora mondiaux sur des sujets d’intérêts communs où les nations du monde n’ont réussi qu’à étaler leurs divergences ? L’on peut en douter et pour cause.

 

La protection de la biodiversité est un enjeu de développement

 

D’abord, les ambitions paraissent difficilement conciliables ; d’où l’entame déjà, des discussions préparatoires, assez poussive. En effet, pendant que les plus ambitieux comme l’Union européenne (UE) et les pays intertropicaux à la biodiversité luxuriante, plaident pour un objectif de 30% des terres et des mers protégées d’ici à 2030, l’on imagine aisément que les grands explorateurs agricoles pourraient faire obstruction. Ensuite, l’on sait que la question du financement de la protection de la nature, pourrait déboucher sur des points d’achoppement entre les pays riches  du Nord qui rechignent toujours  à délier les cordons de la bourse et les pays du Sud, dont l’Afrique en particulier, qui espère obtenir de la part de ces pays riches, une forme de garantie financière pour leurs actions de protection et de conservation de la biodiversité,  c’est-à-dire une valeur économique qui puisse être plus forte que les incitations à détruire la biodiversité. Ces divergences risquent de faire donc de la COP 15 un autre mirage pour les Africains surtout,  avec des engagements non tenus, comme ceux de la COP 27 sur le changement climatique où des fonds avaient été mis en place mais n’ont jamais été alimentés.  Cela dit, il serait suicidaire pour le continent africain, d’attendre tout du sommet de Montréal pour les solutions à la dégradation de son écosystème. Et pour cause. La plupart des économies africaines dépendent largement de leurs ressources naturelles telles que les terres agricoles, les forêts, les ressources en eaux, etc. Avec les pertes actuelles d’espèces et des habitats naturels sur le continent, largement imputables à des facteurs humains, mais aussi au changement climatique, les efforts de développement des pays africains pourraient être compromis et la capacité de l’Afrique à se développer de façon durable,  hypothéquée. C’est pourquoi la protection de la biodiversité est un enjeu de développement. Tout en encourageant les efforts déjà réalisés dans la protection de la biodiversité dans divers pays africains comme la création de zones de protection, la sensibilisation des communautés riveraines, la subvention de certains produits comme le gaz pour diminuer la pression sur les ressources forestières, etc., il faut travailler à inverser durablement les tendances actuelles. Et cela passe nécessairement par un changement de mentalité des élites dirigeantes qui doivent comprendre que le développement n’est pas contraire à la préservation de la nature. Cela passe aussi par la prise de conscience des populations qui doivent aussi comprendre l’importance de la biodiversité pour leur développement socio-économique.

 

« Le Pays »


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