HomeA la uneCRISE AU SEIN DE LA COMMUNAUTE MUSULMANE : “Le linge sale se lave en famille”, dixit El Hadj Abdourasmané Sana

CRISE AU SEIN DE LA COMMUNAUTE MUSULMANE : “Le linge sale se lave en famille”, dixit El Hadj Abdourasmané Sana


Dans notre édition du lundi 1er août 2016, nous rendions compte de la conférence de presse que des fidèles musulmans ont animée à propos de la crise au sein de la communauté musulmane. Dès le lendemain, nous avons reçu le droit de réponse que voici, du Conseil national de la communauté musulmane du Burkina Faso, qui estime qu’il n’en est rien. Selon lui, “le linge sale doit se laver en famille”, comme le dit l’adage. Lisez plutôt !

 

Monsieur le directeur de publication, nous vous prions de recevoir notre parfaite reconnaissance en acceptant de publier dans une de vos toutes prochaines éditions, la présente mise au point dont la vocation n’est pas de polémiquer ou de répondre à votre article. Elle veut éclairer et rassurer simplement l’opinion, nos fidèles membres et l’autorité sur la situation dépeinte de façon alarmante comme crise au sein de la Communauté musulmane et qui menacerait la paix sociale depuis treize (13) mois !

Après deux conférences de presse et cette mise au point, nous pensons avoir fait preuve de toute notre disponibilité à résorber définitivement cette incompréhension et nous nous réservons le droit de ne plus nous prêter à ce jeu dans la presse, car nos obligations spirituelles envers nos fidèles et notre responsabilité face à la communauté nationale nous interpellent.

Dans votre livraison N°6153 du lundi 1er août 2016, à la Une et en page 13, vous avez rendu compte d’une conférence de presse dont les animateurs se réclament être, nous citons : « des membres du groupe des membres du comité exécutif et du bureau national ». Une conférence de presse tenue le 30 juillet 2016 à Ouagadougou.

De votre compte rendu, il ressort qu’une crise existerait au sein de la communauté musulmane consécutive à la tenue de son 12e  Congrès ordinaire statutaire à Fada N’Gourma les 5, 6 et 7 juin 2015. Ce congrès, selon les conférenciers, se serait tenu dans des violations flagrantes de textes et de l’éthique. Votre article cite le 3e secrétaire du bureau national de la CMBF qui dit que «tout serait parti du 6e congrès de la Fédération des associations islamiques du Burkina (FAIB) tenu à Fada en juin  2015,  où des fidèles musulmans sont allés en rangs dispersés».

Premièrement : nous vous adressons la présente pour éclairer vos lecteurs ainsi que les membres de la Communauté musulmane du Burkina Faso et plus largement l’opinion nationale et internationale sur cette prétendue crise. Nous ne répondons pas expressément aux conférenciers. Nous estimons que si le faux n’est pas publiquement contesté, il finit par être la vérité !

Deuxièmement : à la lecture de votre compte rendu, vos conférenciers parlent d’un congrès d’une FAIB, ce dont nous ne sommes pas au courant, encore moins des membres de cette Fédération. Il y a certainement une grande confusion flagrante qui est faite entre la CMBF et la FAIB et les événements évoqués que nous tenons à relever.

Troisièmement: s’agissant du « non-respect des textes et de l’éthique », nous avons le devoir moral et historique de préciser que le 12e Congrès statutaire est un congrès ordinaire, convoqué à la régulière, dans le respect strict de nos textes. La cérémonie d’ouverture a été présidée par le Secrétaire général de la Région, représentant monsieur le Gouverneur de la Région de l’Est. Le Ministère de l’Administration Territoriale et de la Sécurité Intérieure (MATDSI) a été représenté par une délégation venue de Ouagadougou à cet effet, dont les sieurs Salfo Kaboré et Hamado Ouédraogo de la Direction des libertés publiques et des affaires juridiques (DLPAJ).

Quatrièmement: de mémoire de la CMBF, un Congrès ordinaire n’a connu auparavant, autant de réussite sur le double plan de la participation effective de toutes les régions et de l’organisation matérielle et la conduite des travaux. Ce Congrès n’a connu, ni violence verbale, ni violence physique, et cela, malgré la volonté affichée de certaines personnes de perturber les travaux avec infiltration de personnes non mandatées et étrangères à notre Communauté. La Direction Régionale de la Police Nationale de la Région de l’Est dispose à ce sujet des informations précieuses sur ces « semeurs de troubles », leurs instigateurs et les intentions formelles qui les avaient conduits sur les lieux du Congrès à Fada N’Gourma. Par ailleurs, nous informons l’opinion que des missions auprès des Comités provinciaux de la CMBF ont été organisées par lesdits contestataires pour leur arracher des pétitions en vue de convoquer un nouveau congrès. Ces missions se sont soldées par des échecs cuisants car nos dignitaires des comités provinciaux leur ont opposé un refus total, une fin de non-recevoir car ils approuvaient tous la tenue et les résultats du 12e congrès de Fada N’Gourma. Nous avons les preuves des écrits confus et sans sens qui ont été ventilés lors de ces missions.

Cinquièmement : conformément à nos statuts, un bureau exécutif permanent consensuel de soixante-dix-sept membres a été mis en place, sans la moindre friction, par acclamation de toutes les délégations provinciales en présence du Grand Imam de Ouagadougou, El Hadj Cheick Aboubacar Kassoum Sana,  et de nos principaux Oulémas dont le Cheick Mahamoud Bandé et un envoyé spécial de Sa Majesté le Mogho Naaba Baongho, notre Président d’honneur. La Fédération des associations islamiques du Burkina (FAIB), dont la CMBF est membre fondateur, y a envoyé une délégation également.

Sixièmement : à l’issue de nos travaux, la délégation du MATDSI qui a suivi les travaux dès le premier jour, ne nous a pas signalé un manquement quelconque dans leur déroulement et, elle a même félicité la Communauté musulmane pour la bonne organisation du Congrès, le bon déroulement des travaux ainsi que les résultats auxquels elle est parvenue  dans une ambiance cordiale et fraternelle.

Septièmement : Parmi ceux qui contestent aujourd’hui la régularité de la convocation et de la tenue du Congrès, El Hadj Ousséini Tapsoba en particulier avait promis à l’actuel président du Bureau exécutif permanent, au cours d’un entretien la veille de l’ouverture des travaux, le 4 juin 2015, qu’il participerait au Congrès. Il n’a pas tenu promesse malgré un rappel, au matin du 5 juin, du Président Sana qui espérait toujours sa venue pour l’ouverture des travaux. Donc, lui comme tous les autres contestataires étaient les bienvenus au Congrès. La preuve, El Hadj Boukaré Compaoré, qui siège sur la table des conférenciers du 30 juillet 2016, était au Congrès, et y a même pris la parole. Curieusement, depuis la fin du Congrès, nous constatons l’existence d’un  groupe qui conteste la régularité de la convocation et de la tenue du 12e Congrès à Fada N’Gourma, alors même que certains étaient audit Congrès comme rappelé ci-dessus. D’ailleurs nous voudrons rappeler aux fidèles musulmans de la CMBF, à l’opinion nationale et particulièrement à l’autorité que ce « groupe de membres… » n’est pas à sa première manifestation en matière de contestation. Le MATDSI et ceux qui ont encore la mémoire fraîche, savent qu’aux 10e et 11e congrès de la CMBF tenus respectivement en 2005 et 2010, le même El Hadj Ousséini Tapsoba a été le meneur d’un groupe pour contester les résultats des congrès sous la présidence de feu président El Hadj Oumarou Kanazoé.

El Hadj Tapsoba le sait bien et beaucoup d’autres personnes le savent également.

Huitièmement : le Congrès a été organisé par le Président intérimaire sortant, El Hadj Adama Sakandé, qui est présent au Burkina Faso et peut toujours témoigner de la régularité de tout le processus d’organisation dudit Congrès. Il est un acteur incontournable et un témoin majeur disponible auquel tout le monde peut recourir pour connaître la vérité.

Neuvièmement : toutes ces personnalités que nous respectons, n’ont jamais été suspendues, à plus forte raison exclues de la CMBF. Nous cherchons vainement l’objet du différend ou de la crise tant évoqué(e) depuis plus de douze (12) mois. Nous attestons que jusqu’à ce jour, nous n’avons pas reçu officiellement un écrit ou tout autre acte formel mettant en cause la régularité du Congrès de Fada. Nous n’avons pas non plus reçu, de façon officielle, une demande d’audience ou de proposition de rencontre sur les conclusions du 12e Congrès de la CMBF.  Nous défions quiconque de nous fournir la preuve du contraire.

Nous constatons que parmi les frères contestataires du 12e Congrès, figurent des membres éminents de la Ligue islamique pour la paix au Faso.  Œuvrer pour la paix au Burkina dans notre contexte, est une noble vocation, surtout quand c’est l’œuvre de frères en islam qui est une religion de tolérance, de pardon et de paix par excellence. Par ailleurs, nous sommes au regret de constater aussi que nous n’avons jamais été contactés, voire approchés directement ou indirectement, par qui que ce soit, pour amorcer le moindre dialogue de résolution de la soi-disant crise, si crise il en existe !

A notre humble avis, un problème bien posé se résout facilement, si la volonté des parties au différend est affirmée et sincère.

Aussi prenons-nous l’opinion à témoin, pour réaffirmer avec force, notre totale disponibilité à dialoguer entre frères dans un cadre approprié, car comme on le dit, le linge sale se lave en famille.

Dixièmement : dans le cadre de la mise en œuvre de son programme d’activités, le Bureau exécutif permanent, mis en place à Fada N’Gourma, depuis juin 2015, tient régulièrement ses instances statutaires aux plans national,  régional et provincial. Ainsi, la toute prochaine réunion mensuelle du Bureau exécutif permanent est convoquée pour le dimanche 7 août 2016 à 9 heures au siège de la CMBF à la Grande Mosquée de Ouagadougou.

Nous insistons ici pour rappeler à tous les fidèles membres de la Communauté musulmane du Burkina Faso, sur toute l’étendue du territoire national, que cette campagne politique par presse interposée ne doit nullement les inquiéter, ni les induire en erreur ou les décourager, car leur bureau exécutif tient à garder la confiance qui lui a été placée au Congrès de Fada N’Gourma. Il réaffirme qu’il n’y a pas crise au sein du Bureau exécutif, ni au sein de la Communauté musulmane. Nous enregistrons seulement une incompréhension avec certains frères dans la dynamique actuelle, dans laquelle s’est engagée résolument la Communauté musulmane du Burkina Faso (CMBF). Mais, à tout moment, les portes de la CMBF leur  restent ouvertes. Nous les appelons à venir afin qu’ensemble, nous conduisions à terme les nombreux projets  au bénéfice de la Oummah islamique du Burkina Faso. Œuvrer pour la Paix est certainement loin d’être de simples mots, c’est beaucoup plus des actes concrets dans le comportement de tous les jours.

Nous ne pourrions sérieusement résoudre un quelconque différend entre frères par voie de presse interposée. Nous prenons encore l’opinion et l’autorité à témoin, et invitons nos frères  au dialogue. Le bureau exécutif permanent s’engage à donner suite à toute initiative formelle dans les soixante-douze heures qui suivent la réception de toute requête allant dans ce sens.

Nous prions Allah le Tout- Puissant de nous guider vers l’accomplissement de notre volonté commune de construire l’unité de la Communauté musulmane du Burkina Faso. Mais une telle œuvre ne se réalise pas sans l’onction d’une inspiration divine, comme nous l’enseigne le verset 11 de la Sourate 11 du Coran, qui dit : « … En vérité, Allah ne modifie point l’état d’un peuple, tant que les individus qui le composent ne modifient pas ce qui est en eux-mêmes... ».

Assalamou aleykoum Warahmatoulahi wa barakatouhou.

Ouagadougou, le 02 août 2016

Pour le Conseil National de la Communauté musulmane du Burkina Faso

Le Président du Bureau Exécutif Permanent

El Hadj Abdourasmané SANA

Chevalier de l’Ordre National

 


Comments
  • Je pense qu’il faut que les autorités aient une « politique musulmane » assez élaborée dans la conduite de l’Etat post colonial qui a du mal à se retrouver parfois quant à la gestion de ses différentes composantes. Trop de tâtonnements, de racolages et d’actions maladroites qui indiquent que les réflexions s conséquentes ne sont pas menées en la matière. Pourtant la population musulmane augmente sensiblement depuis le début de l’indépendance avec une élite arabisante et francophone qui se fait de plus de plus entendre. En 1960 le Burkina comptait environ 20% de musulmans et 60,59 en avril 2006 selon RGP et certainement plus en 2016. Il faut absolument éviter que cette crise qui couve, prévisible après la disparition de Kanazoé n’éclate. Pour se rendre compte de l’ampleur d’une nouvelle situation difficile au sein de la communauté musulmane voir celles qui ont déjà eu lieu dans mes articles scientifiques suivants :
    Issa Cissé « Conflits et médiations au sein de la Ummah du Burkina Faso »
    Année : 2014
    Références: Cyrille B. KONE (éd.) Réconciliation ou reconnaissance ? Essais sur un dynamique d’entente durale, éditions Peter Land, Frankfurt am Main, pp. 207-233, ISBN 978-3-631-65286-2 (Print) E-ISBN 978-3-653-044401-0 (E-Book)
    Issa Cissé « Le Wahhabisme au Burkina Faso : dynamique interne d’un mouvement islamique réformiste »
    Date : juillet 2009
    Références : Cahiers du CERLESHS, presses universitaires de Ouagadougou, n°33, pp.1- 33.

    Issa Cissé « Conflit autour de la grande mosquée de Tougan: un indicateur de progrès de l’islam ? ».
    Date : juin 2009.
    Références : Annales de l’Université de Ouagadougou série A : Lettres, Sciences humaines, vol. 008, presses universitaires de Ouagadougou, pp.115 – 146

    3 août 2016
  • Monsieur CISSE, Vous avez raison, mais si des musulmans entres eux ne s’entendent pas, est-ce un animiste ou un catholique qui se fera écouter? Vous ne connaissez pas encore la religion musulmane. Je pense que c’est les religions qui tâtonnent! Je crois que c’est l’Etat qui devrait faire appel aux hommes de Dieu pour résoudre ses crises, et non l’inverse! Mais les hommes de Dieu fanatisent aveuglement leur religion et, toute honte bue, ils ont trahi à un haut niveau, la vocation religieuse au profit des intérêts tout nus. Vous avez vous-même démontrer que cette augmentation est une conséquence du désordre que connait l’Islam de nos jours. Elle est devenue sectaire, et ses crises sont plutôt un indicateur de regret de l’Islam. Que les musulmans se ressaisissent et prient pour retrouver leur cohésion, plutôt que de descendre si bas pour appeler l’Etat. El Hadj ceci, El hadj cela, c’est tout ce que vous êtes allé apprendre à la Mecque?

    4 août 2016

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