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DAOUDA SIMBORO, MEMBRE DU MBF


Transfuge de l’Union pour le progrès et le changement (UPC), membre fondateur du Mouvement pour le Burkina du futur (MBF) et Directeur général de la Banque agricole du Faso (BADF), Daouda Simboro, puisque c’est de cet homme « affairo-politique » qu’il s’agit, n’est plus à présenter. Présent à Nouna dans le cadre de la 5e édition de la Journée de la solidarité et la Coupe Kossen dont il est le promoteur, l’ex-compagnon politique de Zéphirin Diabré, sans langue de bois, s’est prêté à nos questions. Dans cet entretien, il aborde, entre autres, la santé financière de son institution bancaire, ses rapports avec les acteurs politiques et les populations de la province de la Kossi. Il donne son point de vue sur la situation sécuritaire dans ladite province. M. Simboro revient également sur la performance réalisée par son parti politique lors des échéances électorales de novembre 2020 et laisse voir sa vision de l’avenir de l’action politique au Burkina Faso. Lisez plutôt.

 

Le Pays : la Banque agricole du Faso (BADF) est l’une des benjamines des institutions financières du Burkina Faso. Comment se porte cette banque dont vous êtes le Directeur général ?

 

Daouda Simboro : La Banque agricole du Faso (BADF) est une jeune banque. Nous avons commencé nos activités le 25 février 2019. Un calcul simple nous permet de nous rendre compte que la BADF n’a pas encore 3 ans de service. Mais, je puis vous assurer que la Banque agricole du Faso a une excellente santé. Quand on crée une structure bancaire, c’est pour faire des profits. Notre 1er exercice s’est soldé par un bilan mitigé, mais nous avons redressé la barre dès le second exercice. Notre situation à mi-parcours en ce qui concerne l’année 2021, va au-delà de nos attentes. Nous avons déjà atteint les objectifs budgétaires qui nous ont été fixés pour l’année. Pour situer nos chiffres aujourd’hui, notre résultat intermédiaire se situe au-delà du milliard de F CFA. Ce qui n’était pas prévu budgétairement, nous l’avons déjà réalisé. C’est la preuve que les clients ont commencé à adopter la Banque agricole du Faso. Les entreprises et les grandes sociétés insèrent la BADF dans le paysage. Cet état de fait nous rassure à propos des ambitions que nous nourrissons pour le système économique du Burkina. En clair, la BADF jouit de nos jours d’une excellente santé. Tous les indicateurs sont au vert et l’ensemble du personnel est mobilisé pour poursuivre les objectifs. Quand nous faisons le point mensuellement et qu’il y a des alertes, c’est un sursaut pour l’ensemble du personnel. C’est dire combien ils sont déterminés à réaliser les ambitions qui ont été placées dans la création de la BADF.

 

La situation de la campagne agricole 2021/2022 est préoccupante au regard de nombreux dégâts causés dans des exploitations. Quel pourra être l’accompagnement de la BADF à l’endroit du monde rural ?

 

C’est vrai que c’est une situation qui est assez préoccupante. Vous voyez, ce qui est délicat pour le financement du monde rural, c’est un peu le fait que nous sommes soumis aux aléas climatiques. C’est pourquoi d’ailleurs, la plupart des banques rechignent à financer l’agriculture ou la production agricole. C’est-à-dire que le financement en amont, beaucoup de banques ne s’y aventurent pas. Elles préfèrent attendre que la production soit financée, réalisée avant de se proposer de soutenir la commercialisation. La BADF, à travers sa mission historique, ne peut pas adopter un tel comportement. Elle est obligée de financer en amont, l’activité agricole, d’accompagner aussi en aval et mieux, de financer les chaînes de valeurs de la production agricole, c’est-à-dire la transformation, le transport, la collecte, la commercialisation. Donc, si la campagne agricole est mauvaise, cela veut dire que nous avons financé des activités qui sont liées à la pluviométrie. Cela peut nous affecter. Mais c’est quelque chose qui est prévu parce qu’avec le soutien de l’Etat, vous vous souviendrez qu’il y a la micro-assurance à travers l’assurance agricole. Il y a aussi d’autres opérations et perspectives que l’Etat a déployées pour soutenir les activités de la Banque agricole. Je peux donc dire que ces effets seront amoindris en ce qui concerne la BADF. L’autre effet, c’est sur le volume de commercialisation des produits, qui pourrait être fait. Moins il y a des produits, moins il y a d’activités pour nos braves agriculteurs et moins peut-être on aura à accompagner la commercialisation, la collecte, la transformation et encore moins, peut-être le retour de notre financement va s’avérer. Mais sachez que l’un dans l’autre, ce sont des choses qu’on peut au moins intégrer lorsqu’on instruit un dossier de demande de financement.

 

Il nous revient que la BADF a mis en place un mécanisme pour éviter aux paysans, de brader leurs productions. Pouvez-vous nous expliquer ce qu’il en est exactement ?

 

Nous travaillons avec des partenaires, des structures qui renforcent les capacités des organisations paysannes sur le terrain. Nous avons aussi ce qu’on appelle l’agriculture contractuelle qui nous permet de mettre en relation des partenaires, et nous on se positionne entre les deux parties en assurant le financement. Il y a un contrat entre un acheteur et un producteur et la banque se met au milieu pour disponibiliser le financement. Nous avons également le mécanisme du crédit à risque partagé où le producteur supporte une parte du risque, l’acheteur supporte une partie et la banque aussi assume une partie du risque. Quand on fait comme cela, on permet au producteur de ne pas prendre sa récolte et la déposer au bord de la voie pour la vendre. C’est généralement à cette occasion-là que les producteurs bradent leurs produits agricoles. L’autre manière pour ces derniers de brader leurs récoltes, c’est d’être préfinancés par des prédateurs ou des individus qui viennent donner le tiers voire le quart de ce que la récolte va coûter. En fait, ils préfinancent la production à l’avance et à la récolte, ils arrivent sans état d’âme pour racler toute la production chez le producteur. Mais si le producteur a un bon accompagnement de la banque, cela lui permet de tenir, de passer les périodes difficiles et de vendre sa production au prix qui l’arrange. Cet accompagnement que la banque agricole met au profit des producteurs, leur permet d’avoir une activité dans la dignité. Seulement que cette situation nécessite que la banque dispose de suffisamment de ressources pour soutenir les agriculteurs de telle sorte que si l’effet est amplifié, nous assistions à un appui sérieux du monde rural.

 

Vous êtes avant tout un homme politique. L’on se rappelle encore des points de vue divergents que vous et 12 de vos collègues députés, aviez eus avec vos camarades de l’Union pour le progrès et le changement (UPC). En novembre 2020, vous avez été élu député sous la bannière du Mouvement pour un Burkina du futur (MBF). Comment se porte votre parti politique ? 

 

C’est vrai. J’ai une histoire. Vous m’avez connu avec un parti politique où j’ai été élu député, avec lequel, également, il y a eu des difficultés qui, je pense aujourd’hui, doivent être aplanies. Parce que je puis dire, et vous le savez plus que moi, que nous regardons désormais dans la même direction. C’est vrai que je suis un acteur politique, mais ma position actuelle m’oblige à être un peu en retrait et de peser et de mesurer les opinions et avis que j’émets de sorte que les gens ne les confondent pas avec les activités de la banque. C’est pourquoi vous aurez remarqué que je suis moins audible dans les médias. Pour revenir à votre question, le MBF se porte très bien, rien qu’à se référer aux résultats des dernières élections législatives couplées à la présidentielle. Notre parti a soutenu la candidature du président Kaboré qui a été réélu de façon brillante. Au niveau des législatives, nous avons remporté 4 sièges de députés à l’Assemblée nationale pour notre première participation et à moins d’une année d’existence de notre parti. Je pense que c’est une performance historique qui mérite d’être soulignée. Si nous nous projetons sur cette base, nous pouvons nourrir de grandes ambitions. Si vous faites le classement des partis politiques qui ont pu s’illustrer lors des dernières élections, nous ne sommes pas très loin de la 5e ou de la 6e place. C’est vraiment une performance dont nous sommes fiers. Cependant, il faut reconnaître que nous avons laissé des camarades sur la route et je pense que les prochaines échéances vont leur permettre de s’illustrer et de rattraper leurs projections et leurs ambitions.

 

« L’UPC a corrigé avec 5 ans de retard ce qui lui avait été demandé 5 ans en arrière. Cela est à l’honneur du président Zéphirin Diabré »

 

Avez-vous une pensée à l’endroit de vos camarades dissidents qui n’ont pas réussi à se faire élire à l’issue des élections de novembre 2020 ?

 

Nos camarades dissidents qui n’ont pas pu renouveler leur mandat, il faut dire qu’au sortir des élections, il y a eu une forte tristesse qui a suivi la défaite de certains d’entre eux. Mais comme je l’ai dit, ce n’est que partie remise. Ils auront bientôt l’occasion de se remettre en selle et c’est tout le mal que je leur souhaite. Vous imaginez avec quelle force le MBF allait s’inscrire dans le landerneau politique (ndlr du Burkina Faso) si l’ensemble des camarades avaient pu valider leur ticket !

 

Quel commentaire faites-vous de la « plongée » de Zéphirin Diabré et de l’UPC dans la majorité présidentielle ?

 

(Rires) « La plongée » de Zéphirin Diabré comme vous le qualifiez, dans la majorité politique, est une question qui m’a été régulièrement posée. Nous lui avons demandé cela depuis fin 2015. Cela n’est intervenu que 5 années plus tard.  Je me garde cependant de dire si cette alliance a été faite à temps ou pas. L’essentiel est d’y être. Tout ce que je peux dire, c’est qu’il n’est jamais tard pour bien faire.  Nous saluons cette décision qui nous donne historiquement raison. Aujourd’hui, nous sommes ensemble dans la majorité. Nous avons choisi de soutenir le président Kaboré ensemble. Si nous regardons dans la même direction, il faut que nous nous accommodions. Chacun a son ambition, son objectif et son programme. Le tout doit être déployé sainement dans l’accompagnement de notre champion à tous. C’est vrai que certains l’ont combattu pendant la campagne et d’autres étaient à ses côtés.  D’aucuns pourraient voir d’un mauvais œil, l’arrivée de ceux qui étaient les adversaires, il n’y a pas longtemps. Nous disons qu’en politique, il faut se rendre à l’évidence et corriger.  L’UPC a corrigé avec 5 ans de retard ce qui lui avait été demandé 5 ans en arrière. Cela est à l’honneur du président Zéphirin Diabré.  Nous saluons cette décision qui nous donne historiquement raison. Toute chose qui justifie que nous ne nous étions pas trompés lorsqu’il y avait le malentendu. Cette attitude de l’UPC nous a blanchis.

 

Le vent de la fusion des partis politiques, souffle actuellement sur le Faso. Quelle est votre appréciation sur cette nouvelle façon dans la vie des partis politiques ?

 

Aujourd’hui, il faut être réaliste. Le Burkina est très petit avec le nombre de partis politiques que l’on connaît. Nous pensons qu’il faut assainir cette question.  Si on ne peut pas opérer sa mue pour devenir tout seul un grand parti politique, il faut aller en fusion ou en alliance. Beaucoup de partis ont compris, de nos jours, que leur existence est liée à la nécessité de se regrouper, de devenir une grande formation politique. D’où la tendance actuelle à aller en alliance ou en fusion. Ce serait salutaire qu’il y ait juste quelques grands partis ou de grands blocs qui, à travers le débat contradictoire, permettent d’insuffler une certaine dynamique à notre société, à notre démocratie. Si on continue avec plusieurs centaines de partis politiques qui n’ont pas une capacité contributive, je n’en vois pas la nécessité.

 

Peut-on s’attendre à voir le MBF s’inscrire dans cette dynamique d’alliance ?

 

En ce qui concerne le MBF, s’il y a des partis politiques avec lesquels nous avons des idées convergentes, nous n’excluons pas d’aller en alliance. Mais il ne m’appartient pas, en tant qu’individu, de décider ou d’aller ici ou bien là. Nous avons des instances et en temps opportun, lorsque la question sera posée avec une certaine acuité, nous allons convoquer les instances et celles-ci pourront se prononcer.

 

Certains affirment ne pas comprendre pourquoi Daouda Simboro n’est pas membre du bureau exécutif en tant que père fondateur. Qu’en dites-vous ?

 

Moi, je ne me vante pas. Mais j’ai toujours voulu être une force de propositions. La place que les gens m’attribuent de façon empirique, ne m’affecte pas. Ce qui est plus important pour moi, c’est de savoir que ma contribution n’est pas inutile, n’est pas vaine. A plusieurs occasions, j’ai montré que je suis quelqu’un qui aime travailler en équipe et qui doit valoriser les gens. Je n’ai pas besoin d’être le président de mon parti, mais je dois travailler pour que le parti connaisse son essor. Et c’est ce que je fais. Nos textes sont clairs. Le président actuel (ndlr du MBF) ne peut pas renouveler son mandat à souhait ou rester président à vie. Il va passer le témoin à un moment donné. Quelqu’un d’autre viendra. C’est un contrat à durée déterminée. Il n’y a pas à dire que je vais durer ou que je vais prolonger. La meilleure chose que je puisse faire présentement pour le parti, c’est ce que je fais, c’est-à-dire jouer le rôle d’appui, le rôle de force de propositions.

 

 

« Vous avez assisté à la remise de dons aux personnes vulnérables et aux autres bénéficiaires. J’ai refusé toute prise de vue. Parce que je refuse d’en faire de la récupération politique »

 

Il revient de plus en plus que la ministre déléguée chargée de la Recherche scientifique et de l’Innovation, est du MBF. Et qu’elle n’était pas militante de votre parti avant sa nomination. Est-ce exact ?

 

Ce qui est important aujourd’hui, pour nous, c’est que la ministre déléguée chargée de la Recherche scientifique et de l’innovation est une militante du MBF et cela met un terme à tout le débat. Qu’elle le soit devenue après sa nomination au gouvernement ou avant ne relève que de spéculations de gens qui n’ont pas grand-chose à faire. On ne naît pas militant d’un parti politique, on le devient.

 

Quels sont vos rapports avec les leaders des autres partis politiques de la Kossi ?

 

Je n’ai pas de problème avec qui que ce soit dans la Kossi. Mes interventions dans la province ne se font pas sous couverture de mon appartenance à tel parti politique. Mais je le fais toujours en tant que fils de la localité à qui Dieu a donné la force de soutenir les autres et je souhaite le faire aussi longtemps que possible.

 

Aux élections de novembre 2021, le MBF a fait une démonstration de force dans la Kossi. Comment entrevoyez-vous les municipales de 2022 dans cette partie du Burkina Faso?

 

Je remercie la population qui a permis au MBF d’obtenir des résultats éclatants aux dernières élections parce que même si on se limite à la commune de Nouna, les résultats obtenus permettaient à notre parti d’obtenir un siège à l’Assemblée nationale. C’est une performance que je mets à l’actif des électrices et électeurs de la province. Les perspectives ne sont pas les mêmes. Pour ce qui est des élections de 2022, je souhaite que les populations renouvellent leur confiance au MBF.

 

La Kossi et plusieurs autres provinces du pays sont en proie à des attaques terroristes qui endeuillent les populations. Comment vivez-vous la situation particulière que traverse votre province d’origine ?

 

Je vis difficilement la situation sécuritaire de la province de la Kossi parce qu’avec la détérioration de la situation, je suis obligé de réduire mes visites dans la province ; chose qui m’affecte énormément. Mais, il faut louer la bravoure des Forces de défense et de sécurité (FDS) qui abattent un énorme travail pour le retour effectif de la paix en vue de permettre aux populations de mener sereinement leurs activités.

 

Quels sont les objectifs visés à travers la Journée de solidarité que vous organisez depuis plusieurs années au profit de la population de la province de la Kossi ?

 

Rassurez-vous qu’il n’y a aucune visée politique.  Nous sommes à la 5e édition, avec la nouvelle dénomination. Sinon, mes actions en faveur des populations datent de 2012 et même avant.  Il n’y a pas de calcul derrière. Je veux être solidaire, être proche de la population qui fait de moi ce que je suis, qui me permet d’agir et qui oblige à agir à travers l’affection qu’elle a pour moi. Vous avez assisté à la remise de dons aux personnes vulnérables et aux autres bénéficiaires. J’ai refusé toute prise de vue. Parce que je refuse d’en faire de la récupération politique. L’appui que j’apporte est fait avec plaisir et dénué de tout calcul politique.

 

Quel est l’appel que vous lancez à l’endroit des populations de la Kossi ?

 

A l’endroit des populations de la Kossi, je lance un appel à l’unité, à la solidarité et à la cohésion sociale car je pense que ce sont ces facteurs qui peuvent nous permettre de gagner des batailles. Je les invite également à s’engager aux côtés des FDS. 

 

Propos recueillis par Loban Henry POPPY

 


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