HomeA la uneDECES DE DESMOND TUTU

DECES DE DESMOND TUTU


Desmond Tutu a tiré sa révérence hier dimanche, 26 décembre 2021. L’annonce de son décès a été faite par le Président de la République, Cyril Ramaphosa himself. Cela est la preuve, si l’on en avait encore besoin, que le défunt comptait parmi les illustres fils de la Nation arc-en-ciel. Et le fait que l’homme ait rendu  l’âme le dimanche, 26 décembre, jour du Seigneur et le lendemain de la fête de la Nativité, pourrait être décrypté comme un signe de sa proximité avec le Très-Haut. En tout cas, l’histoire retiendra de ce dignitaire religieux qu’il aura mené le bon combat pour l’Afrique du Sud et cela, jusqu’au bout de sa vie. La première fois où il a véritablement mis les pieds dans le plat, c’était le 16 juin 1976. Ce jour-là, en effet, l’appareil répressif du régime de l’apartheid avait réprimé dans le sang, les émeutes scolaires de Soweto. Cet acte barbare révolta le prélat au point qu’il n’avait pas eu besoin de porter de gant pour dénoncer la violence de la police exercée contre des enfants.

 

 

L’homme n’a eu de cesse de s’insurger contre le régime de l’apartheid

 

 

 

 

Depuis cette date, Desmond Tutu est entré en rébellion pacifique contre l’ordre établi par le système de l’apartheid. Et une de ses armes favorites, a consisté à s’attaquer aux fondements religieux de ce régime. Pour lui, l’apartheid est «  le système le plus vicieux inventé par l’homme depuis le nazisme ». Par-là, il déconstruisait la base idéologique et spirituelle de l’apartheid selon laquelle, les Afrikaners étaient considérés comme un peuple élu de Dieu, responsables d’une mission civilisatrice. Pour Desmond Tutu donc, cette version n’a aucun fondement biblique. C’est une falsification éhontée de la parole de Dieu. Dès lors, la résistance noire prend une dimension théologique. L’autre arme favorite à laquelle il a eu recours pour combattre l’apartheid, aura été, de toute évidence, l’humour. On se souvient encore, en effet, de sa fameuse boutade : «  quand l’homme blanc est arrivé, il avait la Bible et nous avions la terre », avait-il raconté. « L’homme blanc nous a dit : venez, agenouillons-nous et prions ensemble. Quand nous avons rouvert les yeux, voilà ! Nous avions la Bible et il avait la terre ». En 1985, il a appelé publiquement à des sanctions économiques internationales pour faire plier le régime. Bien qu’il ait reçu le prix Nobel de la paix en 1984 en compagnie de cette autre figure de l’histoire sud-africaine, c’est-à-dire Frederik Declerck, l’homme n’a eu de cesse de s’insurger contre le régime de l’apartheid. Et sa promotion, en 1986, comme premier archevêque noir de l’Eglise anglicane en Afrique du Sud, n’a fait que renforcer son militantisme anti-apartheid jusqu’à l’avènement de la démocratie multiraciale en 1994.

 

 

Desmond Tutu mérite d’être considéré comme l’un des monuments de l’histoire contemporaine de l’Afrique du Sud

 

 

C’est alors que son ami, Nelson Mandela, lui confia la tête de la Commission Vérité et Réconciliation. Le moins que l’on puisse dire, c’est que le prélat a relevé le défi. Ce service inestimable rendu à Mandela en particulier et à l’Afrique du Sud en général, lui a valu d’entrer davantage dans l’histoire de ce pays. Au delà de l’Afrique du Sud, on peut dire que  Desmond Tutu, avec cette expérience, qui, de toute évidence, a contribué à désarmer le cœur de ses compatriotes, a suscité des émules en Afrique. Et sa lutte n’a pas pris fin avec la chute de l’apartheid. Elle s’est poursuivie après l’avènement de l’Afrique du Sud post-apartheid. Les nouveaux maîtres du pays sont désormais dans son collimateur. La gabegie et la corruption dont faisait montre l’ANC (Congrès national africain), sont pointées au quotidien par l’homme de Dieu. Résultat : il rendit sa démission du parti de Nelson Mandela en 2013. Les successeurs de Nelson Mandela lui en voulurent pour cela, jusqu’à sa mort ce dimanche 26 décembre à l’âge de 90 ans. Pour l’ensemble de ses bonnes œuvres donc, Desmond Tutu mérite d’être considéré comme l’un des monuments de l’histoire contemporaine de l’Afrique du Sud. Son décès, par conséquent, s’apparente à une page de l’histoire de ce pays qui se tourne. En tout cas, avec sa mort, l’on peut affirmer, sans grand risque de se tromper, que c’est un des derniers Mohicans qui a tiré sa révérence. La grande question que l’on peut désormais se poser est de savoir si les Sud-africains sauront perpétuer les grandes valeurs qu’il leur a laissées en legs. Cette question est d’autant plus justifiée, au regard des scènes de violence et de xénophobie dont sont coutumiers, ces dernières années, les habitants de la Nation arc-en-ciel, une expression qu’il avait inventée pour saluer l’avènement de la nouvelle Afrique du Sud.

 

« Le Pays »

 

 


No Comments

Leave A Comment