DEMANDE DE LIBERATION DE KPATCHA GNASSINGBE : Faure entendra-t-il raison ?
Dans deux mois, Kpatcha Gnassingbé, le demi-frère du président togolais, Faure Gnassingbé, bouclera six années en prison. On se rappelle en effet que c’est le 15 avril 2009 que l’ex-député du Nord du parti au pouvoir d’alors, le Rassemblement du peuple togolais (RPT), avait été arrêté, accusé de vouloir profiter de l’absence du chef de l’Etat alors en déplacement en Chine, pour fomenter un coup d’Etat afin de prendre le pouvoir. A l’époque des faits, cherchant secours et protection, Kpatcha Gnassingbé s’était réfugié à l’Ambassade des Etats-Unis, parce qu’il disait aussi craindre pour sa vie. Mais, après des tractations, il avait dû quitter la représentation diplomatique et avait été interpellé à sa sortie par les services de sécurité togolais. Par la suite, il sera jugé en 2011, avec une trentaine de personnalités civiles et militaires qui ont toutes plaidé non coupables. Il sera reconnu coupable et condamné par la Justice togolaise à 20 ans de prison, avec d’autres conjurés dont certains ont écopé de peines presqu’aussi lourdes, pour atteinte à la sûreté de l’Etat.
Comme cela se voit souvent sur le continent, ce chef d’accusation est quelque peu devenu récurrent pour nombre de dirigeants africains, dont certains usent pour casser de l’opposant ou éliminer des adversaires politiques gênants, à moindre frais. Dans le cas de Kpatcha Gnassingbé et compagnie, si l’on en croit une certaine opinion, les conditions de leur détention prolongée semblent aller à l’encontre du droit international. C’est ce qui semble justifier qu’après la Cour de justice de la CEDEAO, le Conseil des droits de l’Homme des Nations unies ait marqué un avis qui milite en faveur de la libération des détenus par les autorités togolaises. Mais l’instance onusienne sera-t-elle entendue ? Rien n’est moins sûr, à moins qu’elle ne dispose de moyens de coercition pour amener Lomé à revoir sa position. Car, les autorités togolaises ne semblent pas avoir la même lecture de la situation. Pour elles, cette détention repose sur une base tout à fait légale.
La famille Gnassingbé est déchirée par une lutte fratricide pour le pouvoir
C’est pourquoi l’on ne peut s’empêcher de penser que ce n’est pas demain la veille que le pouvoir togolais se décidera à libérer Kpatcha Gnassingbé, même sous la pression de la communauté internationale. D’autant plus qu’au-delà de cette affaire, c’est un secret de Polichinelle que la famille Gnassingbé est déchirée par une lutte fratricide pour le pouvoir, depuis la mort de Eyadema père. L’on se rappelle, du reste, les conditions calamiteuses dans lesquelles Faure lui-même a succédé à son père en 2005, sur fond de violences.
Aussi, tant que l’ex-ministre de la Défense sera vu comme une menace potentielle ou réelle pour le fauteuil de son frère, il y a fort à parier que ce dernier montrera très peu d’empressement à obtenir sa libération. Surtout, en ces moments où la question de l’alternance se pose avec insistance et acuité au Togo, après les deux quinquennats que Faure a déjà passés au pouvoir. En tout cas, le problème a été posé.
Que fera Lomé maintenant ? Pour le moment, elle semble faire la sourde oreille.
Outélé KEITA