DEMISSION DE BOUTEFLIKA : Une victoire d’étape
Ça y est ! Le valétudinaire président a rendu sa démission. Et ce, sans attendre que soit mis en application l’article 102 de la Constitution. C’est dire si la Grande muette devenue très bruyante, a poussé Boutef à la sortie. Acculé par une rue en colère, le pouvoir algérien qui, jusque-là, n’avait fait que dans le dilatoire, n’a pas eu d’autre choix que de céder à la pression populaire. Une bataille vient d’être remportée. Mais pas la guerre. Si on n’en est seulement qu’à une étape, quoi que décisive de la lutte, reste à présent, pour la rue, à parvenir à démanteler tout le système. Le délai de grâce qu’a voulu s’offrir gracieusement le président, ne sera donc pas, selon toute vraisemblance, mis à profit pour assurer ses arrières en se taillant une transition sur mesure où les premiers rôles seraient tenus par ses proches.
Il faut saluer la vigilance et la détermination des Algériens
Une chose est en tout cas sûre : les Algériens ne vont pas lâcher prise, bien conscients qu’au-delà de la personnalité du vieillard qui vient de jeter l’éponge, c’est le démantèlement d’un système corrompu et vieux de plusieurs décennies, qu’il faut à tout prix obtenir. C’est en cela que l’idée d’une transition arrangée et pilotée par le président du Sénat et le nouveau gouvernement, ne saurait être un compromis acceptable pour la rue. C’est pourquoi, tout en se félicitant de la démission du chef de l’Etat, il faut, par ailleurs, saluer la vigilance et la détermination des Algériens qui font preuve d’une extraordinaire lucidité et d’une maturité politique. Maintenant que le peuple algérien est plus que jamais gonflé à bloc après cette victoire d’étape, quelle autre alternative reste-t-il au pouvoir ? S’achemine-t-on vers une sortie de crise ? En tout cas, de l’avis de nombreux analystes de la scène politique algérienne, la seule mesure à même de faire baisser le thermomètre aujourd’hui en Algérie, c’est, au-delà de l’abandon forcé du pouvoir par le papy, la décapitation du système qu’il a jusque-là incarné.
Le peuple algérien veut une rupture
Une sortie de scène qui passe nécessairement par l’ouverture d’une transition véritablement démocratique à laquelle seront entièrement parties prenantes les nouveaux visages qui commencent à émerger des immenses foules qui ont pris possession de la rue algérienne. Les Algériens caressent, en effet, l’espoir de voir apparaître de nouveaux visages pour assurer la transition. Mais cela passe aussi et surtout par le désarrimage d’une armée qui a toujours joué les premiers rôles sur la scène politique. Contraint de lâcher le pouvoir, Boutef est donc, malgré lui, allé dans le sens de la marche du peuple. C’est une décision sage. Il y allait de l’intérêt de Boutef lui-même car finalement, qu’aurait-il gagné dans ce combat qu’il aurait mené contre lui-même, contre la maladie, contre son propre clan et finalement aussi contre le peuple, s’il avait pris l’option de ne rien céder à la rue ? « Il n’est jamais tard, dit-on, pour bien faire » et le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il a bien agi. Cela dit, le peuple algérien veut une rupture. Il veut des visages nouveaux pour présider aux destinées de la Nation.
Toute chose qui ne serait possible sans la dissolution des institutions dont les faillite morale a largement contribué à tirer l’Algérie vers le bas.
« Le Pays »