HomeA la uneDr MODESTE YERBANGA, MINISTRE DES RESSOURCES ANIMALES ET HALIEUTIQUES  

Dr MODESTE YERBANGA, MINISTRE DES RESSOURCES ANIMALES ET HALIEUTIQUES  


Pharmacien de formation, Dr Modeste Yerbanga a exercé dans le public avant d’évoluer dans le privé en ouvrant la pharmacie Naira en 2011, puis en créant bien d’autres entreprises par la suite dans le domaine médical. Militant du parti le Mouvement du peuple pour le progrès (MPP) dès sa création, il est membre du Bureau politique national du parti. Elu au soir des élections locales de 2016, président du Conseil régional du Centre-Sud dont le chef-lieu est Manga, Dr Modeste Yerbanga a été nommé ministre des Ressources animales et halieutiques dans le premier gouvernement du deuxième mandat du président du Faso, Roch Marc Christian Kaboré. Dr Modeste Yerbanga n’a pas hésité à répondre aux questions de Mardi politique qui a abordé avec lui, des sujets sur le département ministériel qu’il dirige et bien d’autres sujets politiques dont celui de l’ancien ministre Jean Claude Bouda, fils de Manga comme lui.

 

« Le Pays » : Quel est le quotidien d’un ministre ?

 

Dr Modeste Yerbanga : Je vous remercie, avant tout, pour l’intérêt que vous portez au ministère des Ressources animales et halieutiques. Un ministre est un agent gouvernemental qui met en œuvre et assure le suivi de la politique du gouvernement dans un secteur d’activités. Pour mon cas, je m’évertue à gérer le plus efficacement possible toutes les questions nationales en lien avec l’élevage, la pêche et l’aquaculture. Un ministre est obligatoirement tourné vers l’intérêt supérieur du pays, des Burkinabè et des générations à venir. Son quotidien est ainsi fait d’audiences, de rencontres, de réunions, d’avis, d’orientations, de coordinations, de décisions, de suivis, de contrôles… Et pour bien le faire, il faut savoir maintenir sa santé physique, mentale et sociale ; d’où la nécessité d’une certaine hygiène de vie.

 

Quelles sont vos priorités pour le département des ressources animales et halieutiques où vous venez d’arriver ?

 

Mes priorités sont celles qui m’ont été indiquées dans mon contrat d’objectifs qui se nourrit du programme cprésidentiel et qui vise à donner toute son importance à ce sous-secteur du développement rural. Il est le troisième pilier de l’économie burkinabè, contribuant à hauteur de 12% du PIB et à 40% à la formation des revenus monétaires hors coton des ménages ruraux. C’est un sous-secteur remarquablement concret dans la création de la valeur ajoutée et d’emplois. Les actions d’importance sont nombreuses dans ce ministère et nous sommes déjà à la manœuvre pour les réaliser. En termes de priorités, nous pouvons relever l’appui à l’installation d’unités de fabrique d’aliments pour bétail dans les différentes régions de notre pays ; l’appui à la mise en place d’unités d’embouche ; la création de complexes intégrés d’abattoirs frigorifiques ; la mise en place d’une centrale d’achat de médicaments ;  la création d’une unité de production de vaccins pour animaux ; la poursuite de la construction des bio-digesteurs ; le développement de centres spécialisés de production apicole ; la mise en place d’un système durable de subvention des intrants et matériels de pêche et d’aquaculture ; la construction de centre de référence de production d’alevins de qualité ; la poursuite de la sécurisation et la gestion durable des espaces pastoraux. Comme vous le voyez, ce secteur a besoin d’un soutien fort et nous y œuvrons, en comptant sur la collaboration de tous les acteurs.

 

De nombreux éleveurs sont victimes de vols de bétails du fait de l’insécurité. Comment comptez-vous résoudre ce problème ?

 

C’est un constat malheureux dans les zones fragiles où plusieurs de nos éleveurs sont constamment dépouillés de leur bétail qui constitue leur raison d’être. Ce phénomène de vol et d’enlèvement de bétail s’est beaucoup accru dans les régions du Sahel et de l’Est, consécutivement aux attaques armées. Pour faire face à ce phénomène, il faut d’abord l’action des organisations professionnelles et des villageois pour lutter contre le vol de bétail et retrouver les troupeaux égarés ou volés, à travers des relais de veille communautaire, d’alerte précoce et de diffusion d’informations en cas de vol de bétail. Il y a aussi le projet MODEM qui est un dispositif d’alerte digital que notre ministère a contribué à mettre en place en collaboration avec la SNV et une société de téléphonie mobile. Et enfin, nous étudions un système d’identification des animaux, qui pourrait contribuer efficacement à la lutte contre le vol et l’enlèvement du bétail.

 

Comment comptez-vous régler la question des conflits récurrents entre éleveurs et agriculteurs ?

 

L’Etat a mis en place des dispositifs pour éviter ces conflits, et nous allons travailler à les renforcer. Il s’agit notamment de: la création de zones pastorales en collaboration avec les autorités locales en vue de fournir aux éleveurs une sécurité foncière suffisante ; la création de pistes à bétail pour le déplacement des animaux ; l’imposition de servitude de passage autour des points d’eau en vue de permettre l’accès des animaux à l’eau ; la sensibilisation des acteurs par l’organisation d’émissions radiophoniques et de séances d’information et de sensibilisation sur les textes législatifs et règlementaires entrant dans la gestion des ressources naturelles et sur la prévention et la gestion des conflits. J’avoue que malgré toutes ces dispositions, les conflits éleveurs-agriculteurs restent récurrents. Il y a même les dispositifs juridiques pour prévenir ces conflits, notamment le décret portant création de la commission de conciliation foncière villageoise qui se bat pour atténuer et résoudre les conflits. Dans tous les cas, nous allons accroître notre vigilance sur la question.

 

Quelles sont vos relations avec l’ancien ministre de la Défense, Jean Claude Bouda, qui est fils de la région de Manga comme vous ?

 

Le ministre Jean Claude Bouda est un aîné de Manga. Il compte parmi les animateurs de la vie politique de la province de ces 30 dernières années. Et il a inspiré beaucoup de jeunes qui se sont lancés en politique et j’en fais partie. Il a apporté sa contribution à la mobilisation des populations pour le développement de notre région et aussi pour la construction de ce pays ; et il continue de le faire. Notre génération a beaucoup appris à ses côtés.

 

Comment expliquez-vous votre ascension politique et peut-on lier cela à la disgrâce de l’ancien ministre Jean Claude Bouda ?

 

Rire… Ascension politique ? Je pense que je me suis engagé réellement en politique, en tant qu’acteur, avec la création, en janvier 2014, du Mouvement du peuple pour le progrès (MPP) où j’ai été désigné comme membre du Bureau politique national (BPN). C’est ainsi que nous avons contribué,  aux côtés du ministre Jean Claude Bouda et d’autres camarades, à l’implantation du parti dans la province du Zoundwéogo. Chemin faisant, avec les élections locales de 2016, nous avons été élu successivement conseiller municipal, conseiller régional et président du Conseil régional du Centre-Sud. C’est ainsi qu’à la faveur des élections présidentielle et législatives de novembre 2020, la direction politique du MPP a bien voulu accepter ma candidature (qui avait été également choisie par le collège provincial d’appréciation) pour conduire la liste du parti pour ces élections. Avec la mobilisation, l’engagement et l’accompagnement de tous les camarades de la province ainsi que de la direction du parti, nous sommes arrivés en tête dans la province, aux présidentielle et  législatives. J’ai donc été élu député du Zoundwéogo. Par la suite, il a plu à Son Excellence le chef de l’Etat de nous appeler au gouvernement. Tel est mon parcours politique. Tout simplement. Et comme toujours, je préfère le travail concret aux commentaires.

 

 

« Peut-être que les raisons du Professeur Etienne Traoré se trouvent ailleurs… »

 

 

Dans une interview accordée à notre journal, l’homme politique Etienne Traoré dit être déçu du MPP. Quel commentaire en faites-vous ?

 

C’est un point de vue du Professeur Etienne Traoré que je respecte. Cependant, je ne sais pas ce qu’il reproche au MPP à qui le peuple vient de renouveler sa confiance à travers la réélection du chef de l’Etat, le Président Roch Marc Christian Kaboré et la majorité des députés, pour les cinq années à venir. Mieux, beaucoup d’opposants d’hier ont rejoint la majorité présidentielle parce qu’ils ont espoir qu’un Burkina meilleur est possible avec le MPP. Alors, peut-être que les raisons du Professeur Etienne Traoré se trouvent ailleurs…

 

Quel commentaire faites-vous de cette déferlante de partis politiques dont bon nombre de l’opposition, à la majorité présidentielle ?

 

Cela peut s’apprécier à deux niveaux. Premièrement, lorsqu’un parti politique perd successivement des élections, et pire, régresse sur le plan des résultats, il peut se poser des questions sur sa survie aux futures élections, à moyen et long termes. Deuxièmement, le chef de l’Etat a lancé un appel à tous les Burkinabè pour la réconciliation nationale et la cohésion sociale. Il a montré son ambition d’impliquer tout le monde dans la construction du pays. Cela pourrait expliquer l’adhésion de nombreux partis, autrefois de l’opposition, à la majorité présidentielle afin d’apporter leurs contributions et leurs idées à l’œuvre commune. L’un et l’autre cas se conjuguent pour nous indiquer que nous sommes certainement à un moment politique décisif, où le monde politique burkinabè est en profonde mais douce restructuration.

 

 

« Le sous-secteur de l’élevage représente le troisième produit d’exportation après l’or et le coton »

 

 

Quel est, selon vous, le meilleur schéma pour aboutir à une vraie réconciliation nationale ?

 

Le meilleur schéma est celui qui sera arrêté de façon consensuelle, avec l’ensemble des acteurs de notre société, en définissant clairement son champ d’application. Comme vous le constatez, c’est une thématique qui est abordée sous plusieurs angles en fonction des personnes et il faudra donner un contenu consensuel à cette réconciliation pour réussir.

 

Dans la perspective de 2025,  y a-t-il une probabilité que le MPP implose ?

 

Non, non. Pas du tout. Le MPP est un parti bien organisé et discipliné, dont les instances fonctionnent régulièrement. Nos modes de désignation des candidats sont connus et les élections qui viennent de se tenir, ont davantage renforcé notre parti et consolidé son ancrage.

 

Comment arrivez-vous à concilier vos nouvelles fonctions ministérielles et vos affaires ?

 

Dès ma nomination à la fonction de ministre, j’ai immédiatement cessé toutes mes activités professionnelles privées, afin de me consacrer exclusivement à ma mission gouvernementale. Parce que cette chance qui m’a été accordée de servir mon pays à ce haut niveau de responsabilité, je souhaite fortement la transformer en grandes victoires pour notre nation dans le volet des ressources animales et halieutiques. Voyez-vous, le sous-secteur de l’élevage représente le troisième produit d’exportation après l’or et le coton, mais c’est le levier le plus accessible pour transformer rapidement et durablement notre économie, en sortant un grand nombre de nos compatriotes de la pauvreté. C’est un combat qui mérite toute notre attention.

 

Propos recueillis par Antoine BATTIONO

 


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