HomeA la uneDr SALIMATA DRABO, DR DE LA SANTE DU SUD-OUEST A PROPOS DE LA FAUSSE ALERTE A GAOUA : « Avec Ebola, mieux vaut se presser par excès »

Dr SALIMATA DRABO, DR DE LA SANTE DU SUD-OUEST A PROPOS DE LA FAUSSE ALERTE A GAOUA : « Avec Ebola, mieux vaut se presser par excès »


La maladie d’Ebola sévit en Afrique occidentale depuis quelques mois. Partout, des dispositions sont prises pour éviter la maladie. La région du Sud-ouest, elle, fait frontière avec deux pays voisins, notamment la Côte d’Ivoire et le Ghana  qui n’ont pas encore enregistré de cas d’Ebola. En dépit de cela, les autorités sanitaires  de la région ont mis en place des mesures   pour prévenir cette maladie, en raison de la mobilité des populations au niveau des frontières. Comment en  est-on arrivé à  la fausse alerte à Gaoua ? Quelles sont les attitudes recommandées aux populations pour éviter cette maladie dont on ne dispose toujours pas de remède et  dont l’essentiel repose  sur un traitement symptomatique ? Voilà autant d’interrogations auxquelles Dr Salimata Drabo, directrice régionale de la Santé du Sud-ouest, médecin  en santé publique, a tenté de donner des réponses, au cours de notre interview le 3 septembre 2014.

 

« Le Pays » : Une fausse alerte par rapport à la maladie d’Ebola a circulé tout dernièrement dans le Sud-ouest ; comment en est-on arrivé à une telle situation ?

Dr  Salimata Drabo : Merci bien de l’opportunité que vous me donnez de parler de cette maladie et de sensibiliser la population. Comme vous le savez, l’épidémie d’Ebola sévit actuellement en Afrique de l’Ouest. Elle a commencé en Guinée et, très rapidement, les pays voisins, notamment la Sierra Leone, le Nigeria, etc,   en ont enregistré des cas. Nous ne devons pas rester indifférents à cette situation. C’est pour cette raison que les autorités du ministère de la Santé ont pris le problème à bras-le-corps, et comme vous le savez, mieux vaut  prévenir que guérir. C’est ainsi donc que le système de surveillance a été mis en branle, afin que tout cas qui entrerait soit dépisté  rapidement et  pris en charge. C’est donc dans ce système de routine de surveillance qu’on a reçu un malade ; et comme nous sommes en alerte, nous nous tenons prêts à toute éventualité. On dit d’ailleurs qu’avec Ebola, mieux vaut se presser par excès. C’est ce qui nous a amenés à agir promptement, face à ce  cas. Heureusement, c’était un cas négatif.

C’est dire néanmoins que le malade présentait des signes semblables à ceux d’Ebola ?

Vous savez,  avec la maladie d’Ebola, les gens pensent que l’hémorragie était le principal  signe. Mais on s’est rendu compte qu’il y  a d’autres signes ; c’est d’ailleurs pourquoi on parlait de fièvre hémorragique et maintenant, de maladie à virus Ebola, parce qu’on peut trouver des  signes d’autres maladies telles que le paludisme, la fièvre typhoïde, etc. Quand vous êtes en face de ces signes, il faut prendre des précautions. Il  faut aussi noter le contexte épidémiologique qui compte beaucoup; le fait que la personne ne vient pas d’un pays où sévit la maladie  et n’a jamais été en contact avec une personne  malade, tout cela est à prendre en compte. C’est tout à  fait logique que, quand il y  a certains signes, on alerte.

Il semblerait que  le malade  en question  ne faisait aucune fièvre. Est-ce vrai ?

 

Il faut voir le parcours du malade qui a d’abord consulté dans un CSPS, a été pris en charge, avant de se retrouver ici chez nous.

Il est finalement décédé,  et selon certaines indiscrétions, la cause de sa maladie serait liée à des  décoctions qu’il aurait bues.

 

Au cours de l’interrogatoire, il est ressorti qu’il avait pris  des décoctions, mais nous en ignorons le type. Les parents nous ont dit qu’il s’était purgé avec certaines décoctions, et étant donné que les gens n’aiment pas dévoiler les choses  quand ils ont affaire à des médicaments traditionnels, nous n’en savons pas davantage.

Votre direction  fait frontière avec deux pays voisins  n’ayant pas encore enregistré de cas. Dites-nous les mesures qui sont prises pour  éviter  que le Sud-ouest ne soit une porte d’entrée de la maladie dans le pays.

Nous avons le même dispositif que celui mis en place au niveau des frontières sur l’ensemble du pays. Aussi,  il y a des postes de police  ainsi que  des CSPS. Les policiers font  leur travail au niveau des frontières, car ils sont impliqués dans la gestion de cette maladie, puisqu’ils font le contrôle chez les passagers . Lorsqu’il y a un cas suspect,  très rapidement, on met à contribution les agents de santé qui font  le nécessaire. Donc, le travail se fait à travers les systèmes de surveillance au niveau des frontières, pour ce qui concerne les passagers. C’est ce qui va nous permettre d’identifier les éventuels cas suspects et de les isoler, afin de faire les examens et de  les prendre en charge.

Y a-t-il des sites d’isolement  identifiés au niveau de la région  pour parer à toute éventualité ?

Des instructions ont été données au niveau des formations sanitaires  pour  prévoir une salle d’isolement afin que, dès qu’il y a un cas suspect, on puisse  l’isoler rapidement. Vous savez que la contamination est très rapide ; tous les  cas doivent donc être isolés pour pouvoir réduire, voire empêcher  la contagion interhumaine. Au niveau de chaque formation sanitaire,  il y a donc  une salle d’isolement  prévue à cet effet.

Pourquoi une seule salle d’isolement quand on sait que les cas  suspects ne sont pas forcément des malades du virus Ebola ? N’y a-t-il pas de risque de les contaminer  à partir de cette salle d’isolement?

Avec une maladie contagieuse de ce genre, il faut prendre toujours des précautions pour ne pas mettre dans une même salle des cas douteux avec des cas avérés infectés.

Quels sont les conseils pratiques que vous avez à donner à la population  pour qu’elle évite une telle maladie ?

La principale source de la maladie, ce sont les animaux sauvages, en particulier les chauves-souris   et autres, qui contaminent l’Homme lorsqu’on mange leur viande, ou qu’on   les manipule ; il y a aussi le contact avec ces animaux qui peut transmettre la maladie. C’est pourquoi nous demandons à la population d’éviter de manger la viande sauvage ou de la manipuler, surtout les chauves-souris. Ce sont des hôtes  naturels qui ont le virus dans leur organisme, mais qui n’en meurent pas, ni ne  font la maladie. Ils le transmettent  à l’Homme ou  à des animaux qui, à leur tour,  le transmettent à l’Homme ; donc c’est la source principale. Par conséquent, il faut éviter leur consommation. C’est  très important et il faut vraiment que les gens respectent ces mesures-là. Aussi, chacun  doit se laver les mains régulièrement  avec du savon avant de manger. Lorsque quelqu’un est malade, il faut immédiatement l’amener dans une formation sanitaire. Nous lançons un appel aux uns et aux autres à être sereins, à ne surtout pas  paniquer lorsqu’il y a un cas suspect. Le plus urgent est d’amener le malade dans une formation sanitaire.

Y a-t-il un autre aspect important qu’il aurait fallu aborder en matière de  prévention de la  maladie ?

Je vous remercie d’être venu vers nous prendre ces informations qui font partie de la sensibilisation. Notre objectif est de sensibiliser la population, pour lui faire comprendre que la maladie est dans d’autres pays et qu’à tout moment, elle peut entrer chez nous. Par conséquent, les populations doivent observer  les quelques mesures pour que la maladie   n’entre pas et se propage. Pour atteindre un tel but, il faut que  la population apporte sa contribution, en conduisant tout cas suspect dans un centre de santé. S’il y a un cas éventuel et qu’on le laisse dans la communauté, cela va contaminer beaucoup de personnes. Il faut donc que la population aide les structures sanitaires, pour qu’ensemble nous puissions lutter et prévenir cette maladie à virus Ebola qui continue de faire des ravages.

Propos recueillis par Hompko Sylvestre Kambou

(Correspondant)


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