ELECTION D’EMMANUEL MACRON : Quelles leçons pour l’Afrique ?
Depuis le dimanche 7 mai dernier, le nom du successeur de François Hollande est connu. Il s’agit d’Emmanuel Macron, le candidat d’En Marche, qui a remporté sans coup férir l’élection présidentielle française au second tour avec 66,1% des suffrages, face à la candidate du Front national, Marine Le Pen, qui a obtenu 33,9% des votes. Si cette élection a connu une forte abstention (25 à 27%) et paraît, à certains égards, comme le vote de la raison sur la conviction, il n’en demeure pas moins qu’elle constitue un tournant dans l’histoire de la France, eu égard à la jeunesse du nouvel élu et surtout à son parcours politique hors du commun. Encore inconnu du grand public il y a de cela quelques années, Emmanuel Macron a surpris plus d’un en arrivant en tête de course lors du premier tour, devançant largement des adversaires autrement plus expérimentés tels l’ex-Premier ministre François Fillon et autres Jean-Luc Mélenchon qui paraissaient, à bien des égards, comme des dinosaures de la scène politique française, face à ce jeune preux qui fourbissait pratiquement ses premières armes. Mais comme le dit si bien Pierre Corneille dans son ouvrage Le Cid, « aux âmes bien nées, la valeur n’attend point le nombre des années ».
Sous nos tropiques, la culture de la démission est un phénomène aussi rare que les larmes d’un crocodile
Et tout porte à croire qu’Emmanuel Macron est une âme bien née qui a de la valeur, eu égard à l’exploit qu’il a réussi de renvoyer à ses chères études, la vieille classe politique française jusque-là organisée dans des systèmes partisans qui semblent avoir montré, avec cette élection, toutes leurs limites. En attendant la passation de pouvoir prévue pour le 14 mai prochain, quelles leçons peut-on tirer de la victoire du 8e président de la Vè république française pour l’Afrique ? La première est celle de l’audace. Car, l’on se rappelle que tout est pratiquement parti de la démission de l’ex-ministre de l’Economie de François Hollande, qui n’avait pas hésité à rendre le tablier « pour se consacrer entièrement à son mouvement politique », après avoir « touché du doigt les limites de notre système politique » qui étaient autant d’entraves à sa volonté de réformes. C’était le 30 août dernier. En Afrique, combien de ministres oseraient-ils un tel acte ? Car, non seulement cela pourrait être vu comme un crime de lèse-majesté, mais aussi cela pourrait valoir la diète à l’intéressé. C’est pourquoi ils sont nombreux les ministres à préférer le confort douillet du gouvernement pour bénéficier des avantages y afférents, même quand dans leur for intérieur, ils ne sont pas toujours sur la même longueur d’ondes que le chef de l’Etat. Tant et si fait que la culture de la démission est un phénomène aussi rare que les larmes d’un crocodile sous nos tropiques. Deuxièmement, malgré son jeune âge, Emmanuel Macron a séduit plus d’un par l’étendue de sa culture et sa maîtrise des dossiers ; ce qui n’est pas toujours le cas pour tous ceux qui se réclament de l’élite politique africaine dont certains donnent le sentiment d’être entrés en politique par opportunisme ou d’être parvenus au pouvoir par effraction. Troisièmement, la victoire d’Emmanuel Macron devrait amener la jeunesse africaine à croire en ses chances et à éviter de laisser le sort de nos Etats entre les mains d’une vieille classe politique pourrie jusqu’à la moelle, corrompue jusqu’aux os, en manque d’imagination et incapable de faire le bonheur des populations. Mais pour cela, il faudra que la jeunesse soit mieux organisée et qu’elle se donne les moyens de renverser l’ordre établi, parce que s’il y a une chose dont on peut être sûr, c’est que la vieille classe politique ne lui offrira pas le pouvoir sur un plateau d’argent. Au contraire, tant que cette dernière pourra écraser la jeunesse pour maintenir les choses en l’état, elle n’hésitera pas à le faire.
L’Afrique se découvre de nouveaux défis
La preuve est qu’en pratiquement cinquante ans (de De Gaulle à Macron), la France est à son huitième président pendant qu’au sommet de certains Etats africains, des familles ont installé des dynasties qui totalisent, à elles seules, presque 50 ans de pouvoir, comme c’est par exemple le cas au Gabon des Bongo, au Togo des Gnassingbé, au Cameroun où après 35 ans de pouvoir, Paul Biya, le 2e président de ce pays depuis son indépendance, n’est toujours pas prêt à passer la main. Il en est de même pour le Congolais Denis Sassou Nguesso qui totalise plus de 32 ans de pouvoir et qui n’a rien trouvé de mieux que d’emprisonner son plus grand challenger pour s’ouvrir un boulevard à vie au pouvoir. Ce sont là autant d’actes et de gestes qui étouffent la démocratie sous nos tropiques. Il faut que ça change. Pour cela, il faudra non seulement un électorat plus mature, qui évite de s’aligner derrière un candidat pour des raisons subjectives, notamment ethniques, régionalistes ou même religieuses, mais aussi que les institutions en charge des élections, jouent réellement leur rôle d’arbitre en se mettant au-dessus de toutes les chapelles politiques. C’est en cela que l’Afrique pourra espérer un jour jouer dans la cour des grands, et non dans l’attitude partisane d’institutions inféodées, comme on l’a vu en Côte d’ivoire lors de l’élection présidentielle de 2010 et plus récemment au Gabon où tout porte à croire que Ali Bongo a volé la victoire avec la complicité des institutions en charge des élections. Cela dit, quand est-ce que l’Afrique connaîtra véritablement le bonheur de l’alternance dans la transparence et la non violence ? Bien malin qui saurait répondre à cette question. Mais avec la prise de conscience de plus en plus grandissante de la jeunesse et la montée en puissance des organisations de la société civile qui sont de plus en plus regardantes et critiques sur l’action des gouvernants, on peut dire que l’espoir est permis.
En tout état de cause, à la lumière de l’élection d’Emmanuel Macron, l’Afrique se découvre de nouveaux défis dans sa longue marche pour l’approfondissement de la démocratie. Mais le chemin reste encore long, et surtout parsemé d’embûches pour se hisser au rang des plus grandes démocraties. Il appartient surtout à la jeunesse de prendre ses responsabilités. Un autre monde est possible. Il suffit d’y croire et de s’en donner les moyens.
« Le Pays »
Alo
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L’Afrique a amorcé son changement. Vous vous attardez sur les cas les plus caricaturaux (Biya, Eyadema, Bongo).
9 mai 2017Il faut rappeler qu’il y a 54 pays en Afrique et qu’il est donc difficile d’en parler de manière globale, comme un continent homogène.
Vous auriez pu parler du Cap-Vert, du Bénin, du Ghana, du Nigéria, su Sénégal, etc.. qui connaissent des alternances normales.
CE qui n’est pas le cas en Turquie , au Vénézuela, .
Ce n’est pas qu’en Afrique qu’on trouve des problèmes de démocratie.
Ceci dit, il faut que les peuples se battent pour se débarrasser de leur dictateurs.
Un afro-optimiste.
Sacksida
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Voyez-vous, le parcours fulgurant d’Emmanuel Macron est exceptionnel et il a accepté de travaillé et de se former au plan politique et économique pour atteindre ses objectifs et son idéale politique. Si nous prenons le cas du Burkina Faso, d’une manière générale quel est ce jeune cadre Burkinabé qui peut avoir intégrer une Banque Privée avec par exemple un salaire de 2.000.000 de FCFA/MOIS et de rendre sa démission après seulement 2 ans d’activités et d’aller se faire embaucher dans la Fonction publique avec un salaire 10 fois moins, tout simplement par qu’il veut accumuler des expériences administratives, de gestion et de finances ? Même, s’il en existe, c’est une espèce très rare en tout cas. Dans le faune politique, moi je n’en vois pas pour l’instant qui a des capacités et des convictions bien trempée, un leadership incontestable et prêt à tous les sacrifices. Quelques-uns dans notre société civile sérieuse pourraient peut-être devenir dans l’avenir de tels leaders si seulement ils y travaillent sérieusement car se battre pour une « Révolution » à la Marcronisme ou celle par d’un Thomas Sankara aujourd’hui au Burkina Faso ne courent pas les rues. Salut !
11 mai 2017