EMPRISONNEMENT D’OPPOSANTS EN ANGOLA : C’est Dos Santos le problème !  

 

Dix-sept Angolais décrits comme des opposants politiques au régime du président Eduardo Dos Santos, ont été condamnés à de lourdes peines. Les peines vont de trois à huit ans de prison. Le tort de ces Angolais ? Seul le pouvoir de Dos Santos pourrait le dire. Tout ce que l’on sait, c’est qu’il accuse les malheureux de « rébellion contre le président de la République et tentative de coup d’Etat, association de malfaiteurs et falsification de documents ». Les plus emblématiques des condamnés du pouvoir angolais sont le journaliste et professeur d’université, Domingo da Cruz et le rappeur Luaty Beirâo. Le premier est surtout accusé d’avoir traduit le livre de l’Américain Gene Sharp, intitulé « De la dictature à la démocratie ». En fait, le véritable reproche fait aux condamnés, c’est leur propension à promouvoir les idées de démocratie, le respect des droits de l’Homme et de dénoncer la dictature de Dos Santos. Dos Santos est donc dans une logique de formatage et d’embastillement de ses opposants. Mais il se trompe de combat, car il est révolu le temps où les dictateurs pouvaient verrouiller à double tour, les consciences de leur peuple. Et puis, pour quels effets ? Depuis l’indépendance de leur pays, les Angolais n’ont connu qu’un seul président avec un seul système politique. Malgré le despotisme de son régime, la pauvreté de ses concitoyens et l’introduction des idées pro-démocratie, Dos Santos veut endiguer la pensée progressiste en régentant son pays d’une main de fer. Or, tout comme celles des autres pays d’Afrique et du reste du monde,  la jeunesse d’Angola aspire au changement démocratique et à une gouvernance vertueuse.

Le président Santos devrait avoir une vision pour son pays en prenant en compte les aspirations de son peuple

Donc, nier l’évidence en voulant combattre les idées progressistes par l’embastillement des jeunes, c’est faire montre d’une mauvaise lecture des choses et d’une vision rachitique de l’histoire. C’est la preuve que les dictateurs ne voient jamais venir les orages et sont incapables de lire les signes des temps. En tout état de cause, il apparaît clairement qu’il y a un problème en Angola. Et ce problème est tout sauf ces dix-sept personnes emprisonnées injustement et qui voient aujourd’hui des vertes et des pas mûres parce qu’elles épousent les idées de leur temps. Ce problème, c’est cette culture de l’arriérisme et de la patrimonialisation du pouvoir d’Etat. Ce problème c’est, en un mot comme en mille, Eduardo Dos Santos lui-même qui interprète mal les événements et les lit sous son prisme déformant. Il pense que les changements ne concernent que Dakar, Ouagadougou et autres capitales africaines. Comme tout dictateur, il pense que ça n’arrive qu’aux autres. C’est oublier que l’accélération de l’histoire, une fois déclenchée, est à la fois irréversible et destructrice pour tous ceux qui ne savent pas anticiper. Il n’y a pas plus dangereux pour un dirigeant qu’un peuple qui, pour sa survie, est contraint de poser des actes désespérés. Bien évidemment, il est clair qu’un président « fondateur » comme Dos Santos, à cause des richesses immenses du pays, écoute plutôt ceux qui, à  l’intérieur comme à l’extérieur du pays, lui pompent l’air en lui demandant de rester ad vitam aeternam au pouvoir. Mais, à son âge, le président Santos devrait avoir une vision pour son pays en prenant en compte les aspirations de son peuple, qu’il tente de contenir par la répression. A son âge, il devrait faire montre de hauteur d’esprit. Un dicton africain dit : « quand l’âne veut te terrasser, tu ne vois jamais ses oreilles ».  Dos Santos se laissera-t-il terrasser par des jeunes qui ont l’âge de ses enfants et petits-enfants qui n’ont connu que lui ? Si oui, il aura cruellement manqué sa sortie.

Michel NANA