HomeDroit dans les yeuxENQUETE PARLEMENTAIRE SUR LES TELEPHONIES MOBILES

ENQUETE PARLEMENTAIRE SUR LES TELEPHONIES MOBILES


Décidément, la législature qui est en train de s’achever aura été caractérisée par des enquêtes parlementaires. On peut citer, entre autres, les enquêtes parlementaires sur le foncier urbain et celles sur les téléphonies mobiles. La commission qui a travaillé dans le cadre de cette dernière enquête, a produit son rapport. Son contenu a été porté à la connaissance des députés, le 17 décembre dernier. De graves manquements imputables aux sociétés de téléphonies mobiles ont été mis à l’index. Ils se résument comme suit : une mauvaise couverture du territoire avec son corollaire de zones blanches, c’est-à-dire des zones non couvertes par le réseau mobile ; des irrégularités dans la répartition des recettes entre les structures de l’Etat ; des difficultés pour l’Agence nationale du renseignement (ANR) à avoir des interfaces dans les sociétés de téléphonies mobiles pour assurer la sécurité ; des recettes fiscales sous-évaluées. Et que dire des coûts des appels? Sur cette question, le président de l’Assemblée nationale, Alassane Bala Sakandé, n’y est pas allé avec le dos de la cuillère : ils sont simplement les plus élevés de la sous-région et la qualité des appels laisse à désirer. Bref, toutes les sociétés mobiles traînent des manquements et des dysfonctionnements graves. Et ce sont les consommateurs et l’Etat qui trinquent. Pendant ce temps, ces sociétés voient leurs chiffres d’affaires monter en flèche. Toute chose qui a irrité Bala Sakandé au point qu’il a explosé en ces termes : « On ne va pas se faire arnaquer ». La colère du président de l’Assemblée nationale est légitime. Car, il est à la tête d’une institution qui est censée représenter le peuple burkinabè. De ce point de vue, il est dans son rôle quand il s’insurge contre tout ce qui est de nature à porter préjudice au peuple.

Il faut que le gouvernement ait le courage de s’assumer

En réalité, l’enquête parlementaire sur les téléphonies mobiles a enfoncé une porte déjà ouverte. En effet, tous les clients des sociétés de téléphonies mobiles sont remontés contre elles à cause de la très mauvaise qualité de leurs services au point que certains en sont arrivés à se résigner. Car, on peut avoir l’impression que plus les consommateurs se plaignent, plus les prestations se dégradent. Et avec tout le respect que l’on doit à Bala Sakandé, on peut se risquer à dire que son coup de gueule ne fera ni chaud ni froid aux sociétés de téléphonies mobiles. Car, on peut avoir l’impression qu’elles sont en territoire conquis. Et ce qui les intéresse au plus haut point, ce sont les bénéfices qu’elles engrangent. Franchement, au Burkina Faso, elles ont suffisamment engrangé. Et la contrepartie versée à l’Etat s’apparente à des broutilles. En tout cas, les impôts qu’elles versent à l’Etat sont dérisoires, foi de la Commission. Les services rendus aux consommateurs sont simplement calamiteux. Face à tout cela, l’Etat reste muet.  De toute évidence, la Commission d’enquête parlementaire a fait du bon travail. Ce qui a permis de faire ces révélations gravissimes. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que ces résultats interpellent. En premier lieu, c’est le gouvernement qui est interpellé. Il faut qu’il ait le courage de s’assumer. Et cela peut aller jusqu’au retrait des licences. C’est pourquoi Bala Sakandé ne doit pas se limiter à clouer au pilori les sociétés de téléphonies mobiles. Il doit aussi mettre le gouvernement devant ses responsabilités. Sous d’autres cieux, les gravissimes révélations faites par la Commission d’enquête parlementaire sur les téléphonies mobiles seraient susceptibles de donner lieu à des démissions ou encore à des révocations de fonctionnaires. Mais au Burkina Faso, la probabilité est grande qu’elles aient l’effet d’un pet de poule. De ce point de vue, l’on peut même se demander à quoi servent les commissions d’enquête parlementaire, si elles ne peuvent pas véritablement contribuer à améliorer la gouvernance. En tout cas, ce ne sont pas les enquêtes parlementaires qui ont fait défaut à cette législature. Seulement, on peut avoir le sentiment qu’elles sont destinées beaucoup plus à amuser la galerie qu’à secouer le cocotier pour en faire tomber les fruits pourris. L’enquête parlementaire sur le foncier urbain, de même que celle sur les sociétés minières, peuvent être inscrites dans ce registre : des révélations gravissimes mais qui n’ont pas eu de suite. On peut être donc en droit de se poser la question suivante : l’enquête parlementaire sur les téléphonies mobiles sera-t-elle mangée à la même sauce ?

Sidzabda


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