EVENTUELLE PROLONGATION DE LA TRANSITION : Le PDS/Mètba contre
Ceci est une déclaration du PDS/Mètba sur la situation sociopolitique qui prévaut actuellement dans notre pays. Tout en se disant opposé à une éventuelle prolongation de la Transition, le parti approuve la mise en place d’une nouvelle Constitution. Mais, prévient-il, cet exercice nécessitée la présence des représentants de toutes les couches sociales. Lisez !
Le Bureau exécutif national (BEN) du PDS/Mètba s’est réuni le 4 juillet 2015 à l’effet de tirer les leçons de la dernière session du Bureau Politique national tenue le 27 juin, et d’examiner la marche du parti ainsi que la situation politique nationale. Il a adopté la présente déclaration relative à quelques questions politiques actuelles.
1 – SUR L’EVENTUALITE D’UNE PROLONGATION DE LA PERIODE DE TRANSITION
Le PDS/Mètba considère que la durée du mandat de la Transition (article 20 de la Charte) fixée à 12 mois est un délai convenu de commun accord entre les parties signataires de la Charte, d’une part, entre celles-ci et les partenaires internationaux qui soutiennent la Transition, d’autre part. Cette durée s’impose donc à tous les responsables et à tous les acteurs de la Transition. C’est en fonction de cette durée que sont élaborées, dès le départ, les décisions de mise en œuvre des objectifs que les autorités et les acteurs de la Transition considèrent comme prioritaires pour la période.
Il était particulièrement évident, dès le départ, que tous les changements et les réformes souhaités par le peuple burkinabè, sa jeunesse et ses forces vives qui ont mené l’insurrection populaire victorieuse des 30 et 31 octobre 2014, ne pouvaient être menés à terme dans la courte période fixée pour la Transition.
Aujourd’hui, à trois mois environ des élections présidentielle et législatives, le PDS/Mètba juge absolument infondée et inopportune, l’institution d’un débat sur une prolongation éventuelle de la Transition. Il ne s’associera donc pas à ceux qui, sous des prétextes multiples, veulent justifier bien tardivement une éventuelle prolongation du mandat de la Transition.
II – SUR LA PROPOSITION D’ELABORER UNE NOUVELLE CONSTITUTION
Un autre débat national a été lancé au début de juin 2015, officialisé par l’initiative du président du Conseil National de la Transition (CNT) qui organise depuis le 30 mai 2015, de grandes conférences régionales sur le sujet.
Le PDS/Mètba considère qu’il s’agit là d’une question très importante, qui aurait dû s’imposer à la réflexion des premiers responsables et de tous les acteurs de la Transition, aussitôt après la victoire de l’insurrection populaire.
La Constitution actuelle accorde au Président du Faso, quasiment tous les pouvoirs d’un monarque, dispensé par ailleurs de rendre compte de son action au peuple et de l’obligation de s’expliquer même dans les situations les plus graves. Dans son fonctionnement comme dans son action de contrôle de l’action gouvernementale, l’Assemblée nationale est fortement dépendante du bon vouloir du Gouvernement. Par ailleurs, c’est le Président du Faso qui nomme les Présidents des hautes juridictions, tandis que son ministre de la Justice peut museler, disperser et briser la carrière des magistrats «non acquis» qui veulent croire à l’indépendance de la Justice. En 2012, il avait réussi à faire introduire dans l’actuelle Constitution des modifications très discutables, destinées essentiellement à lui accorder l’impunité pour les crimes qui pouvaient lui être imputés et à lui assurer le soutien politique de certaines couches de la population (la chefferie coutumière, les femmes).
Cependant, la solution généralement admise au départ de la Transition, était le toilettage de la Loi fondamentale, afin de verrouiller l’article 37, de mieux équilibrer les différents pouvoirs (exécutif, parlementaire et judiciaire) et de supprimer les dispositions relatives au Sénat.
Pour le PDS/Mètba, l’élaboration d’une nouvelle Constitution peut être une bonne solution pour prendre en compte les leçons de l’expérience historique de notre pays dans l’organisation et le fonctionnement équilibré des institutions dans un Etat démocratique. La question est cependant de savoir sur quelle période une telle Constitution peut être élaborée? Cette période ira-t-elle au-delà des élections du 11 octobre 2015 ? Si oui, les travaux entrepris peuvent-ils lier les autorités mises en place à partir de ces élections, lesquelles auront été élues sur la base de la Constitution actuelle?
Dans tous les cas, une Constitution doit traduire la volonté et l’accord de tous les citoyens de vivre ensemble dans le même pays, en respectant des règles admises par tous, en se soumettant aux mêmes obligations et aux mêmes lois, en bénéficiant tous des mêmes droits et des mêmes libertés, ainsi que de la sécurité et de la protection de l’Etat et de ses institutions. Elle doit donc recueillir le consensus le plus large auprès des différentes couches sociales et forces vives de la nation.
Le PDS/Mètba estime de ce fait que l’élaboration d’une nouvelle Constitution, ou tout au moins celle de son avant-projet, ne peut pas être l’affaire des seuls technocrates et ne peut se faire dans la précipitation. Elle nécessite d’y convier les représentants de toutes les couches sociales, de toutes les forces vives, de toutes les forces sociales, de toutes les communautés et de toutes les régions, afin de débattre largement des dispositions à prendre en compte. Le PDS/Mètba est, pour sa part, prêt à y participer pour apporter en toute responsabilité, sa contribution à l’écriture d’une Constitution résolument démocratique pour le Burkina Faso.
III – SUR LES DECLARATIONS RECENTES DE CERTAINS RESPONSABLES POLITIQUES
La presse nationale a rendu compte de ce que le Président de «Le Faso Autrement» aurait accordé le 8 juin au journal « Jeune Afrique», une interview dans laquelle il aurait dit: «J’ai trois atouts principaux. Je suis Moagha du Plateau Central, et les Mossi sont une forte composante du Burkina Faso. Je suis aussi musulman, ce qui n’est pas rien dans un pays où 70% des gens le sont également. Enfin, comme je vous l’ai dit, j’ai un vaste réseau de relations utiles dans le cadre de la diplomatie de développement que nous souhaitons mettre en place. » L’ethnie ou la religion ne peuvent constituer des atouts ou des arguments de référence pour un démocrate burkinabè, et les réactions de l’opinion ou des internautes, malgré les regrets exprimés par «Le Faso Autrement» et la mise au point de son Président précisant que «Jeune Afrique» avait tronqué et dénaturé ses propos, en sont une bonne confirmation.
De même, un journal de la place a attribué au Vice-Président du MPP pour la région du Centre, la déclaration suivante qui aurait été faite le 10 juin 2015 à ses militants, au cours d’une réunion de la Coordination des marchés et yaars du MPP: «Préparez vos fusils, munitions, couteaux pour accompagner Roch à Kosyam». Il paraît heureusement que la phrase aurait été mal rapportée, qu’elle a été sortie de son contexte et qu’il ne s’agissait que d’une image utilisée par son auteur.
C’est donc le lieu d’appeler aussi les médias à plus d’objectivité et de professionnalisme dans la couverture des évènements et des déclarations des politiques, afin de rendre compte de façon juste, des faits et des propos des hommes politiques.
Toutes ces dérives langagières regrettables et inacceptables, si elles avaient été effectivement tenues, pourraient avoir pour conséquences de dresser artificiellement les Burkinabè les uns contre les autres sur des bases foncièrement contraires à leurs propres intérêts. Le PDS/Mètba espère que la leçon a été amplement tirée par les journalistes, ceux auxquels on les a attribuées et tous les autres acteurs politiques.
IV – A PROPOS DE L’A- VENIR DU REGIMENT DE SECURITE PRESIDENTIELLE
En février 2015, à la suite du projet d’interpellation violente dont le Premier Ministre Isaac Zida risquait de faire l’objet de la part du Régiment de sécurité présidentielle (RSP), projet qui l’avait contraint à se rendre matinalement au palais du Mogho Naaba, le Président du Faso avait longuement conféré avec les chefs de l’Armée. Il avait ensuite annoncé qu’une commission militaire devait être mise sur pied pour soumettre dans les trois mois un rapport sur la réforme de l’Armée et l’avenir du RSP. Le 12 juin dernier, après la présentation au Conseil national de Transition (CNT) de son rapport sur la situation de la nation, le Premier Ministre, répondant à la question d’un député de la société civile a déclaré : «L’armée a besoin du RSP, le pays a besoin du RSP… Ça fait 20 ans que je suis au RSP, je connais les capacités de ce régiment ; je confirme que nous en avons besoin ». Cela sous-entend qu’à court terme, il ne serait apporté aucune modification à la situation de ce régiment. Des fuites sur le rapport de la commission militaire, parues dans la presse, préciseront que c’est aux premiers responsables du RSP que la charge de rédiger le rapport sur l’avenir du RSP aurait été confiée. Dans ces conditions, on ne peut pas s’étonner de ses conclusions dont l’objectivité devient alors douteuse.
Si ces informations parues dans la presse et non démenties étaient avérées, et même s’il n’est pas compétent dans le domaine militaire, le PDS/Mètba pose les questions suivantes :
1- Pourquoi les principaux éléments et conclusions du rapport de la commission militaire ne sont-ils accessibles à tous ?
2- Pourquoi avoir confié l’examen de l’avenir du RSP aux premiers responsables de ce régiment ?
3- Si l’unité militaire qu’elle constitue est «utile», pourquoi ne peut-on rien changer au RSP, ni sa localisation autour du palais de Kosyam, ni son nom, ni sa mission dans la sécurité présidentielle ?
Depuis les derniers jours du mois de juin, la ville de Ouagadougou bruit de rumeurs confirmées partiellement par les médias. On dit qu’un bras de fer opposerait à nouveau, après les incidents similaires du 30 décembre 2014 et du 4 février 2015, le RSP et le Premier ministre Yacouba Isaac Zida, ancien N°2 de l’unité, avant le 31 octobre 2014. Ce dernier aurait été menacé à nouveau d’arrestation par ses anciens camarades du RSP, le 28 juin 2015, au retour de son voyage en Asie.
La gendarmerie aurait auditionné dès le lendemain certains chefs du régiment, déclenchant des réactions d’humeur de leurs soldats. Certains avancent même qu’il y a eu lutte entre partisans et adversaires de l’ancien n°2 du RSP, suivie de l’arrestation de quelques soldats !
Il est inconcevable qu’au sein de l’armée nationale, une unité que beaucoup considèrent comme «d’élite», puisse, de son propre chef, menacer volontairement et à plusieurs reprises, l’intégrité physique d’une institution de la Transition, à savoir le chef du Gouvernement, de surcroît ministre de la Défense. Il est inacceptable que le RSP, parce qu’il est mécontent de son ancien chef, s’ingère dans le fonctionnement de l’Etat et perturbe ainsi gravement la marche de la Transition.
Le PDS/Mètba estime que les agissements du RSP remettent en cause son maintien comme unité chargée de la protection des institutions ainsi que son casernement au sein du palais présidentiel de Kosyam.
V – SUR LES ENQUETES POUR CRIMES ECONOMIQUES
Après la victoire de l’insurrection populaire des 30 et 31 octobre 2014, chacun pensait que la lutte contre les détournements des deniers publics et l’enrichissement illicite connaîtrait rapidement des avancées rapides, alimentée notamment par les dossiers de l’Inspection générale d’Etat devenue Autorité supérieure de contrôle d’Etat (ASCE), qui étaient systématiquement enfermés à clef dans les tiroirs des Premiers ministres et du Président du Faso, sous l’ère Compaoré. La création en avril 2015 de la Haute Cour de justice auprès du CNT, et les premières interpellations opérées apparemment dans ce cadre, avaient paru donner une nouvelle consistance à cette lutte. Plusieurs mois après, le PDS/Mètba est au regret de constater que les choses restent en l’état.
Le PDS/Mètba pense traduire le vœu de tous en demandant que les enquêtes sur les crimes économiques commis contre les ressources publiques soient menées rapidement et en profondeur, et que justice soit effectivement rendue à notre peuple.
Ouagadougou, le 04 juillet 2015
Pour le BEN du PDS/Mètba
Le Président
Philippe OUEDRAOGO