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IMPORTATION DU NITRATE D’AMMONIUM AU BURKINA  


Dans ce communiqué, le procureur du Faso près le Tribubal de grande instance (TGI) de Ouagadougou, Harouna Yoda, annonce des poursuites judiciaires contre des sociétés dans une affaire d’importation du nitrate d’ammonium au Burkina.

 

 

« Le contentieux entre la direction générale des Douanes ( DGD) et la Société générale de transit (SOGETRA) P/C AEL et BME sur le classement tarifaire du nitrate d’ammonium ANPP et ANE. Courant année 2013, les services des douanes ont constaté que deux (02) sociétés, à savoir Burkina Mining Compagny (BMC) et Bulk Mining Explosives (BME), toutes spécialisées dans la production des explosifs pour les sociétés minières, déclaraient le nitrate d’ammonium qu’elles importaient à la position tarifaire 3 102 qui est celle de l’engrais destiné à la fertilisation des sols pour l’agriculture au taux cumulé de 3,5 % de droits et taxes de douanes au lieu de la position 3 602 (nitrate d’ammonium contenant des substances explosives) au taux de 36 %. Le nitrate d’ammonium importé au Burkina Faso est contenu dans des emballages estampillés ONU UN 1 942, et est classé comme produit dangereux en matière de transport. Les spécifications techniques montrent que ce produit contient au moins 0,2% de matières combustibles donc exclu du chapitre 31 (engrais) de la nomenclature tarifaire de l’Organisation mondiale des Douanes. La douane estimait que le classement du nitrate d’ammonium destiné à fabriquer des explosifs pour les sociétés minières comme une substance destinée à la fertilisation des sols, n’était qu’une manœuvre pour profiter de la Loi N°041-2010/AN du 2 décembre 2010 portant loi des finances pour l’exécution du budget de l’Etat, gestion de l’exercice 2011 qui exonère les engrais (chapitre 31 du tarif des douanes) de la Taxe sur la valeur ajoutée (TVA). En se fondant sur les règles Générales interprétatives du système harmonisé et la description technique du nitrate d’ammonium importé à des fins de production d’explosif, le service des douanes avait dressé deux (2) procès-verbaux à cette époque pour constater l’existence d’une fausse déclaration d’espèce tarifaire et un manque à gagner pour le Trésor Public. Les deux sociétés sus-citées ont, par la voix de leur déclarant, à savoir le groupe Bolloré (SDV) et la Société Générale de Transit Burkina (SOGETRA), refusé la reconnaissance du service. En 2015, pendant que le contentieux était en cours, la société African Explosives Limited (AEL), filiale du groupe AECI qui déclarait ses importations de nitrate d’ammonium en provenance de la Russie et de la Suède avec des Autorisations spéciales d’importation et des Déclarations préalables d’importation (DPI), a déclassé son produit de la position 3 602 à la position 3 102. Elle importait désormais sans Autorisation spéciale d’importation et déclarait le nitrate d’ammonium comme de l’urée destiné à l’agriculture. Un procès-verbal fut également dressé par le service des douanes et la société AEL, par la voie de son déclarant, SOGETRA, a refusé également la reconnaissance du service. Toujours courant 2015, la société MAXAM abandonnait aussi la position 3 602 au profit de la position 3 102 pour toutes ses importations de nitrate d’ammonium. En juillet 2015, le directeur général a pris une note de service instruisant ses services de percevoir la TVA sur les importations du nitrate d’ammonium car, l’importation de ces produits ne bénéficiait pas de la loi N° 041 de 2010. Le comité technique du Système Harmonisé (SH) de la Direction de la Législation et de la Règlementation de la DGD avait été saisi par le bureau des douanes de Ouaga Route pour départager les différents protagonistes. Au regard des enjeux pour chaque partie, notamment le volume des recettes que perdait le budget de l’Etat et l’équivalent que les sociétés importatrices du nitrate d’ammonium devaient payer d’une part, et dans un souci de transparence, d’équité et d’indépendance d’autre part, le comité technique du SH de la DGD a porté le dossier auprès du comité du SH de l’Organisation mondiale des Douanes (OMD) à Bruxelles. Ce comité, au cours de sa 59e  et 60e  session de 2017, a délibéré sur le classement du nitrate d’ammonium en retenant la position 3 602 comme étant l’espèce tarifaire du nitrate d’ammonium destiné à la fabrication des explosifs. A l’issue de la décision de classement de l’OMD qui a conforté l’Administration des Douanes du Burkina Faso dans sa position, le directeur général des douanes a invité toutes les sociétés concernées par ce litige, le 24 novembre 2017, pour d’abord les mettre au courant de la décision de l’OMD et faire aussi le point de ce que chacune d’elle doit au budget de l’Etat. Elles ont toutes été invitées à déclarer le nitrate d’ammonium à la position 3 602 et c’est la pratique depuis fin 2017.

 

Le tableau récapitulatif suivant a été présenté :

 

Déclarants Sociétés Importations ( poids net en tonne) Valeur en francs CFA Droits et taxes éludés

SDV(BOLLORE) BMC 1 208,493/615 429 116/137 438 976.

SOGETRA BME 3 416,477/1 614 523 370/ 351 780 828.

AEL 22 920/7 954 826 788/1 653 080 747.

NTB MAXAM 8 915,6/2 445 485 168/190 000 977.

 

Les sociétés MAXAM et BMC, par leur déclarant NTB et BOLLORE, se sont soumises à la décision de l’OMD en s’acquittant des droits et taxes éludés avec paiement d’amendes. Les représentants d’AEL et de BME, en présence de leur déclarant, ont manifesté d’abord leur désapprobation au vu du montant de droits et taxes éludés qui n’est autre que la conséquence de leur refus du classement proposé par l’Administration des Douanes en 2013 et 2015. Elles ont par la suite tenté un règlement transactionnel en s’approchant de l’Administration des douanes avec des propositions fantaisistes qui n’ont pas prospéré. Le groupe AECI et la société BME qui ont refusé d’assumer les conséquences de la décision de l’OMD, se sont mis dans le dilatoire pour occulter les intérêts du Trésor public alors que l’avis de classement a été une demande expresse de l’Administration des Douanes Burkinabè pour mettre fin au litige qui l’opposait aux sociétés importatrices du nitrate d’ammonium et préserver les intérêts de l’Etat. La DGD, en raison de l’absence de transaction, a saisi, conformément à la procédure douanière, mon parquet de trois (03) procès-verbaux concernant les sociétés AEL et BME. Outre l’infraction de fausse déclaration d’espèce tarifaire, j’ai relevé, sur la base des documents fournis, les infractions de faux et usage de faux en écriture privée, de blanchiment de capitaux. J’ai alors saisi la Division de la Police Economique et Financière (DPEF) en vue d’une enquête criminelle complémentaire et une enquête patrimoniale. Les renseignements découlant de l’enquête ont abouti à la saisine du président du Tribunal d’une requête aux fins de saisie pénale effective des comptes bancaires de la SOGETRA ainsi que de ses deux clients AEL et BME. Outre cela, les biens mobiliers, notamment des véhicules appartenant aux trois sociétés ainsi que quatorze (14) camions et neuf (9) camions chargés de nitrate d’ammonium ANPP et ANE appartenant respectivement à AEL et BME, ont été saisies sur la base de l’ordonnance du président du Tribunal. Il m’a été donné de constater que depuis cette saisie pénale de marchandise effectuée conformément aux articles 532-1, 534-1, 535-1 du Code de procédure pénale, des personnes s’improvisant expertes sécurité des personnes et des biens sur fond d’intimidations s’analysant en des actes d’obstruction à la justice, tentent de dénoncer la saisie en soutenant qu’elle est faite de nature à exposer la sécurité des populations en raison de la nature dangereuse de la marchandise. Sachant que ces interpellations inopportunes émanent assurément de personnes intéressées par la procédure, je tiens à porter à la connaissance de l’opinion publique que c’est sur la base de la sensibilité de la marchandise que le juge a constitué le directeur général des Douanes en qualité de séquestre de la marchandise. Bien au contraire, ce sont ces genres d’interpellations qui promeuvent l’insécurité en ce sens qu’elles visent à cristalliser l’attention de personnes mal intentionnées sur la marchandise. En tout état de cause, la procédure judiciaire suivra donc son cours normal nonobstant les lamentations sans fondement légal aucun émanant tant de ces lobbies que de leurs commettants sur les réseaux sociaux. Sous réserve d’une transaction qui peut intervenir légalement entre l’administration douanière et les contrevenants, j’exercerai donc bientôt les poursuites pénales appropriées contre les sociétés SOGETRA, AEL et BME ainsi que leurs représentants légaux et préposés dont les actions, aux antipodes de la légalité, ont concouru à la consommation des infractions relevées.   

 

Le Procureur du Faso

Harouna Yoda

 

 

 


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