HomeA la uneINHUMATION DES SOLDATS TUES LE 2 MARS : Colère et indignation au cimetière de Gounghin

INHUMATION DES SOLDATS TUES LE 2 MARS : Colère et indignation au cimetière de Gounghin


 

Le 2 mars dernier, Ouagadougou essuyait une double attaque terroriste avec pour principales cibles, l’Etat-major général des armées et l’ambassade de France au Burkina. Cette énième attaque dont a été victime la capitale burkinabè, a fait 8 victimes dans les rangs des Forces de défense et de sécurité (FDS).  Ces dernières, après avoir reçu les hommages de la Nation, ont été conduites à leur dernière demeure, le 7 mars 2018, au cimetière municipal de Gounghin.

 

La levée du corps des huit éléments des FDS tombés sur le champ d’honneur est intervenue le 7 mars dernier, au camp Sangoulé Lamizana, aux environs de 13h. S’en est suivie une cérémonie de décoration à titre posthume. Les cercueils, par la suite, ont été disposés sur un porte-char dont la remorque avait, pour l’occasion, été entièrement recouverte des couleurs nationales. Debout à côté des cercueils, des soldats tenaient les photos de leurs frères d’armes tombés. Et, c’est autour de 15h que le cortège des dépouilles arrivait au cimetière municipal de Gounghin. Sur place, ils se comptaient par centaine ceux qui avaient fait le déplacement pour accompagner les 8 éléments des FDS à leur dernière demeure. Autorités politiques, coutumières et religieuses, amis et connaissances des victimes ont tous voulu témoigner leur solidarité aux familles éplorées en cette soirée du 7 mars. Mais, avant d’accéder au cimetière, tous ont montré patte blanche en se soumettant aux fouilles corporelles. Contexte sécuritaire oblige. Sur leurs visages, on pouvait lire la tristesse et le désarroi. Les frères d’armes des soldats tombés ne dérogeaient pas à la règle. Eux qui, habituellement, sont l’expression même de la force et du courage étaient visiblement très abattus. Ceux qui, rien que par leur présence, rassurent et donnent du réconfort, cet après-midi du 7 mars au cimetière de Gounghin, avaient des regards plutôt ternes. L’atmosphère, et c’est peu dire, était chargée de vives émotions lorsque des militaires portaient les cercueils et les photos des victimes pour les disposer en colonne devant les tombes déjà creusées. En effet, avec cette scène, au désarroi et à la tristesse qu’il y avait sur les visages, il fallait maintenant ajouter de la colère et de l’indignation. En témoignent les soupirs et les onomatopées de consternation que les uns et les autres lâchaient par moments. C’est presqu’en larmes que le chef d’état-major adjoint des armées, le colonel-major Théophile Palé, a lu l’oraison funèbre. Le silence était pesant. En dehors du bruit de l’aéronef qui survolait la zone, durant tout le temps de l’enterrement, tous étaient suspendus aux lèvres du Colonel-major qui présentait les soldats tués. Certains parents des victimes, ne pouvant se retenir, fondaient en larmes et lançaient des cris de désarroi lorsque le Colonel-major venait à prononcer le nom de leur proche.  En effet, pour leur rendre hommage, toutes les victimes ont été citées l’une après l’autre et leurs parcours retracés. « Votre sacrifice pour la patrie traduit votre engagement pour le respect de votre serment de défendre le Burkina Faso », a lancé le Colonel-major après leur présentation. Mais quel a été le parcours de ces soldats tombés sur le champ d’honneur ?

Assami Nikiéma, le plus jeune des victimes, avait 21 ans

Djibril Lallé avait été promu colonel depuis octobre 2009. Cet officier supérieur de l’armée a passé 34 ans et 5 mois au service de la Nation, au sein des FDS, avant de tomber sous les balles assassines des terroristes. Il laisse derrière lui une veuve et trois enfants. Louis Kiemdé, lui était Adjudant-chef major depuis juillet 2010. Après 36 ans de service dans l’armée burkinabè, il a été mortellement touché lors des dernières attaques et laisse derrière lui une veuve et un enfant. La  3victime, l’Adjudant-chef Hyacinthe Ouédraogo, était dernièrement en poste à la direction de la communication et des relations publiques des armées. Ce soldat dont les camarades louent les qualités, a totalisé 31 ans et 5 mois de service. Il laisse derrière lui une veuve et 3 enfants. Sergent Idrissa Mando a été engagé dans l’armée en 2002. Depuis 2017, il a travaillé à l’Etat-major comme secrétaire du colonel Djibrill Lallé. Il totalise 16 ans et 3 mois de service et laisse derrière lui deux enfants. Florent Sanou était lui aussi sergent. Il a été dit de lui qu’il était un sous-officier exemplaire toujours disponible. Il aura servi dans l’armée pendant 18 ans et trois mois. Aujourd’hui, il n’est plus et laisse derrière lui une veuve et deux enfants. Le Marechal des Logis Razakou Diabri fait partie des plus jeunes victimes. Elevé au grade de maréchal des logis rien qu’en octobre 2017, il n’aura totalisé que 2 ans et un mois de service au sein de l’armée avant d’être assassiné. Yoropo Kohoun, soldat de première classe tout comme l’adjudant-chef Hyacinthe Ouédraogo, était affecté à la direction de la communication et des relations publiques des armées.  Après 12 ans et 3 mois de service dans l’armée, il est tombé le 2 mars dernier, les armes à la main, laissant derrière lui un enfant. Le Soldat de deuxième classe Assami Nikiéma, est le plus jeune des victimes et avait 21 ans. Né le 21 août 1996 il a incorporé l’armée le 1er décembre 2016 avant d’être lui aussi assassiné lors de l’attaque du 2 mars dernier. Cette attaque, le colonel-major Théodore Palé l’a qualifiée de « lâche », « barbare » et « ignoble ». « Mais, loin de nous ébranler, elle nous commande de resserrer nos rangs, de rester unis et déterminés pour vaincre ensemble notre ennemi. Notre engagement et notre détermination trouvent leur source dans le sang versé par nos camarades tombés ce 2 mars 2018 », a conclu le chef d’Etat-major adjoint des armées. S’en est suivie l’inhumation en terre pleine des soldats.

Les frères d’armes tombés ne sont pas tombés en vain

Tout en saluant la mémoire des soldats tombés, le chef d’Etat-major général des armées, Oumarou Sadou, a montré sa reconnaissance au peuple burkinabè pour l’élan de solidarité dont il a fait montre depuis les évènements. « A nos forces armées, nous avons dit que notre devoir n’est pas un devoir léger. C’est un devoir qui est permanent, qui demande de l’engagement à tous les niveaux et qui conduit parfois au sacrifice des camarades de tout grade. Notre engagement, c’est de défendre notre pays autant que nous pouvons, dans la limite de nos ressources physiques et jusqu’au sacrifice », a-t-il ensuite lancé aux FDS. Et d’ajouter que les frères d’armes tombés ne sont pas tombés en vain. Le combat, a-t-il signifié, va se poursuivre avec le soutien de toutes les composantes. Embouchant la même trompette, le ministre en charge de la sécurité, Clément Sawadogo, a, lui aussi, indiqué que des efforts sont en train d’être fournis pour mieux faire face au phénomène afin que la peur change de camp. Présente également au cimetière de Gounghin, le Médiateur du Faso, Saran Séré/Sérémé, a indiqué que certes, la situation qu’a connue le pays est terrible, mais  le peuple burkinabè saura rester debout. « Le peuple fait toujours confiance à son armée et lui apportera son soutien afin de lutter contre cet ennemi si vicieux et si lâche qui sait frapper où ça fait mal », a-t-elle soutenu. Le maire de Ouagadougou, Armand Roland Pierre Béouindé, pour sa part, a invité l’ensemble des citoyens à la vigilance. « Au-delà des mesures sécuritaires, les citoyens doivent apprendre à faire attention à leur environnement, à leur voisinage sans tomber dans la psychose », a-t-il lancé. En outre, il a salué la mobilisation dont ont fait montre les Ouagalais pour accompagner les soldats à leur dernière demeure. A ce propos, Souleymane Nikiéma, oncle de la victime Assami Nikiéma, dira  : « Nous sommes tristes, mais vu le monde qui s’est rassemblé pour les accompagner à leur dernière demeure, nous ne pouvons que remercier les gens et demander à tous de se mettre debout pour lutter contre ce phénomène ».

Adama SIGUE

 

 

 Les 8 éléments des FDS tombés sur le champ d’honneur le 2 mars dernier

 

1- Le colonel Djibril Lallé

2- L’adjudant-chef major Louis Kiemdé

3- L’adjudant-chef Hyacinthe Ouédraogo

4- Le Sergent Florent Sanou

5- Le Sergent Idrissa Mando

6- Le Maréchal des logis Razakou Diabri

7 Le soldat de 1re classe Yoropo Kohoun

8 Le soldat de 2e classe Assami Nikéma


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