INSECURITE DANS LE SAHEL : Vivement que l’année scolaire prenne fin !
Le vendredi 10 mars dernier, après une nuit très agitée, je me suis levé pour aller chercher du pain chez le boutiquier du quartier. Il était environ 8h30. Au passage, j’ai constaté que les salles de classe de l’école publique de ma zone étaient fermées. Je me suis alors demandé pourquoi les enseignants et leurs élèves avaient vidé les lieux, ce jour-là. C’est en suivant les infos que je me suis rendu compte de ce qui se passait. En fait, un peu partout au Burkina Faso, les enseignants observaient, ce jour-là, une journée d’hommage à leur collègue Salif Badini, assassiné par des « individus armés non identifiés », le 3 mars dernier.
Ah, comme dirait l’autre, « qui est fou » ? Dans cette affaire de djihadistes, chacun doit « chercher son nez » et c’est là que je comprends cette mobilisation au sein du monde éducatif. Tout le monde le sait, le Sahel burkinabè est devenu un nid de terroristes et de bandits aux intentions inavouées. J’en veux pour preuve, les nombreuses attaques dont le bilan en termes de cadavres est plus que macabre. Populations, élus locaux, soldats, enseignants,… chacun a désormais son lot de cadavres et on ne sait pas à quel moment la tragédie prendra fin. Si la psychose s’est emparée de toute la population du Sahel avec les conséquences que cela comporte, on peut dire que son impact sur le monde éducatif est terriblement désastreux.
Tenez, c’est avec la peur au ventre que les plus téméraires des instituteurs continuent d’aller donner cours. Je vous assure qu’ils ne sont pas nombreux, ces « courageux » qui « pointent » encore leur « nez » dans une salle de classe dans le Sahel. A vrai dire, l’heure est à la débandade. Avec juste raison. Car après l’assassinat de leur collègue Salif Badini par des djihadistes, personne ne veut risquer sa vie. Voilà la réalité. En l’espace de quelques mois seulement, le Sahel se retrouve ainsi sans école et les parents d’élèves se demandent comment assurer l’enseignement de leurs enfants. Et ce n’est pas le Sahel seulement qui est concerné par le problème. La région du Centre-Nord (avec le Bam) est dans la même situation.
On préfère être dans le chômage que d’aller se faire trucider dans le Nord du Burkina
Une simple rumeur peut provoquer une panique générale, comme ce fut le cas dans le Sanmentenga, il y a de cela quelques jours. Des enseignants de la région ont, en effet, déserté les classes à cause d’une rumeur.
Dans ce contexte de terreur, inutile de dire que l’année scolaire est trop longue pour certains. Moi, en tout cas, je souhaite qu’elle prenne fin le plus rapidement possible, pour soulager la peine de ces milliers d’enseignants qui sont dans des contrées très « réculées » du Burkina Faso et qui semblent abandonnés par l’Etat à leur triste sort. Au-delà de cette question de la fin de l’année scolaire, je crois que les différents acteurs de l’éducation doivent s’interroger sur l’impact que la situation sécuritaire dans le Sahel, pourra avoir comme conséquences sur les résultats scolaires. Je ne suis pas là-bas, mais je sais que les programmes scolaires ne sont pas encore achevés. Et cela peut se ressentir dans les résultats aux examens de fin d’année. Déjà que le niveau des élèves baisse dans ce pays, que dire face à une situation pareille ?
Je terminerai en disant que si l’Etat ne prend pas ses responsabilités au Sahel, ce sera un facteur de plus pour saper tous les efforts accomplis pour relever les défis en termes d’éducation, et donc de développement, dans cette zone. Car selon certains échos que j’entends dans les maquis, kiosques, cabarets et même dans d’autres lieux, le personnel de l’éducation n’a pas envie de se faire affecter dans cette zone. Car, dit-on, on préfère être dans le chômage que d’aller se faire trucider quelque part dans le Nord du Burkina Faso. Evidemment, ce sont des discours qu’il faut vite déconstruire.
« Le Fou »