INVESTITURE DE GEORGE WEAH : Début de match en fanfare
C’est aujourd’hui, 22 janvier 2018, à Paynesville, au complexe sportif Samuel Kanyon Doe, que George Weah prend officiellement les rênes du pouvoir au Liberia, en remplacement de Ellen Johnson Sirleaf. L’évènement aura lieu en présence du gotha de la classe politique africaine dont les présidents Nana Akufo-Addo du Ghana, Faure Gnassingbé du Togo par ailleurs président en exercice de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), Alpha Condé de la Guinée-Conakry, président en exercice de l’Union africaine (UA), Ernest Bai Koroma de la Sierra Leone, Alassane Ouattara de la Cote d’Ivoire, Ali Bongo du Gabon, Muhammadu Buhari du Nigeria, José Mario Vaz de la Guinée-Bissau et Jacob Zuma de l’Afrique du Sud. C’est dire donc que le stade refusera du monde, car personne, à Monrovia, ne voudra se faire conter l’événement.
Les défis s’annoncent immenses
Cette cérémonie en apothéose est d’abord l’aboutissement d’un rêve personnel. Car les ambitions présidentielles de l’ex-star du football ne datent pas d’aujourd’hui. Mais l’homme a patiemment su tisser sa toile et attendre son heure. Au-delà de la réussite personnelle, l’avènement de George Weah au pouvoir, comme 25e président du Liberia, traduit la volonté du peuple libérien démocratiquement exprimée dans les urnes et surtout l’espoir des couches populaires les plus défavorisées, d’un monde meilleur. C’est dire donc que les défis s’annoncent immenses pour le tout nouveau président. Les plus urgents sont le maintien de la stabilité, pour un pays dont l’histoire est des plus mouvementées avec en sus de longues années de guerre civile, la pauvreté ambiante et la corruption. La question que l’on peut se poser est de savoir si le Ballon d’or libérien saura, dans l’exécution de son coup franc, percer le mur des difficultés et trouver le chemin des buts. La réponse à la question n’est pas évidente. Du reste, une certaine opinion qui a cours dans la frange des descendants des esclaves venus d’Amérique, considère que le nouveau président n’est pas un intellectuel et ne dispose donc pas des aptitudes nécessaires pour présider aux destinées d’une Nation. Toutefois, George Weah peut être pris à son propre piège en voulant faire du neuf avec du vieux. En effet, sa colistière est la femme de l’ex-président Charles Taylor et il a aussi bénéficié du soutien de Prince Johnson. Le risque est donc grand qu’il soit pris dans le jeu des intérêts partisans de collaborateurs qui rêvent de régler leurs comptes du passé. Toutefois, il appartient à « Mister George » de faire mentir tous ces préjugés qui peuvent ne relever que de l’imaginaire, en se montrant à la hauteur de la tâche qui l’attend. Et pour ce faire, le moins que l’on peut dire, c’est qu’il dispose de nombreuses cartes entre ses mains. D’abord, il part avec la légitimité d’une élection propre, qui n’a souffert d’aucune contestation. Ensuite, il bénéficie d’une véritable onction populaire qu’il a tirée de ses œuvres caritatives qu’il mène toujours en faveur de son peuple. Aussi dispose-t-il de nombreux soutiens au sein de la classe politique.
Le navire est lancé à la mer et c’est au capitaine de le mener à bon port
Nonobstant ceux de Prince Johnson et de l’épouse de Charles Taylor, il bénéficie aussi de celui de la présidente sortante dont l’expérience lui servira, sans nul doute, de véritable mine d’or. L’on peut penser qu’en tant que Ballon d’or, George Weah dispose d’un carnet d’adresses bien rempli qu’il pourra mettre au service du développement de son pays. En plus des liens ombilicaux qui lient son pays à l’Oncle Sam, le nouveau président peut compter sur la France où il a fait ses armes dans le milieu du football. Enfin, l’homme surfe sur un vent de réconciliation, en ayant, semble-t-il, réussi le pari de rassembler dans son équipe toutes les factions ennemies du douloureux passé du Liberia. L’on pourrait donc dire que le navire est lancé à la mer et c’est au capitaine de le mener à bon port, malgré les vagues écumantes. Cela dit, au moment où George Weah dépose ses pénates à la présidence du Liberia, incarnant tous les espoirs, l’on doit savoir aussi rendre hommage à son prédécesseur, Ellen Johnson Sieleaf. Elle a réussi à maintenir stable le navire libérien, alors que les rafales de la tempête de la guerre civile continuaient à balayer les côtes libériennes et a su faire preuve de poigne dans la lutte contre la corruption et les détournements de deniers publics, en l’occurrence les fonds alloués à la lutte contre l’épidémie de la fièvre Ebola. Enfin, contrairement à ce qui se passe ailleurs sur le continent, Ellen Jonshon Sirleaf s’est soumise aux règles de l’alternance politique, en acceptant de passer le témoin à son successeur au terme d’élections libres et transparentes. Et c’est en ce sens d’ailleurs qu’il faut déplorer la présence, à cette cérémonie d’investiture qui magnifie l’alternance démocratique, d’auteurs de hold-up électoraux comme Ali Bongo du Gabon et Faure Gnassingbé du Togo.
« Le Pays »