HomeA la uneJOURNEE MONDIALE DE LA LIBERTE DE LA PRESSE Pour l’amélioration des rapports entre Hommes de médias et acteurs de la justice

JOURNEE MONDIALE DE LA LIBERTE DE LA PRESSE Pour l’amélioration des rapports entre Hommes de médias et acteurs de la justice


 

 

La problématique des relations entre les médias et les acteurs de la Justice était au cœur d’un atelier de réflexion initié par le Centre national de presse Norbert Zongo (CNP-NZ), le mercredi 2 mai 2018, à Ouagadougou. Une activité qui entre dans le cadre de la commémoration de la Journée mondiale de la liberté de la presse.

 

Pendant que les acteurs judiciaires évoquent le secret de l’instruction ou encore la présomption d’innocence des accusés pour refuser de donner certaines informations aux hommes et femmes de médias, les journalistes, eux, invoquent le droit du public à l’information et la nécessité du jeu de la transparence à laquelle est astreint l’appareil judiciaire pour exiger l’accès à certains documents. C’est le constat fait par le Centre national de presse Norbert Zongo (CNP-NZ) qui relève dès lors que les incompréhensions et frictions sont quasi permanentes entre acteurs de la Justice et ceux des médias. Au vu de cette situation, le CNP-NZ, dans le cadre de la célébration de la Journée mondiale de la liberté de la presse, a choisi d’organiser, le 2 mai dernier, à Ouagadougou, un atelier de réflexion sur la problématique des relations entre les médias et les acteurs de la Justice. Et selon Boureima Ouédraogo, président du comité de pilotage du CNP-NZ, il s’agissait, à travers une telle rencontre d’échanges, de voir comment améliorer les rapports entre ces acteurs. L’objectif était d’offrir aux journalistes et aux acteurs de la Justice, un espace de dialogue et d’échanges afin de leur permettre de mieux se connaître en vue de mieux servir le Burkina et la démocratie. Pour la circonstance, des personnalités du monde judiciaire et des médias sont intervenues sur des aspects précis. Ainsi, Arouna Yoda, premier substitut du Procureur du Faso, a tenu à souligner que l’Etat de droit a pour socle la justice et qu’il se caractérise par l’effectivité de la presse tout en relevant que ce sont deux institutions importantes dans un Etat de droit. « Deux institutions souvent confrontées à des couacs », a indiqué Arouna Yoda, puisque le journaliste est à la recherche de l’information et le magistrat retient l’information. La solution, dit-il, c’est de se connaître mutuellement, d’accepter les contraintes de l’autre et que chacun fasse son travail dans les limites de ce que la loi lui permet de faire. Le colonel Sita Sangaré, directeur de la Justice militaire, a fait savoir qu’il ne devrait pas y avoir d’incompréhensions entre les Hommes de médias et les acteurs de la Justice et que cela est dommageable à l’information du peuple. Et de rappeler que la Justice est rendue au nom du peuple et que les journalistes travaillent pour le peuple, pour l’informer. Selon le colonel Sita Sangaré, les juges ne refusent pas de communiquer mais, dit-il, ils ont des contraintes légales, surtout que la loi dit par exemple que « le secret de l’instruction s’oppose aux magistrats » et l’objectif, c’est d’éviter de nuire à la manifestation de la vérité.

« Entre le juge et le journaliste, il y a toujours une sorte de rivalité »

 

Boureima Jérémie Sigué, fondateur des Editions « Le Pays » et le Pr Serge Théophile Balima, ont réagi sur « les enjeux de la communication judiciaire dans un contexte post- insurrectionnel : comment amener les journalistes et les acteurs de la Justice à mieux travailler ? ». Le premier cité a indiqué dans un premier temps que médias et justice constituent, a priori, un binôme explosif au regard du poids des préjugés et des vécus et que sous ce rapport, c’est souvent entre eux, une histoire d’amour orageuse mais aussi, une histoire d’estime réciproque. Et Boureima Jérémie Sigué de relever que, par essence, « médias et justice sont à la fois contradictoires, complémentaires et indispensables à l’homme autant que l’air que nous respirons ». Ajoutant que leurs démarches sont souvent fondamentalement différentes, mais elles visent, toutes les deux, le même but qu’est la vérité. Le conférencier a confié qu’ils ont des allures différentes pour y parvenir. Et de confirmer cela par le fait que les médias sont réputés pressés pour des raisons de scoop, de timing et autre  concurrence pendant que la Justice se montre souvent d’une impassibilité jugée parfois excessive par le citoyen ordinaire. C’est tout comme deux mondes qui, constamment, s’attirent et se repoussent sur le terrain des intérêts professionnels, constate Boureima Jérémie Sigué, avant de trouver normal qu’ils se télescopent et se retrouvent dans le prétoire. Mais, le fondateur des Editions « Le Pays », tout comme bien d’autres intervenants, a relevé qu’il n’y a pas seulement que des gens vertueux dans le milieu des médias. Puisque, fait-il savoir, il y a des gens qui trompent délibérément par esprit partisan, de colère ou encore par jalousie, parfois « en raison d’une tendance morbide au dénigrement ». Pour Boureima Jérémie Sigué, « dire la vérité est quelque chose de difficile parce que l’on ne voit pas toujours tous les aspects de la vérité à la fois ». « Entre le juge et le journaliste, il y a toujours une sorte de rivalité. Une rivalité dans le domaine de la vérité », a déclaré le Pr Serge Théophile Balima. Et de signifier, comme son prédécesseur, que le juge a besoin de temps pour rechercher sa vérité et le journaliste a besoin, dans l’urgence, de produire la vérité pour un public qui est impatient. Ainsi, affirme-t-il, il y a une confrontation des pouvoirs et c’est légitime, tout en relevant qu’entre la presse et la Justice, il y a toujours une relation et que même dans l’intimité, toute relation conduit à des ambiguïtés. Et de souligner qu’il y a parfois des conflits relativement ouverts. Pour lui, ces deux instances doivent d’abord défendre la démocratie, la vérité, la protection du citoyen parce que leurs missions sont similaires dans les objectifs, mais à la seule différence que le juge a un pouvoir qui lui est reconnu alors que le journaliste ne l’a pas. Le Pr Serge Théophile Balima a souligné que ces deux instances doivent travailler dans un partenariat, même s’il est indirect, afin d’améliorer leurs relations. Tout en relevant qu’il n’est pas satisfait du traitement de l’information judiciaire parce que le journaliste, souligne l’enseignant qu’il est, gagnerait à maîtriser davantage la procédure judiciaire, qu’il ne confonde pas les différents tribunaux parce que la Justice est complexe. Il doit apprendre à savoir avant de s’exprimer.

Antoine BATTIONO

 

 


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