KABILA AU VATICAN : Le Pape réussira-t-il à ramener sa brebis égarée dans l’enclos?

Le président de la République démocratique du Congo, Joseph Kabila, a été reçu hier, 26 septembre 2016, par le Pape François, au Vatican. Intervenant moins d’une semaine après les violences qui auront fait une quarantaine de morts et de nombreux blessés, cette visite présidentielle, bien que programmée avant la survenue de cette tragédie, aura été l’occasion pour le souverain pontife, d’évoquer non seulement les défis posés par la situation actuelle en RDC, mais surtout les événements qui ont mis à rude épreuve la paix ainsi que la situation que vivent les populations de l’Est de la RD Congo.  Ce fut aussi l’occasion pour le Saint-Siège de souligner au visiteur du jour, l’importance de la collaboration entre les différents acteurs pour promouvoir « le bien commun à travers un dialogue respectueux et inclusif pour la stabilité et la paix dans le pays ». La  question clé que l’on se pose est de savoir si après cette visite en lieu saint, Kabila sera suffisamment sage pour instaurer un vrai dialogue avec son peuple, notamment l’opposition et la société civile. La question se pose d’autant que jusque-là, le satrape n’a rien entrepris dans le sens de l’apaisement. Bien au contraire, les mesures prises, notamment l’interdiction de manifester et les arrestations tous azimuts d’opposants, montrent sa détermination à rester par tous les moyens au pouvoir au-delà des délais constitutionnels. Le Pape réussira-t-il à ramener sa brebis égarée dans l’enclos ?  Rien n’est moins sûr. En tout les cas, il faut souhaiter que le Pape ne prêche pas dans le désert.  S’il a accepté de recevoir cet homme aux mains tachées de sang, c’est qu’il espère sans doute avoir de l’ascendant sur lui, au point de l’amener à se repentir de ses nombreux crimes. Et Kabila devrait en être conscient.

Kabila doit se rendre à l’évidence qu’il ne peut pas continuer à massacrer impunément son peuple

Il  a d’autant plus intérêt à faire siens les conseils du Pape, que tout semble indiquer qu’il lui sera difficile de faire un passage en force.  Même la ruse a des limites. A preuve, son fameux dialogue national dans lequel il a voulu embarquer tout le monde et qui aura tourné court, ne lui aura pas, pour l’instant en tout cas, permis de parvenir à ses fins. Et les conditions de sa reprise semblent lui donner des vertiges. En effet, l’Eglise catholique et l’opposition congolaise posent, entre autres conditions de leur participation au dialogue, que Kabila s’engage publiquement à renoncer à un troisième mandat. Saura-t-il  éviter un chaos certain à son pays en renonçant à ses ambitions pouvoiristes? On attend de voir. La boulimie du pouvoir rend les dictateurs sourds à tout conseil. Or, comme le dit un adage africain, « quand un âne veut te faire tomber, tu ne vois pas ses oreilles ». Kabila court le risque, dans le meilleur des cas, de se faire chasser du pouvoir par son peuple et dans le pire des cas, de finir comme son père. Mais seuls lui et ses courtisans ne semblent pas en voir les prémices. C’est dire si après cette visite au Saint-Siège, Kabila gagnerait à mettre de l’eau dans son vin. Avec plus de quarante macchabées sur les bras, s’il doit encore en rajouter, la probabilité qu’il séjourne un jour à la Cour pénale internationale, n’est pas mince. S’il lui reste encore un peu d’amour pour son peuple, il doit, après avoir serré les « saintes mains » du Pape, emprunter les chemins qui mènent à Dieu. Et la meilleure manière de le faire, c’est de renoncer hic et nunc à ses ambitions périlleuses, avant qu’il ne soit trop tard. Kabila a une occasion en or pour faire la paix avec son peuple. Et il doit battre le fer pendant qu’il est encore chaud. Car, l’opposition n’a pas encore dit son dernier mot. Du reste, il doit se rendre à l’évidence qu’il ne peut pas continuer à massacrer impunément son peuple. Et les dictateurs qui n’ont pas compris cela, l’ont appris à leurs dépens.

DZ