LE MOGHO NAABA BAONGO A PROPOS DU PUTSCH MANQUE : « Gilbert Diendéré ne s’est pas refugié chez nous… »
Personnage discret, mais influent, le Mogho Naaba Baongo a toujours joué un rôle important dans la vie de la Nation. Personnalité respectée, elle est consultée à chaque fois qu’une crise majeure survient au Pays des Hommes intègres. Ce fut le cas lors de la crise consécutive au coup d’Etat du 16 septembre 2015 où son rôle très déterminant a permis à notre pays d’éviter un affrontement militaire. Le 13 novembre 2015, Sa Majesté a reçu une équipe de reporters des Editions « Le Pays » dans son Palais. Il s’est prononcé ici sur un certain nombre de sujets relatifs à la vie de la Nation et sur son rôle dans la résolution des crises au Burkina Faso. Ndlr : Les réponses nous ont été remises par écrit, donc sans aucune possibilité de relancer Sa Majesté.
Le Pays : Avez-vous foi que la date du 29 novembre sera la bonne pour la présidentielle et les législatives, après le coup d’Etat du 16 septembre 2O15 ?
Sa Majesté : Vu les déclarations des autorités gouvernementales, de celles de la classe politique et de la Commission électorale nationale indépendante (CENI), nous avons foi que la date du 29 novembre sera la bonne.
Comment avez-vous vécu le coup d’Etat ? L’avez-vous senti venir ?
Le coup d’Etat a été une surprise pour nous. Nous ne l’avons pas senti venir.
Quel est votre message à l’endroit des Burkinabè en général et des politiques en particulier, en prélude aux élections du 29 novembre 2015 ?
Notre message à l’endroit des Burkinabè est de leur demander de cultiver davantage la justice, la tolérance, le pardon, la solidarité. Nous leur demandons de garder jalousement ce que leurs aïeux leur ont légué. Aux politiques, nous leur demandons d’être plus responsables en travaillant pour la préservation de la paix. La paix avant, pendant et après les élections. En dernier ressort, nous leur demandons d’accepter les résultats qui sortiront des urnes ou à défaut, de faire recours aux institutions légales, si contestation, il y a.
Pouvez-vous nous confirmer que Gilbert Diendéré s’est refugié dans votre cour pendant le putsch ?
Non, il ne s’est pas refugié chez nous ; ni pendant, ni après le putsch.
Comment Gilbert a-t-il pu sortir du palais au moment où la foule hostile l’attendait dehors ?
Sa présence au Palais avait pour objectif de nous expliquer la situation qui prévalait. Après les salutations d’usage, il est ressorti par la porte de derrière pour éviter la foule devant la porte d’entrée principale.
D’aucuns disent que pendant le putsch, le RSP aurait violé la cour royale en pourchassant des manifestants. Confirmez-vous cela ?
L’ex-RSP s’est arrêté à la porte. Au même moment, j’étais à l’intérieur, dans le salon.
Certaines informations font état de l’implication d’un pays voisin dans ce putsch. Qu’en pensez-vous ?
Je crois qu’il ne m’appartient pas de dire qui est impliqué, et qui ne l’est pas. Il y a une commission d’enquête mise en place à cet effet et qui travaille pour établir la vérité sur toutes ces questions.
Est-ce que vous allez voter le 29 novembre prochain ?
Vous me posez là une question à laquelle je ne peux répondre. C’est une question indiscrète.
Que pensez-vous des chefs traditionnels qui font la politique ?
Nous pensons que l’Etat moderne ne le leur a pas interdit.
Vous avez fait une sortie pour demander que des notabilités traditionnelles et politiques ne parlent pas de politique en votre nom. Est-ce que le mot d’ordre a été suivi ?
Je pense que ce mot d’ordre a été suivi par les chefs traditionnels et nous nous en réjouissons.
Cette constitutionnalisation serait encore meilleure si la chefferie coutumière elle-même était impliquée
Que pensez-vous de l’idée du projet de constitutionnalisation de la chefferie coutumière ?
A ce niveau, je crois que c’est une bonne chose. Cette constitutionnalisation serait encore meilleure si la chefferie coutumière elle-même était impliquée.
Avez-vous été surpris par la chute de Blaise Compaoré ?
Nous avions, à l’époque, reçu tour à tour l’ex-mouvance présidentielle de même que l’ex-Chef de file de l’opposition politique (CFOP). Nous avions, dès lors, compris que le dialogue était quasiment difficile.
Avez-vous lu le livre de Albert Ouédraogo intitulé « la cheffecratie » ? Et qu’en pensez-vous ?
Au fait, l’auteur est venu nous remettre un exemplaire du livre. Mais pour vous dire vrai, nous n’avons pas eu le temps de le parcourir.
Avez-vous eu l’occasion d’interpeller Blaise Compaoré par rapport à son projet de révision constitutionnelle ?
Non
Vous avez pris une part active dans le dénouement heureux de la crise née du coup d’Etat du 16 septembre dernier. Pouvez-vous nous raconter comment les choses se sont passées à votre niveau ?
Nous avons effectivement pris part à ce dénouement heureux de la crise. Nous pouvons dire à ce niveau que nous avons géré avec tact l’arrivée dans le Palais de plusieurs militaires de l’ex-RSP et de l’armée régulière à leur demande. Dans la nuit du 22 septembre, vers 21h, ces militaires nous ont informés au préalable de leur arrivée au Palais. Ils entendaient ainsi nous prendre comme témoin de la signature du protocole d’accord qu’ils ont personnellement formulé. Une deuxième fois, le 28 septembre 2015 aux environs de 12h-13h, ils sont revenus parce que le dialogue était rompu. Au cours de cette rencontre, Son Eminence le Cardinal Philippe Ouédraogo est venu nous demander d’user de notre influence morale pour que les militaires ne s’affrontent pas. Ayant trouvé les deux camps sur place, il a formulé des bénédictions pour que le pays retrouve la paix. Après le départ de Son Eminence, nous avons repris la séance. Nous avons demandé aux militaires de tout faire pour éviter que le pays ne sombre dans le chaos. Il est à noter qu’ayant constaté la démission et le départ du président Blaise Compaoré, nous avons aussi géré cette période avec les généraux Lougué et Honoré, de la même manière que le putsch de Gilbert Diendéré : éviter l’affrontement.
Quelle est votre opinion sur les attaques terroristes qui ont touché le Burkina Faso ?
C’est à l’Armée d’assurer la sécurité de la population et l’intégrité du territoire. A la population de coopérer.
Avez-vous eu des nouvelles de Blaise Compaoré après sa chute ?
Nous n’avons pas de nouvelles de M. Blaise Compaoré depuis sa chute.
Vous avez fait des études dans des écoles françaises ; pourquoi ne parlez-vous jamais français lors de vos déclarations ?
C’est pour préserver notre langue nationale, notre culture et nos coutumes.
Quel est votre plat préféré ?
Le tô avec sauce gombo, le riz au soumbala, la sauce feuille (baa-bênda ou zê-youbga) et les pâtes alimentaires.
Pourquoi n’organisez-vous plus votre tournoi de football ?
Nous pensons que beaucoup ont pris le relais et le football a repris son envol, mais on verra !
D’où vous vient votre amour pour le football ?
Depuis notre jeune âge, comme tout enfant, nous nous sommes intéressé au sport, au football en particulier ; un des arts martiaux, et au cyclisme.
Propos recueillis par Hamed Nabalma
Drabo
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Au moins lui il est intelligent, il faut qu’il dise à ses compatriotes d’etre à coté de leurs maitres pour apprendre les bonnes idées.
16 novembre 2015Mechtilde Guirma
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Dans son effacement total devant la situation nationale, Son Éminence Philippe Ouédraogo, en bon démocrate tout comme son Éminence le Cardinal Paul Zoungrana, sait marquer d’une note très appréciable à ses actions propres. Que peut-on demander de plus à un vrai diplomate ? On pense toujours que l’action diplomatique appartient seulement à ceux qui ont fait des études en la matière ou ayant servi avec une expérience dans les représentations. Quelle erreur ! Encore faut-il que toute discipline universitaire eût exigé auparavant, une connaissance parfaite et approfondie de son terroir, de sa culture, de son histoire avec une conscience et une vocation du devenir.
Si seulement l’on pouvait me croire que l’Occident nous dût tout pour son développement : le pouvoir, la démocratie, la diplomatie !
En tout cas avec ces deux hautes personnalités, Cardinal-Moro-Naba, tandems des moments apocalyptiques que le pays vit en ce moment, je ne désespère pas de l’avenir de mon pays.
16 novembre 2015