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MACRON EN EGYPTE


 Les affaires d’abord, le reste on verra !

Un mois après son séjour au Tchad, le président français, Emmanuel Macron, est encore de retour sur le continent africain pour une visite de trois jours, cette fois en Egypte. Et comme ils sont regardants sur les déplacements à l’étranger des chefs d’Etat européens, notamment dans les républiques dites bananières, des défenseurs des droits de l’Homme ont donné de la voix pour interpeller Macron sur la situation préoccupante des droits de l’Homme en Egypte. Une préoccupation qui, selon l’entourage du président français, est prévue pour être abordée entre les deux chefs d’Etat. Ce dont  doutent  certains observateurs qui se demandent si, au Caire, ce sujet sera remis sur la table, à l’occasion de cette visite. Rien n’est moins sûr. D’autant plus qu’en cas d’évocation du sujet, il n’est pas exclu que naissent des désagréments politiques, alors qu’en pareilles circonstances, il est souvent mieux d’éviter les sujets qui fâchent.

En tout état de cause, aujourd’hui, c’est un Emmanuel Macron malmené par la grogne des « gilets jaunes »,   qui séjourne depuis hier, 27 janvier, au pays des Pharaons. Si cette escapade égyptienne de 72 heures peut être considérée comme une sorte d’échappatoire ou du moins un répit, elle vise beaucoup plus  à consolider les relations commerciales avec ce grand pays arabo-musulman de plus de 97 millions d’habitants et qui est un pont entre l’Afrique du Nord-Est et le Moyen-Orient, position qui permet à l’Egypte de  jouer un rôle géopolitique et géostratégique de premier plan dans deux grandes parties du monde : l’Afrique et l’Asie de l’Ouest. Sans aucun doute donc, le président français, accompagné d’une forte délégation composée de personnalités économiques et culturelles, atterrit chez les Egyptiens avec de nombreuses propositions d’affaires dans ses valises. En attendant de voir les accords de partenariat qui vont sanctionner cette visite, on peut être sûr que Macron fera dans la realpolitik ; ce que le Général De Gaulle avait su résumer, en son temps, à travers sa célèbre phrase selon laquelle « la France n’a pas d’amis, elle n’a que des intérêts ».

Les intérêts économiques sont énormes entre l’Hexagone et l’Egypte

C’est dire si les voix contestataires qui souhaitent que Macron crache ses quatre vérités à son homologue égyptien, Al-Sissi, dont le régime est accusé de violation des droits de l’Homme, risquent plutôt de ne pas trouver d’écho, pour ne pas dire qu’elles seront déçues. Car bien que la France soit considérée comme la patrie des droits de l’Homme, le nouvel ordre mondial et la situation socioéconomique qui est celle de l’Hexagone, font que Macron n’a pas d’autre choix que de privilégier les intérêts matériels des Français. Les affaires d’abord, le reste on verra après, peut-on ainsi dire ! D’autant que Donald Trump a ouvert la brèche avec son slogan « America first » (l’Amérique d’abord) et ne se gêne aucunement de coopérer avec n’importe quelle dictature au monde, tant que ne sont pas menacés les intérêts de son pays.

En réalité, le pays des Pharaons présente un intérêt…pharaonique pour la France, non seulement en raison de sa puissance militaire, mais aussi à cause du  rôle stratégique qu’il joue dans la stabilisation de « l’Orient compliqué »  et surtout des opportunités d’affaires. Les deux chefs d’Etat qui partagent visiblement la même fermeté vis-à-vis de ce qu’ils qualifient d’islam radical, ne vont pas manquer de mettre cette visite à contribution pour renforcer leur coopération dans la lutte contre le terrorisme. Les exportations françaises en Egypte ont grimpé de 20,6 % en 2017 pour atteindre 1,9 milliard d’euros. Ce qui n’est pas négligeable pour une puissance comme la France, considérée comme le 6e investisseur étranger  et placée au  11e rang des partenaires commerciaux de ce pays d’Afrique du Nord. Aussi faut-il rappeler que l’Egypte a été le premier acheteur du Rafale, du nom de l’avion de combat considéré comme le fleuron de l’industrie de l’armement française. N’oublions pas non plus que c’est Al Sissi qui a dû sauver la face de la France en lui rachetant pour 950 millions d’euros, les deux navires Mistral (Porte-hélicoptères amphibie)  dont elle a annulé la vente à la Russie en 2015 à cause du rôle de Moscou dans le conflit ukrainien. Cela traduit à quel point les intérêts économiques sont énormes entre l’Hexagone et l’Egypte qui, non seulement s’apprête à prendre la tête de l’Union africaine (UA), mais aussi à accueillir la CAN 2019 ; ce qui va évidemment nécessiter des investissements qui pourraient consolider davantage l’économie française.

Drissa TRAORE

 


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