HomeA la uneMANDAT D’ARRET   CONTRE GUILLAUME SORO EN RCI

MANDAT D’ARRET   CONTRE GUILLAUME SORO EN RCI


Alors qu’il retournait, le 23 décembre dernier, en Côte d’Ivoire, après six mois de pérégrinations aux relents de précampagne présidentielle en Europe, Guillaume Soro, ex-président de l’Assemblée nationale, évitera l’aéroport Félix Houphouët Boigny d’Abidjan où il était attendu. Au dernier moment, l’ex-chef rebelle a détourné son avion vers l’aéroport international d’Accra, au Ghana voisin où il a finalement atterri. Par la suite, l’on apprendra du procureur ivoirien de la République, qu’un mandat d’arrêt international a été émis contre le député de Ferkéssédougou pour « tentative de déstabilisation et détournement de deniers publics » portant sur la somme d’un milliard et demi de francs CFA. Le moins que l’on puisse dire, c’est que cette veille de Noël est un sale temps pour Guillaume Soro qui se retrouve dans  de beaux draps.

 

On se demande combien de temps durera sa cavale hors de son pays

 

Comment pouvait-il en être autrement quand on sait la manière cavalière et tonitruante dont il a rompu les amarres avec son mentor, le chef de l’Etat, Alassane Dramane Ouattara (ADO), en snobant son RHDP (Rassemblement des Houphouétistes pour la démocratie et la paix) pour déclarer sa candidature à la présidentielle de 2020 ? Si ses réflexes d’ex-chef rebelle lui ont permis, lundi dernier,  d’éviter de se faire alpaguer à l’aéroport d’Abidjan, Guillaume Soro est-il pour autant tiré d’affaire ? Rien n’est moins sûr. Au contraire,  l’on se demande combien de temps durera sa cavale hors de son pays, pour cette affaire de mandat d’arrêt international émis par son propre pays où il n’y a pas longtemps, il faisait encore la pluie et le beau temps ? Si l’on ajoute à cela, le mandat d’arrêt du Burkina Faso, émis contre lui dans l’affaire dite des écoutes téléphoniques liée au coup d’Etat manqué de 2015 du général Gilbert Diendéré, et ses déboires judiciaires en France où il avait aussi eu maille à partir avec la Justice, l’on se demande si Bogota n’est finalement pas en train d’être rattrapé par son passé. Bien malin qui saurait répondre à cette interrogation. En attendant, l’on peut se demander ce que ce feuilleton judiciaire de l’ex-occupant du perchoir, réserve à la Côte d’Ivoire. Car, à travers ce qu’il a pu démontrer depuis la rébellion de 2002, Guillaume Soro n’est pas un enfant de chœur et pourrait même refaire preuve d’une forte capacité de nuisance. En tout cas,  tout porte à croire qu’il ne restera pas les bras croisés, face à une telle situation qui a aussi  vu l’interpellation de certains de ses proches. Mais Guillaume Soro est-il à plaindre ? Difficile de soutenir une telle thèse. Car, en s’opposant ouvertement au président ADO et en se posant en adversaire déclaré du régime,  il savait ce à quoi il s’exposait. Et en ancien homme du sérail, il devait s’attendre à ce que ses dossiers sales soient exhumés d’une façon ou d’une autre pour freiner ses ardeurs. Ces tuiles qui lui tombent en ce moment sur la tête, sont donc loin d’être une surprise. Mieux, on peut dire que c’est la rançon de son ambition débordante pour le pouvoir ; lui qui, en l’espace de  quelques années, a gravi tous les échelons de la haute sphère du pouvoir d’Etat au point de donner aujourd’hui le sentiment que seul le fauteuil présidentiel est capable de répondre à ses nouvelles ambitions.

 

En voulant sortir de l’ombre du président ADO, Soro s’est lui-même rendu beaucoup plus vulnérable

 

Oubliant qu’il a non seulement fait beaucoup de bruit, mais s’est aussi fait beaucoup d’ennemis. Aujourd’hui, cette ambition est en train de le consumer, au point que quelqu’un a pu dire de lui, qu’il est homme pressé. Et c’est au moment où il pensait pouvoir prendre son ultime envol que la vie lui tend une coupe amère dont on se demande s’il ne boira pas le calice jusqu’à la lie. Comment fera-t-il pour s’en sortir ? Guillaume Soro a-t-il fait le mauvais choix au mauvais moment ? En s’opposant frontalement  à Ouattara, s’est-il confronté à plus fort que lui ? En tout cas, si ce n’est pas la fable du pot de terre contre le pot de fer, cela y ressemble fort. Et tout porte à croire que s’il était docilement resté sous la carapace de président de l’Assemblée nationale, il serait à l’abri de bien des ennuis judiciaires qui sont les siens aujourd’hui. C’est dire si en voulant sortir de l’ombre du président ADO, Soro s’est lui-même rendu beaucoup plus vulnérable qu’il ne le pensait. Même si, dans le cas d’espèce, l’on peut se demander si la Justice n’a pas été instrumentalisée, au regard du motif d’attentat à l’autorité de l’Etat et à l’intégrité du territoire national. Cela dit, pour autant qu’il n’ait rien à se reprocher, Guillaume Soro aurait dû prendre son courage à deux mains pour faire face à la Justice. Il y a d’autant plus intérêt que s’il en sort blanchi, cela contribuera à renforcer son image. Mais s’il continue de chercher à se soustraire à la Justice, il continuera aussi à faire peser les soupçons sur sa personne. Toute chose qui laissera croire qu’il n’a pas la conscience tranquille et qu’il a des choses à se reprocher. En tout état de cause, Guillaume Soro a intérêt à faire face à son destin. Autrement, c’est son avenir politique qui risque de s’écrire désormais en pointillés.

 « Le Pays »

 

* Bogota : surnom donné à Guillaume Soro


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